Les ordonnances d’urgence économique et sanitaire
Les parlementaires ont voté le 23 mars 2020 la loi habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnances. Ceci permettant d’accélérer le processus législatif. Au total une quarantaine d’ordonnances sont attendues en toutes matières, notamment le droit du travail qui a été défini comme secteur prioritaire par le Gouvernement. Les ordonnances sociales ont été publiées le 26 mars 2020 applicables dès leur publication, et même rétroactivement depuis le 12 mars dernier pour un certain nombre de dispositions.
Sur l’imposition des congés payés
Mesure phare du projet initial, les parlementaires ont finalement mis des conditions qui rendent le texte difficilement applicable, puisqu’il suppose un accord collectif : soit accord d’entreprise, soit accord de branche. Beaucoup de branches ont anticipé le mouvement et sont d’ores et déjà en train de négocier sur le sujet. Pour celles et ceux qui ne souhaitent pas attendre un tel accord de branche, l’accord d’entreprise reste le passage obligé.
De quoi s’agit-il ?
Il s’agit des congés payés acquis par le salarié quelle que soit la période d’acquisition.
Que peut faire l’employeur ?
L’employeur peut être autorisé à modifier les dates de congés fixées sans respecter le délai légal minimal d’un mois. Y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ils ont normalement vocation à être pris. L’ordonnance prévoit également que l’accord collectif peut autoriser l’employeur à fractionner les congés sans l’accord du salarié, et à fixer des dates de congés sans être contraint d’accorder un congé simultané à des conjoints ou partenaires PACS travaillant dans la même entreprise.
Dans quel délai ?
Le délai de prévenance pour l’imposition des jours de congés peut être réduit jusqu’à un jour franc. La mesure est applicable jusqu’au 31 décembre 2020 maximum.
Combien et quels jours peuvent être fixés ?
L’ordonnance prévoit un maximum de 6 jours ouvrables de congés qui peuvent être fixés ou déplacés unilatéralement.
Sur l’imposition des RTT
L’ordonnance permet de déroger aux règles de prise des repos autres que les congés. Attention, l’ordonnance indique que l’employeur ne peut utiliser cette solution que si «l’intérêt de l’entreprise le justifie eu égard aux difficultés économiques.» Il conviendra donc de veiller à l’indiquer dans les communications auprès des CSE et/ou des salariés.
De quoi s’agit-il ?
Il s’agit des RTT prévus par accord prévoyant un système de décompte supérieur à la semaine, des jours de repos des cadres soumis à une convention de forfait en jours ou en heures ou encore des jours épargnés sur un Compte épargne-temps (CET).
Que peut faire l’employeur ?
L’employeur peut soit imposer la prise de ces repos à une date qu’il détermine, soit modifier les dates de prise des repos d’ores et déjà fixées individuellement ou collectivement.
Dans quel délai ?
Le délai de prévenance pour l’imposition des jours de RTT peut être réduit jusqu’à un jour franc. La mesure est applicable jusqu’au 31 décembre 2020 maximum.
Combien de jours ?
L’employeur peut ainsi fixer un maximum de 10 jours de repos. À noter que s’il fait usage de la fixation des jours de congés comme vu précédemment, le maximum de 10 s’apprécie en cumulant les congés et les RTT.
Sur la durée du travail
L’ordonnance permet aux entreprises relevant de secteurs d’activités particulièrement nécessaires à la sécurité de la nation et à la continuité de la vie économique et sociale (déterminés par décret à paraître) à déroger aux dispositions légales et conventionnelles relatives aux durées maximales de travail.
Il en est ainsi :
- de la durée quotidienne maximale de travail qui peut être portée à 12 heures ;
- de la durée quotidienne maximale de travail accomplie par un travailleur de nuit qui peut être portée à 12 heures sous réserve de l’attribution au salarié d’un repos compensateur égal au dépassement constaté compris entre 8 heures et 12 heures ;
- de la durée du repos quotidien qui peut être réduit à 9 heures consécutives, sous réserve de l’attribution au salarié d’un repos compensateur égal à la durée du repos dont le salarié n’a pu bénéficier en deçà de 11 heures ;
- de la durée maximale hebdomadaire de travail qui peut être portée jusqu’à 60 heures ;
- de la durée moyenne hebdomadaire de travail, calculée sur une période quelconque de 12 semaines consécutives qui peut être portée jusqu’à 48 heures ;
- de la durée moyenne hebdomadaire de travail d’un travailleur de nuit, calculée sur une période quelconque de 12 semaines consécutives, qui peut être portée jusqu’à 44 heures ;
- du repos dominical qui pourra être accordé par roulement, cette règle pouvant être étendue aux entreprises qui assurent, à celles qui seront visées par les décrets, les prestations nécessaires à l’accomplissement de leur activité principale (fournisseurs, sous-traitants).
Participation – intéressement
Par dérogation aux dispositions du Code du travail et aux stipulations conventionnelles en vigueur dans l’entreprise, la date limite de versement aux bénéficiaires ou d’affectation sur un plan d’épargne salariale ou un compte courant bloqué des sommes attribuées en 2020 au titre de l’intéressement ou de la participation est reportée au 31 décembre 2020.
Prime «Macron»
La prime «Macron» de 1 000 euros mise en place fin 2018 avait été reconduite en 2020, mais les entreprises avaient l’obligation de conclure un accord d’intéressement. Cette obligation a été supprimée.
Cyrille Gueniot
ACD Avocats – www.acd.frcgueniot@acd.fr