Loi AGEC : une opportunité pour les entreprises du secteur de l’économie circulaire
La loi AGEC vise à inciter l’État et les collectivités territoriales à s’engager dans une démarche d’achats responsables. Une part minimale des achats publics doit être issue des filières de l’économie circulaire. Le décret 2021-254 du 9 mars 2021 précise la liste des produits concernés et fixe, pour chacun, les pourcentages requis.
La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (dite loi AGEC) impose à l’État, aux collectivités territoriales et groupements de collectivités territoriales (les établissements publics en sont dispensés) d’augmenter la part de leurs achats issus de l’économie circulaire. Selon l’article 58 du texte : «à compter du 1er janvier 2021, les biens acquis annuellement par les services de l’État, ainsi que par les collectivités territoriales et leurs groupements, sont issus du réemploi ou de la réutilisation ou intègrent des matières recyclées dans des proportions de 20% à 100% selon le type de produit».
C’est l’article L. 541-1-1 du Code de l’environnement qui précise la définition de chacun de ces termes : il qualifie le réemploi comme toute opération «par laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont utilisés de nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus», la réutilisation celle «par laquelle des substances, matières ou produits qui sont devenus des déchets sont utilisés de nouveau», et définit le recyclage comme «toute opération de valorisation par laquelle les déchets, y compris les déchets organiques, sont retraités en substances, matières ou produits aux fins de leur fonction initiale ou à d’autres fins».
Finalement, c’est le décret n° 2021-254 du 9 mars 2021 qui fixe la liste des produits et, pour chacun d'eux, la part minimale des achats publics devant être issue des filières du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage.
Pour les entreprises du secteur, connaître et maîtriser ce texte peut permettre d’augmenter sensiblement leur chance de succès auprès des acheteurs publics. Concrètement, le décret dresse une liste des produits ou de catégories de produits concernés par cette obligation et fixe, pour chacun d’eux, la part minimale des achats publics qui doivent être issus des trois filières de l’économie circulaire. Les produits ou catégories de produits sont identifiés par leur code CPV et figurent en annexe du décret. Sont, par exemple, concernés les livres, le matériel informatique (dont les ordinateurs), les cartouches d’encre, les fournitures et le mobilier de bureau, les voitures, le mobilier urbain ou encore les appareils ménagers.
D’importantes limites
Cet décret, bien qu’innovant et ambitieux par le large spectre des fournitures qu’il touche, souffre toutefois de deux grandes limites que les opérateurs économiques qui œuvrent dans le domaine doivent avoir à l’esprit.
Premièrement, le texte législatif prévoit une limite juridique assez nébuleuse. Il est en effet prévu que l’obligation imposée n’est pas applicable «en cas de contrainte technique significative liée à la nature de la commande publique». Les débats parlementaires relatifs à cette exception ne sont pas éclairants si bien qu’il reviendra, in fine, au juge administratif, de déterminer ce qu’il est possible d’entendre par cette exception.
Ensuite, on comprend mal quelle pourrait être la sanction infligée à un pouvoir adjudicateur qui ne respecterait pas ses obligations, ce qui limite ainsi grandement la force obligatoire du dispositif. En effet, le texte ne prévoit aucune sanction, notamment financière, dans le cas où les seuils ne seraient pas respectés.
Bien sûr, on pense au cas de figure individuel, dans lequel un candidat soumettant une offre résolument tournée vers l’économie circulaire verrait son offre rejetée, alors même que le pouvoir adjudicateur méconnaîtrait ses obligations en la matière. Une telle situation est tout à fait plausible dès lors qu’aux termes de l’article 2 de ce décret, «les proportions minimales fixées par produit ou catégorie de produits acquis sont exprimées en pourcentage du montant total hors taxes de la dépense consacrée à l'achat de chaque produit ou catégorie de produits, au cours de l'année civile». L'obligation à charge du pouvoir adjudicateur s'applique donc annuellement, et non pas par marché de fournitures et vise les dépenses, et non les quantités, de biens acquis. La passation d’un marché ne semble donc pas pouvoir être censurée par le juge administratif pour non-respect de ce dispositif.