Quel est le rôle de Film France, en matière de tournages et de production ?
Le rôle de Film France consiste à promouvoir l'attractivité des territoires français en matière de tournages, réalisation d'animations et d'effets audiovisuels et de jeux vidéo. Depuis l'an dernier, pour plus d'efficacité, cette mission, auparavant assurée par une association subventionnée par le CNC l'est directement par ce dernier. L'attractivité repose principalement sur deux piliers. D'une part, en lien avec les commissions locales du film, Film France rend service aux producteurs. Elle leur fait découvrir les décors, les talents et les met en relation avec les professionnels locaux. Cela passe par une connaissance fine du maillage territorial. De plus, Film France assure la visibilité de ces ressources, par exemple, en organisant des Éductour qui permettent aux producteurs de découvrir une région. Nous organisons aussi des opérations de communication, lors de grands événements comme le festival de Cannes ou d’Annecy [film d’animation]. Le deuxième volet de l'attractivité réside dans l'incitation fiscale par le C2I, le Crédit d'impôt international : les cinéastes étrangers récupèrent 30 % de leurs dépenses en France, et jusqu'à 40 % sous certaines conditions. Il s'agit d'un argument fort qui conduit majors hollywoodiennes et plateformes à choisir la France.
Comment s'explique la performance exceptionnelle de cette activité, en dépit de la pandémie ?
2021 est l'année de tous les records : les dépenses de tournage ont atteint 2,8 milliards d'euros, soit une augmentation de 35 % par rapport à 2019 ! Il s'agit donc d'un phénomène structurel et non de rattrapage. Cette croissance repose principalement sur l'audiovisuel, sous l'impulsion des plateformes, et sur l'international. Des metteurs en scène étrangers prestigieux ont tourné en France, comme Ridley Scott pour «The Last Duel».
«Arcan», la série télévisée d'animation de Netflix, inspirée du jeu vidéo League of Legends, a été réalisée ici. Auparavant, si la pandémie a constitué une période très difficile pour la culture, nous avons largement limité son impact en ce qui concerne les tournages. En mars 2019, 500 tournages se sont retrouvés à l'arrêt du jour au lendemain. Mais nous nous sommes mobilisés pour permettre leur reprise dès le mois de mai 2020, grâce à un fonds doté de 100 millions d'euros, abondé pour moitié par le CNC, qui a permis d'assurer le risque d'interruption lié au Covid. Et des procédures spéciales ont permis l'arrivée de 250 équipes de production de l'étranger, en dépit des restrictions de vol.
L'avenir du secteur est-il pour autant assuré ?
Depuis 2015, date à laquelle le crédit d'impôt international a été renforcé, l'ensemble du pays connaît une croissance des activités liées aux tournages et studios. L’Île-de-France demeure la première région en valeur pour les tournages et la production. Mais c'est le reste du territoire qui a le plus bénéficié de cet essor. Les exemples sont nombreux : Wes Anderson a tourné «The French Dispatch» à Angoulême, Ridley Scott a choisi la Camargue, «Stillwater»
de Tom McCarthy a été tourné à Marseille... De nombreuses productions d'animation ont été réalisées à Montpellier, Valence ou Toulouse, des jeux vidéo à Bordeaux...Toutefois, au niveau national, de nouveaux investissements sont indispensables pour faire face à la concurrence mondiale et à l'essor de la demande. En particulier, le CNC renforce son action pour doter la France des meilleurs studios du monde. En 2020, nous avions déjà investi un million d'euros et en 2021, dans le cadre du plan France relance, 10 millions d'euros ont été accordés à une vingtaine de projets sur le territoire. Avec le plan France 2030, 350 millions d'euros vont être investis dans les studios de tournage et de production numérique, mais également dans la formation, pour faire face aux difficultés de recrutement des équipes de production. Dans les années à venir, nous allons changer la donne.
Propos recueillis par Anne DAUBRÉE