"Nous nous devons de continuer l'activité"

La PME familiale, reprise par Geoffrey Thiriez en 2015, accuse un ralentissement de sa production sur certains secteurs, mais connaît une belle croissance sur la production de matelas pour le secteur de la santé. Le dirigeant, malgré une équipe réduite, entend bien poursuivre l'activité économique.

La PME a enregistré une belle croissance de 12% sur janvier et février 2020. Crédit photo L. Mayeux
La PME a enregistré une belle croissance de 12% sur janvier et février 2020. Crédit photo L. Mayeux

Si rien ne le prédestinait à reprendre l’entreprise créée par ses parents en 1991, Geoffrey Thiriez met aujourd’hui son quotidien au service du développement de cette PME d’une centaine de salariés qui fabrique 1 000 matelas par jour pour le B to C et le B to B. Un marché qui avait enregistré une belle progression début 2020, malheureusement frappée de plein fouet par la crise sanitaire. “On a fait un excellent début d’année avec une progression de 12% sur les deux premiers mois de 2020. Le mois de mars s’annonçait très bon également, mais le jour du confinement, cela a été la douche froide“, se rappelle le jeune dirigeant. Depuis, l’équipe administrative est en télétravail, à l’exception de Geoffrey Thiriez et de son directeur administratif et financier. L’équipe de production a été réduite à une trentaine de salariés. Des collaborateurs présents et volontaires, soucieux de maintenir l’activité économique.

Geoffrey Thiriez est arrivé dans l’entreprise familiale en 2011, pour développer le secteur du grand public.

Thiriez literie travaille à la fois pour le marché professionnel (hôtellerie, collectivités, santé… via des revendeurs spécialisés) pour 60% de son activité, mais aussi pour le grand public par un réseau de magasins de meubles et de literie. Complètement à l’arrêt, cette dernière activité reprendra petit à petit, une fois la fin du confinement prononcée. Côté hôtellerie, stand-by également, même si certains établissements profitent pour assurer des travaux et donc se rééquipent en matelas. C’est loin d’être le cas pour le marché professionnel. “Nous avons observé une recrudescence des commandes pour les revendeurs hospitaliers. C’est la même chose pour les collectivités qui ne peuvent pas fermer leurs sites, donc nous leur assurons le service” détaille le dirigeant. De 1 000 matelas produits par jour, la PME wattrelosienne est descendue à 650. Une activité certes ralentie mais, heureusement, pas complètement stoppée : “Notre production est plus faible mais les équipes sont restreintes. Nous préparons aussi la reprise en réalisant du stock ; on avance semaine par semaine. Ma plus grosse crainte ? Que les clients aient du mal à payer les factures. Tant qu’on a du travail et des matières premières, nous devons continuer l’activité car les charges, elles, continuent de courir.” La PME a pris toutes les dispositions nécessaires concernant le report de charges et le décalage de prêts de six mois, histoire de garder de la trésorerie pour assurer la production.

Une autre problématique : l’approvisionnement

Car s’il faut désormais composer avec les salariés en télétravail ou en chômage partiel, l’approvisionnement reste aussi la principale source d’arrêt d’activité pour les entreprises. “Nous avons anticipé en forçant nos achats. Aujourd’hui, 80% de notre parc de fournisseurs est fermé, les commandes sont moins fluides, mais nous faisons preuve d’ingéniosité pour trouver des solutions“, détaille Geoffrey Thiriez. Ainsi, 80% des matières premières sont locales (dans un rayon de 300 km autour de Wattrelos),

L’usine peut produire jusqu’à 1 000 matelas par jour.

provenant notamment de France, d’Allemagne ou de Belgique. Seules des étiquettes RFID provenaient de Chine et ne sont aujourd’hui plus utilisées.

Un projet de développement en stand-by

Actuellement éparpillée sur trois sites – deux sites à Wattrelos distants de quelques mètres et un autre à Ligny-en-Cambrésis –, l’entreprise est en train d’entreprendre un projet d’extension de 9 000 m2 à Wattelos, pour réunir ces trois entités sur 14 000 m2 au total. “Etre dispersés sur ces trois sites est un frein à notre compétitivité et à notre réactivité. Nous voulons emménager en août 2020, mais il faudra faire avec l’avancement des travaux qui ont commencé par un mois de février exécrable et qui sont stoppés aujourd’hui. C’est un projet de deux ans et c’est très frustrant“, regrette le dirigeant, tout en continuant d’espérer un déménagement courant de l’été.

Si le chiffre d’affaires actuel ne génère pas encore de profit, il permet à Thiriez literie de limiter la casse en vue de la reprise. Et de se développer aussi sur de nouveaux marchés, comme celui du leasing de matelas auprès de l’hôtellerie : “Nous nous sommes inspirés sur ce qui peut déjà se faire dans le linge de lit. Le secteur de l’hôtellerie est en crise, notamment avec l’arrivée d’Airbnb et de Booking.com qui rognent sur les marges. Depuis, on observe un morcellement des commandes alors qu’auparavant, on pouvait refaire un hôtel dans son intégralité. Le parc hôtelier français n’est pas très bien équipé en matelas, faute de financements.” Et Geoffrey Thiriez de se projeter aux JO 2024 et à son afflux de touristes, pour lesquels les établissements auront toutes leurs cartes à jouer.

En période normale, l’équipe compte 100 collaborateurs. Crédit photo L. Mayeux

Anticiper l’après-crise

Avec un chiffre d’affaires de 21 M€, la PME revoit fatalement ses ambitions pour 2020 à la baisse, une année qui cumule crise du Covid-19 et déménagement des sites. Mais Geoffrey Thiriez est loin de se laisser impressionner : “La donnée essentielle, c’est de savoir quand on sortira de cette crise. Nous avançons de façon pragmatique, en étant le plus agile possible. Ne pas dépendre uniquement d’un marché est sécurisant. Je connais certains salariés depuis que je suis petit, j’estime qu’il est de mon devoir d’être présent avec eux dans l’entreprise.