Loi d'orientation des mobilités
Pistes cyclables en agglomération : une obligation pas toujours respectée
Sobriété climatique oblige, les mobilités douces, dont le vélo, doivent encore être encouragées. Déjà, dans son article 20, la loi «Laure» sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie du 30 décembre 1996 avait imposé aux collectivités l’aménagement de pistes cyclables, lorsque était en jeu la «réalisation ou la rénovation d’une voie urbaine». Les divergences d’interprétation de ce texte ont motivé le Parlement à le revoir à l’occasion de la loi d'orientation des mobilités du 24 décembre 2019. Décryptage.
La portée de l’obligation...
Le nouvel article L. 228-2 du Code de l’environnement impose aujourd’hui très clairement aux collectivités la réalisation de pistes cyclables : «A l'occasion des réalisations ou des rénovations des voies urbaines, à l'exception des autoroutes et voies rapides, doivent être mis au point des itinéraires cyclables pourvus d'aménagements prenant la forme de pistes, de bandes cyclables, de voies vertes, de zones de rencontre ou, pour les chaussées à sens unique à une seule file, de marquages au sol, en fonction des besoins et contraintes de la circulation».
Le champ d’application de cette obligation est extrêmement large : elle s’applique dès lors qu’une collectivité «réalise» ou «rénove» une voie urbaine. La jurisprudence administrative a adopté une interprétation large de ces notions. Il s’agit selon le tribunal administratif de Marseille de «tous travaux, quelle qu’en soit l’ampleur, qu’une collectivité est amenée à réaliser sur la voirie dont l’entretien est à sa charge», dès lors qu’ils «sont de nature à modifier les conditions de circulation sur ces voies, soit par modification de leur profil, soit par adjonction ou suppression d’éléments de voirie, soit encore par réfection du revêtement ou du marquage de ces voies». La simple réfection du revêtement entraîne donc l’obligation de prévoir un parcours cyclable.
Si la mention «en fonction des besoins et contraintes de la circulation» a pu être interprétée par certaines collectivités - avec plus au moins de mauvaise foi- comme une cause d’exonération possible, tant la jurisprudence la plus récente que les débats parlementaires montrent qu’il ne s’agit en réalité que de permettre de moduler l’intensité de l’obligation, et non son principe même. Et les collectivités ne peuvent se décharger de leur obligation en limitant une voie à 30 km/h (CAA de Douai, 16 mars 2021, 20DA00786). Seule réelle et unique limite à cette obligation : elle n’est pas applicable aux autoroutes et voies rapides.
...et son contenu
Le Code de l’environnement prend la peine de donner une liste limitative des aménagements cyclables que doivent créer les collectivités : pistes, bandes cyclables, voies vertes, zones de rencontre, marquages au sol pour les chaussées à sens unique à une seule file.
Comme mentionné, la collectivité maître d’ouvrage devra exécuter cette obligation en fonction des «besoins et contraintes de la circulation», qui ne permettent que de déterminer le type d’aménagements cyclables à mettre en place, mais ne sauraient exempter la collectivité de son obligation. Comme l’indique la Cour administrative d’appel de Douai, dans un arrêt du 16 mars 2016, «les besoins et contraintes de la circulation doivent être pris en considération pour déterminer quels aménagements doivent être créés. Une dissociation partielle de l'itinéraire cyclable et de la voie urbaine ne saurait être envisagée, dans une mesure limitée, que lorsque la configuration des lieux l'impose au regard des besoins et contraintes de la circulation».
En outre, l’article L. 228-2 du Code de l’environnement précise que : «lorsque la réalisation ou la rénovation de voie vise à créer une voie en site propre destinée aux transports collectifs et que l'emprise disponible est insuffisante pour permettre de réaliser ces aménagements, l'obligation de mettre au point un itinéraire cyclable peut être satisfaite en autorisant les cyclistes à emprunter cette voie, sous réserve que sa largeur permette le dépassement d'un cycliste dans les conditions normales de sécurité prévues au Code de la route». L’article R. 414-4 du Code de la route prévoit, en ce sens, que tout dépassement d’un cycliste en agglomération doit se faire à plus d’un mètre de celui-ci. Si, pour respecter ces dispositions, la collectivité estime qu’elle ne peut que permettre aux cyclistes l’accès à la voie de bus, alors celle-ci devra prévoir une voie tenant compte de cette distance de sécurité.
A noter : hors agglomération, la collectivité n’est tenue que de réaliser une étude technique, financière et de fréquentation sur la création d’un itinéraire cyclable. Ce n’est qu’en cas de «besoin avéré» qu’un aménagement ou parcours cyclable est réalisé, «sauf impossibilité technique ou financière», ou lorsqu’un tel itinéraire est prévu au titre d’un document d’urbanisme.