Le Saltimbanque, entre terre et mer
Ouverte en 2019 à Eaucourt-sur-Somme, l’auberge gastronomique de Sébastien Porquet a su développer une identité forte, tant esthétique que culinaire, à partir des ressources de la Vallée de la Somme.
Gravée
sur une tablette de merisier picard, la carte du Saltimbanque ne
s’embarrasse
pas de fioritures inutiles. Sur les hauteurs d’Eaucourt-sur-Somme,
la dégustation se fait à
l’aveugle,
en 4 ou 5 chapitres. « Quand on vient ici, il y a des règles.
Cela nous permet de nous affranchir de certaines contraintes et de
mieux servir nos clients »,
explique Sébastien Porquet. Une posture qui vient aussi renforcer
« l’expérience »,
même
si le terme irrite passablement le maître
des lieux.
Et
pourtant, tout a été
travaillé pour proposer un concept global, cuisine, décoration et
ambiance comprises. «
On ne vient pas chez nous par hasard, il faut donner envie aux gens
de se déplacer. Il est donc impossible de proposer quelque chose
d’approximatif
»,
concède-t-il.
Le moulin, la vallée, le vieux tracteur Guldner…
L’extérieur
prépare les esprits à
ce
qui se joue à
l’intérieur
: un spectacle faussement nonchalant où
l’on
célèbre
la Vallée
de la Somme, sa nature et ses productions. Vêtus
de vestes en chambray bleu et de tabliers en cuir, Kevin Pruvost,
chef de salle, Manon Domeignoz, serveuse, mais aussi Sébastien
Porquet assurent l’accueil
et le service des plats. «
Nous faisons toujours quelques recherches sur nos clients, non pas
pour être
intrusifs, mais pour mieux les connaître
et adapter notre approche »,
confie-t-il.
Un chef autodidacte
Et la cuisine dans tout ça ? Créative et équilibrée, elle s’appuie sur une centaine de producteurs locaux. « Je m’occupe des achats et je garde un œil sur le menu, mais sinon Clément [Boulongne, second de cuisine] et Capucine [Brun, cheffe pâtissière] font ce qu’ils veulent », assure celui qui a fait ses armes sur l’aire d’autoroute de la Baie de Somme. Il s’est ensuite frotté à la restauration collective à l’auberge de jeunesse de Merlimont avant de prendre entre 2009 et 2018 la tête du restaurant des Corderies, hôtel 4 étoiles à Saint-Valéry. « Je n’avais jamais vraiment cuisiné, alors je me suis instruit et j’ai appris », dit-il. Le succès est au rendez-vous, on parle même d’une possible étoile.
Et
puis finalement non. En mai 2018, Sébastien
Porquet visite l’Auberge
du Moulin sur les hauteurs d’Eaucourt-sur-Somme.
Un peu moins d’un
an plus tard, il installe dans ce bâtiment
communal son Saltimbanque. «
Il y avait un risque parce que ce n’était pas mon territoire. Il a
fallu que je réapprenne où
cueillir,
par exemple. Mais cela m’a
permis de me rapprocher de mes producteurs. Ma cuisine, en fait, elle
n’a
pas changé.
J’ai
toujours acheté les mêmes
produits »,
pointe Sébastien Porquet, qui est l’un
des premiers à
avoir
décroché l’Étoile
verte du Guide Michelin.
Un entrepreneur averti
Surnommé Saltimbanque par un ex-compagnon de travail, le chef de cuisine n’en est pas moins un entrepreneur réfléchi. D’une nature impatiente, mais prudente, il a débuté en limitant ses investissements et en ayant toujours un œil sur les chiffres. Une approche qu’il n’a jamais quittée. Technophile, il pilote son établissement à l’aide de tableaux lui permettant de suivre en direct son taux de réservation, l’évolution de l’activité ou encore son positionnement par rapport aux années précédentes. « Ces données sont très précieuses, elles m’aident à avancer, à prendre les bonnes décisions », note celui qui a aussi développé des chambres d’hôtes et une petite boutique.