Professions

Commissaires de justice : « Après des années très difficiles, la profession commence à redresser la tête »

À l’occasion de son troisième congrès annuel, la Chambre nationale des commissaires de justice a notamment réclamé une pause dans la création de nouveaux offices.


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C’est le bilan d’« une année écoulée complexe », que le président de la Chambre nationale des commissaires de justice, Benoit Santoire, a dressé lors de son discours d’ouverture du troisième Congrès de la profession, le 12 décembre dernier à Paris. Entrée en vigueur du code de déontologie des commissaires de justice le 1er mars 2024, de la nouvelle convention collective des commissaires de justice, « pleinement opérationnelle », des certificats de spécialisation « qui couvrent désormais l’ensemble des missions », de la réforme des inscriptions comptables le 1er janvier 2025…

« Des résultats encourageants »

La profession se félicite, par ailleurs, de bénéficier désormais d’une inscription facilitée sur la liste des personnels qualifiés pour le contrôle des comptes de gestion de tutelle (les commissaires de justice y seront éligibles de droit) et de la réévaluation des indemnités de déplacement, dans le cadre de la réforme du service de compensation des transports pour les actes des commissaires de justice (signification ou procès-verbal), entrée en vigueur le 1er juin 2024. Et « sur le plan des activités accessoires, nous nous réjouissons d’avoir désormais le droit d’assurer l’intermédiation de la vente des biens dont nous assurons la gestion », a ajouté Benoît Santoire.

« Sur le plan économique, après des années très difficiles, la profession commence à redresser la tête, avec des résultats encourageants. Sur ce point, la revalorisation du tarif civil, après celle de l’aide juridictionnelle, et celle du tarif pénal, constituent un signal fort de l’attention envers nous de la Chancellerie et de Bercy. Avec la réforme du service de compensation des transports, les gains pour la profession s’élèvent à plus de 27 millions d’euros par an. Nous avons réussi à être entendus au plus haut niveau. »

Des chantiers encore à mener pour consolider la nouvelle profession

Pour autant, « beaucoup reste à faire pour faire des commissaires de justice une profession du droit consolidée », a-t-il reconnu. « Cela suppose de parfaire notre modèle économique au travers de la remontée des données et au travers de notre nouveau plan comptable qui devra permettre de mieux refléter la diversité de la profession. Cela suppose, ensuite, de mener à terme l’important chantier de la réforme de la saisie des rémunérations. » À compter du 1er juillet 2025, les procédures de saisie des rémunérations seront intégralement confiées aux commissaires de justice, qui seront chargés de mettre en œuvre la saisie et de répartir les fonds.

Autres chantiers « essentiels pour asseoir la stature du commissaire de justice » : celui du recouvrement simplifié des créances commerciales, « que nous portons avec nos amis greffiers de commerce et juges consulaires dans l’intérêt des entreprises et de notre économie », celui de la facture électronique, généralisée en 2027, « pour laquelle notre profession veut s’impliquer dans la prévention des impayés », et celui des audiences pénales, « pour lequel une nouvelle convention avec la Direction des affaires criminelles et des Grâces est envisagée ».

Un premier bilan des dispositions de la Croissance relatives aux créations d’offices

Autre préoccupation : la synergie entre les anciens huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires « n’a pas encore atteint sa pleine efficacité géographique et économique », a poursuivi Benoît Santoire. Le bureau de la Chambre nationale entend d’ailleurs « ouvrir une discussion » sur la périodicité de la révision des tarifs et de la carte d’installation des commissaires de justice, qui résultent de l’application de la loi Croissance. « Deux ans sont un délai bien trop court pour offrir une stabilité économique à nos offices, après plusieurs années de récession. Nous avons besoin de souffler. » C’est le message que la profession entend porter auprès de l’Autorité de la concurrence. Un arrêté du 26 décembre 2023 prévoit la création de 20 offices et la nomination de 32 commissaires de justice, dans un délai de deux ans sur les 13 départements restant en zones vertes.

La directrice des Affaires civiles et du Sceau, Valérie Delnaud, a répondu à l’interpellation du président de la Chambre nationale des commissaires de justice au sujet de la périodicité de la révision des tarifs et de la carte d’installation de ces professionnels. « À cet égard, je veux souligner que, dix ans après la loi Croissance, il est nécessaire de réaliser un bilan. Un premier bilan va être fait par l’Autorité de la concurrence. Mais une mission sera également confiée aux Inspections de la Justice et des Finances, et cette mission a vocation à rendre un rapport au cours de l’année 2025. Je sais les attentes attachées à ce bilan, et sachez que ma direction sera partie prenante à ces travaux », a déclaré la magistrate.



Le commissaire de justice aux côtés des collectivités territoriales

Lors du troisième Congrès des commissaires de Justice, le président de la Chambre nationale, Benoît Santoire, a présenté un nouvel ouvrage intitulé « Le commissaire de justice au service du droit public ». Élaboré avec des professeurs de droit public, ce guide pratique destiné aux élus, agents et cadres des collectivités publiques est composé de 250 fiches thématiques qui émettent des recommandations pour prévenir les risques d’illégalité et sécuriser les actions administratives. Cet ouvrage traduit « notre volonté de se rapprocher des collectivités territoriales », a-t-il expliqué, dans un contexte d’inflation des normes et d’insécurité juridique, et d’augmentation des litiges administratifs. Avec un maillage territorial de 3 800 professionnels, « le commissaire de justice est un juriste de proximité ». Une version dématérialisée de ces fiches pratiques sera bientôt disponible.