Héliciculture
Somme : Saveurs d’escargots, producteur artisan
Saveurs d’escargots élève, transforme et commercialise des produits autour du gastéropode à coquille à Sentelie. L’élevage a imaginé une offre couplant visite et dégustation à destination des groupes.
« Dans une vie antérieure, j’étais fonctionnaire pour l’Office national des forêts. Mais j’ai toujours été passionné par les escargots », sourit Romain Godefroy. Il y a 15 ans, il décide de lancer son propre élevage, Saveurs d’escargots. Pour cela, il construit une nurserie, un premier parc de 1 200 m2 puis un second de 300 m2, mais aussi un laboratoire, installés à Sentelie.
« Quand on parle d’escargot, on pense aussitôt à celui de Bourgogne. En réalité, ce qui est vendu dans le commerce provient à 95% de l’export. L’escargot vient des pays de l’Est, il est ébouillanté en Grèce et cuisiné en Italie… C’est un vrai tour d’Europe ! », soupire le producteur qui a décidé d’élever des gros gris, une autre espèce, moins connue, mais qui s’adapte parfaitement à la vie en élevage.
« Dans la nature, la reproduction se fait au printemps. Mais comme il faut en moyenne cinq mois pour que l’escargot arrive à maturité, il est impossible d’être prêt pour Noël qui représente 50% de mon chiffre d’affaires », explique-t-il.
500 000 gastéropodes
Les gastéropodes à coquille sont donc installés dans un espace chaud et lumineux pour les sortir de leur hibernation et provoquer leur reproduction dès l’automne. Les petits sont placés en nurserie dans une serre chauffée jusqu’au beaux jours, avant de rejoindre les parcs extérieurs. Là, les 500 000 gastéropodes mangent colza et complément alimentaire pour renforcer leur coquille. « Cela peut paraître énorme, mais au plus bas il y a au moins 20% de perte », souligne notre guide.
À partir du mois d’octobre, les éléments matures sont ramassés, réunis dans des sacs de sept kilogrammes et mis dans un nouvel espace pendant dix jours. « Cette période leur permet de sécher et de faire un jeûne pour se purger. Cela leur permet également d’entrer en hibernation profonde. C’est incontournable pour passer à la phase suivante : en tant que producteur, pour le respect du bien-être animal, je n’ai pas le droit d’ébouillanter les escargots actifs », détaille Romain Godefroy.
Être créatif
Dans son laboratoire, le producteur, aidé par des intérimaires, décoquille les mollusques à la main avant de les blanchir quelques minutes et de les surgeler afin de garantir la qualité du produit. Avant d’être transformés, les escargots sont cuits au court-bouillon pendant deux heures et demie. « Je rajoute une étape : je reprends un par un les mollusques pour retirer l’appareil reproducteur qui n’est pas agréable en bouche. C’est long et fastidieux, mais au goût et au ressenti, c’est incomparable », pointe l’éleveur.
Outre le traditionnel escargot à la bourguignonne, Romain Godefroy a imaginé 18 recettes pour créer l’envie et faire entrer ce plat dans les habitudes. « Il y a des clients que je ne vois qu’au moment des fêtes puisque c’est un plat qui est très associé à Noël, mais étant présent toutes les fins de semaine sur des marchés comme Amiens ou Poix-de-Picardie, il était impératif d’être créatif pour fidéliser ma clientèle », dit-il encore. Boudin d’escargots, bruschetta, tapenade, escargots à la crème à l’ail, au safran de la baie de Somme, croquille au maroilles ou au bleu… Saveurs d’escargots mise sur la diversité.
« La crise sanitaire a été un choc puisque nous accueillons habituellement trente cars par an et que nous avions aussi des restaurateurs dans notre clientèle. Mais nous avons vu arriver de nouveaux profils sur les marchés. Ils ont été séduits par un produit qu’ils connaissaient peu, mais aussi par le fait que tout soit français et artisanal »,souligne Romain Godefroy qui s’est vu débordé à Noël dernier. « C’était de la folie, un jour, j’ai été obligé de refuser des clients pour assurer mes commandes. Ça, c’est l’effet positif de la Covid, les produits locaux ont connu un réel intérêt et je pense que je conserverai une partie de la clientèle qui m’a découvert pendant le confinement », ajoute-t-il.
Visiter et déguster
En 2010, l’éleveur, qui vend majoritairement sa production au grand public, décide d’ouvrir son élevage. « Je fais partie de "Bienvenue à la ferme", et l’une des conditions pour entrer dans ce réseau, c’est d’ouvrir au moins ponctuellement ses portes au grand public », poursuit-il. Dans un premier temps, il a imaginé des portes ouvertes annuelles où ses clients étaient invités. « Cela permet aussi de leur montrer notre façon de travailler, d’être transparent sur les conditions d’élevage et de transformation. Ils voient bien que tout est fait ici », note Romain Godefroy.
Puis, il a décidé de proposer une visite et une dégustation au groupe. « Nous avons commencé avec des clubs du troisième âge et maintenant nous avons aussi des CE. Ils viennent en majorité du Nord, de la Normandie et de l’Île-de-France. J’ai aussi eu quelques Belges et des Anglais également. Nous sommes aussi référencés chez Somme Tourisme depuis dix ans. Nous accueillons en moyenne 30 cars par an, sauf ces deux dernières années forcément où tout a été malmené avec la Covid », regrette celui qui espère reprendre prochainement cette activité.