Réemployer plutôt que recycler : Haut la Consigne veut instaurer une filière durable

Engagée depuis plusieurs années dans une démarche zéro déchet, impulsée par la Ville de Roubaix – ville pionnière du «ZD» en France –, Florence Duriez a voulu passer à la vitesse supérieure en imaginant une filière de réemploi des bouteilles et des plats en Hauts-de-France. Elle a déjà séduit une quinzaine de brasseurs.

Catherine Thiebert et Florence Duriez, deux des trois associées de Haut la Consigne.
Catherine Thiebert et Florence Duriez, deux des trois associées de Haut la Consigne.

Le recyclage, c'est bien ; le réemploi c'est encore mieux. Alors que le recyclage utilise un four à 1 500 degrés pour faire fondre les bouteilles, le réemploi n'a besoin que d'une laveuse à 80 degrés pour donner une seconde vie aux bouteilles. Avec 75% d'énergie et 33% d'eau en moins, combinés à une baisse de 79% des gaz à effet de serre1, nul besoin d'être scientifique pour comprendre que le réemploi économise de nombreuses ressources. C'est en partant de ce constat que Florence Duriez a imaginé la marque «Ramène ta bouteille» en juillet 2019, en s'associant avec Catherine Thiebert et Blandine Rappeneau, pour créer l'entreprise Haut la Consigne.

Déjà 15 brasseries partenaires

Moulins d'Ascq, Brewbaix, La Ferme des Mottes, Le Pays flamand... ces brasseries régionales ont d'ores et déjà fait confiance aux entrepreneuses. Via 71 points de collecte (Biocoop, Label Vie, E.Leclerc, Match, O'Tera...), les consommateurs peuvent ramener leurs bouteilles, qui aujourd'hui sont amenées jusqu'à la brasserie 3 Monts, à Saint-Sylvestre-Cappel avec laquelle Haut la Consigne a noué un partenariat, en attendant l'implantation d'un centre de tri et de lavage. Un million d'euros seront nécessaires pour ce projet, et la chef d'entreprise est en pleine recherche de financement.

Florence Duriez et ses associées espèrent avoir leur propre centre de lavage d'ici deux ans. Un processus hygiénique et écologique qui doit permettre un lavage et un séchage des bouteilles à grande échelle. «Nous voulons permettre aux habitants de réduire leurs déchets, on sent qu'ils veulent agir. Mais aujourd'hui, beaucoup de contenants ne sont pas réutilisés.» En Allemagne, 20 milliards de bouteilles sont réutilisées chaque année, un pays où la consigne est entrée dans habitudes de vie.

«La brasserie Moulins d'Ascq a souhaité réinstaurer la consigne, parce que ses consommateurs étaient en demande et nous avons lancé une expérimentation dès juillet 2019 avec 25 magasins partenaires», se rappelle Florence Duriez. Le résultat était là : au bout de trois mois, une bouteille sur trois revenait. La preuve que le consommateur est prêt à s'engager pour peu qu'il ait connaissance d'une filière de réemploi près de chez lui.

Incubées chez Evident!

Soutenue par rev3 – elles viennent d'ailleurs de recevoir 1 500 € de subventions de la part de l'accélérateur –, Haut la Consigne poursuit son maillage et souhaite développer une «action de masse» auprès des grandes et moyennes surfaces (GMS). «La collecte est plus simple quand c'est massifié. Etendre nos points de collecte, c'est ce qui crée notre gisement.» Certaines bouteilles repartent chez les brasseurs ou sont réutilisées par la brasserie 3 Monts, forte de 100 ans d'expérience, dont 90 années de lavage.

Ramener sa bouteille, mais aussi son plat !

«Nous avons développé une filière de réemploi de plats, 'Ramène ton plat', en expérimentation avec quatre restaurateurs de la métropole lilloise qui proposent la vente à emporter dans des contenants consignés (Pistache et Cacahuète à Wazemmes, Les Rabats-Joie dans le centre-ville de Lille, Sushi Boutik rue Solferino et Happy Popote à Wambrechies, ndlr).» Les associées ambitionnent de réemployer 3 millions de bouteilles par an. Quand on sait que la région compte pas moins de 150 brasseries, la filière de réemploi semble avoir un bel avenir devant elle.


1. Source : Cabinet Deroche 2009


Les rencontres Impact Finance du French Impact, en Hauts-de-France

Après Marseille et Grenoble en 2020, ces rencontres ont eu lieu le 15 février en format digital. French Impact, association lancée par le Gouvernement en 2018, dirigée par Stéphanie Goujon, mobilise dans une même dynamique tous les acteurs qui veulent faire de l'innovation sociale un levier majeur de transformation du pays, tout en mobilisant des investissements publics et privés pour financer l'amorçage et la croissance de ces structures. Dans le cadre du programme Impact Finance, cet événement a regroupé 37 porteurs de projet, 14 investisseurs en Hauts-de-France, pour une soixantaine de rendez-vous organisés, sous l'impulsion du maire de Roubaix Guillaume Delbar – la ville a été l'une des premières à être labellisée "French Impact" – et d'Olivia Grégoire, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Economie, des Finances et de la Relance, chargée de l'Economie sociale, solidaire et responsable. Florence Duriez a participé à cette rencontre pour sa recherche de financement pour sa station de lavage. «C'est important de transformer l'essai et les bonnes intentions, de faire progresser la cause de l'innovation sociale dans les Hauts-de-France», a introduit Guillaume Delbar. Le Gouvernement a prévu une enveloppe d'un milliard d'euros sur la finance à impact, notamment via le dispositif des "Contrats à Impact", lancés par Olivia Grégoire.