Pierre Marchica fait mousser sa 3 Monts au-delà des Flandres

Les brasseries de Saint-Omer (3,3 millions d’hectolitres de bière brassés par an) et Goudale à Arques (1 million d’hectolitres), toutes les deux dirigées par André Pecqueur, participent grandement aujourd’hui à faire des Hauts-de-France le premier pôle brassicole indépendant de France, comme le met en avant SOFIE, l’agence de développement économique du Pays de Saint-Omer et de Flandre intérieure.

Pierre Marchica fait mousser sa 3 Monts au-delà des Flandres

«Sur la région, et plus particulièrement sur notre secteur, la filière est particulièrement dynamique», souligne François Motte, président de SOFIE. D’ailleurs, à ce titre, d’autres brasseries ont su tirer leur épingle du jeu et développer leurs produits. C’est le cas de la brasserie1 3 Monts installée à Saint-Sylvestre-Cappel et dirigée par Pierre Marchica, à seulement quelques kilomètres d’Arques, qui ne souffre aucunement de la concurrence avec sa voisine audomaroise. La preuve, ces 3 millions d’euros fraîchement investis pour agrandir l’activité.

3 millions d’euros pour un nouveau bâtiment

Pierre Marchica.

Quand vous vous rendez à Cassel, venant de Lille, et que vous traversez la commune de Saint-Sylvestre-Cappel, vous ne pouvez pas ne pas remarquer ces grandes cuves en inox qui bordent la D933. Elles sont protégées par une grande façade de verre, et joliment habillées de lumières à la nuit tombée. Ce sont celles de la brasserie 3 Monts. Dans ces immenses cuves, est fabriquée notamment la bière éponyme. D’ici un an ou deux, ce site pourra se visiter – le dossier est à l’étude – en même temps, Pierre Marchica, son jeune dirigeant, qui a repris l’affaire familiale en 2010, a décidé d’injecter 3 millions d’euros pour faire construire un nouveau bâtiment. Cet investissement devrait permettre de produire «mieux, plus et qualitatif» assure le chef d’entreprise. «Dans un marché en plein essor, il est important de développer de nouveaux produits et de nouvelles saveurs», poursuit-il.

Actuellement, cette brasserie produit 6 000 bouteilles de 75 cl par heure (la traditionnelle 3 Monts caractérisée par son système de fermeture à agrafe), ce qui fait au quotidien entre 50 000 et 60 000 bouteilles. La 3 Monts, qui tire son nom de la géographie locale, est une bière blonde qui existe depuis 1985, et représente 80% des volumes produits sur site. «95% de cette production sont destinés au marché national et la moitié ne quitte pas la région», explique Pierre Marchica, tandis que 5% sont exportés partout dans le monde, aussi bien en Australie qu’à Hong-Kong.

Un chiffre d’affaires de 10 millions d’euros

À la brasserie 3 Monts, première étape de brassage, celle de l’empatâge. Cela consiste à mélanger avec de l’eau chaude les différents malts et céréales qui ont été concassés.

Cette brasserie est présente dans la famille depuis 1920, et son histoire s’est écrite au cœur du village, «ce qui est assez atypique pour ce type d’entreprise», ajoute cet arrière-petit-fils de brasseur. Au total, il a investi près de 6 millions d’euros ces trois dernières années, et la brasserie, qui emploie vingt personnes, a vu sa production annuelle grimper à 70 000 hectolitres pour un chiffre d’affaires de 10 millions d’euros. «Nous restons un petit acteur sur le segment de la bière, mais nous sommes sur le créneau de la qualité et de l’authenticité, ce que le public apprécie de plus en plus», insiste-t-il.

Ce diplômé d’école de commerce ne manque en tout cas pas d’idées pour faire grandir l’entreprise familiale. «Même si c’est un produit qui marche, il faut toujours se mettre à la page», revendique Pierre Marchica, avec dans un coin de la tête également, un musée brassicole à l’étude. Et lorsque vous lui demandez quel est le secret de cette bière qui a traversé les époques, sa réponse est très simple : «Beaucoup d’amour !».

  1. L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. À consommer avec modération.

«Nous sommes sur le créneau de la qualité et de l’authenticité»

Trois questions à André Pecqueur, PDG des brasseries Saint-Omer et Goudale

André Pecqueur.

À peine lancée, la brasserie Goudale à Arques va déjà être agrandie, comment expliquez-vous ce succès ?

Il faut savoir que cette brasserie ultramoderne a été mise en route le 15 août de l’année dernière, et son format avait été conçu pour produire 1 million d’hectolitres d’ici 5, 6 ou 7 ans. Mais le plafond a déjà été atteint, et donc dès décembre nous avons décidé de construire une nouvelle salle à brasser d’1,5 million d’hectolitres qui sera terminée pour août 2018. Comme on est indépendant, et que financièrement on peut se le permettre… Quand le train passe, il faut le prendre car il ne repasse pas deux fois. Surtout, on a la chance d’avoir deux maîtres-brasseurs exceptionnels qui élaborent des bières de qualité. On a embauché une vingtaine de commerciaux sur toute la France et nos produits sont visibles sur à peu près 350 camions qui se baladent dans tout le pays. D’une certaine manière, c’est une campagne d’affichage permanente, et aujourd’hui, quand le consommateur voit Goudale sur une enseigne de café, il rentre plus facilement. Ça nous surprend, mais c’est le cas !

Votre développement est assez exceptionnel…

Chaîne d’automatisation à la brasserie Goudale.

Oui ! Nous sommes le premier brasseur indépendant de très loin, puisque le deuxième en Alsace fait 400 000 hectolitres. Nous faisons 3,3 millions d’hectolitres à Saint-Omer et 1 million à Arques. En 2017, nous avons progressé de 53%. On ne fera pas ça tous les ans, mais avec notre équipe, on y met tout notre cœur. Vous savez, la force de nos brasseries, ce sont nos hommes et nos femmes, et dans des moyennes entreprises comme les nôtres, je crois qu’il est encore possible que les salariés soient très motivés. Ceci dit, j’insiste sur le fait que si aujourd’hui nous sommes beaucoup automatisés, nous travaillons comme dans une brasserie qui produit 50 000 hectolitres : on a conservé la qualité artisanale, car c’est important de ne pas toucher à la qualité des produits qui font notre succès. Par contre, je pense qu’on est encore mieux que lorsque la Goudale était faite à Douai, car nous sommes, en qualité, d’une régularité irréprochable.

Comment vous positionnez-vous par rapport aux autres brasseurs de la région ?

Jenlain, Ch’ti, Trois-Monts… Je crois que chacun a sa place. Nous sommes peut-être leaders de très loin, mais plus on parlera de la bière, mieux ce sera. Le Nord est la région brassicole par excellence. On sent que le consommateur veut retrouver de belles bières. Ici, chez Goudale, on travaille avec huit levures différentes, je pense qu’on est les seuls en France, et on produit une soixantaine de bières. On a toute la gamme pour plaire au consommateur, c’est le petit plus.