Industrie
Les chaussures de sport cherchent la voie durable
Made in France, économie circulaire... Patrimoniaux ou nouveaux venus, des entrepreneurs spécialisés dans les chaussures de sport et loisirs s'efforcent de trouver de nouvelles voies pour rendre plus durables ces produits traditionnellement fabriqués en Asie.
Une
table ronde consacrée à "production
et sourcings responsables dans les marchés du sport et des
loisirs",
s'est tenue le 13 septembre, dans le cadre de la troisième édition
du forum dédié à la "RSE dans
les métiers du cuir, du luxe et de la mode",
à Paris. Elle était organisée par le Conseil national du Cuir,
organisation interprofessionnelle de producteurs et utilisateurs de
cuir. Ce jour-là, quatre spécialistes de la chaussure de sport et
de loisirs, de taille et d'ancienneté très diverses, ont témoigné
de leurs tentatives pour rendre leur démarche plus responsable. Via,
notamment, la clé du MIF, Made
in France,
dans ce secteur où l'essentiel de la production est située en Asie,
et celles de l'éco-conception et de l'économie circulaire.
Le
pari d'Insoft, fondé en 2012, et qui fabrique aujourd'hui près de
10 000 paires de chaussures, consiste précisément à concilier
toutes ces dimensions. Pour Patrick
Mainguené,
son fondateur , « l'innovation
est la clé pour produire un produit différenciant, tout en
associant la mode et l'économie circulaire pour réaliser un produit
attractif et confortable (…). Il faut tirer un trait sur certains
réflexes du design, comme le fait d’associer des matériaux très
différents qui ne permettent pas de le recyclage ».
Ainsi, après une carrière dans le secteur, ce fils de
maître-bottier a conçu une chaussure tricotée à partir d’un fil
issu du recyclage de bouteilles plastiques (Ector).
Dans
le même sens, d'autres entreprises plus anciennes se sont
lancées
dans la recherche de nouveaux matériaux ou modes de production.
Depuis cet été,
TBS,
filiale de l'entreprise historique Eram, produit des tongs fabriquées
à partir... d'algues ! TBS a également gagné un Trophée de
la mode circulaire avec un dispositif, Re-Source
:
il prévoit la récupération de chaussures, recyclables, ensuite
réutilisées pour en fabriquer de nouvelles.
Dans
le même sens, « au
bout de neuf mois, nous envoyons un mail aux clients pour leur
proposer de nous renvoyer les chaussures de running qu'ils ont
achetées, s'ils le souhaitent »,
témoigne Marie-Laure
Piednoir, responsable
du développement durable chez Salomon, entreprise née en 1947 et
pour qui les chaussures d'outdoor (trail, running) représentent 60%
de l'activité. Une fois récupérées par la société, les
chaussures de running sont recyclées en coques de chaussures de ski.
Difficile
Made
in France
Ces
chaussures de Salomon qui font l'objet du dispositif de recyclage,
sont produites en Asie. Mais début 2022, le groupe lancera sur le
marché des produits Made
in France :
avec d'autres entreprises, Salomon a investi dans une usine
automatisée de chaussures de sport, l'Advanced
shoe factory 4.0,
à
Ardoix,
en région Auvergne-Rhône-Alpes. Le projet, initié par le groupe
Chamatex,
spécialiste du textile, vise précisément à relancer une partie de
la production de chaussures d’outdoor en France.
Une préoccupation partagée par de plus en plus d'entreprises du secteur. Chez TBS, déjà, le MIF représente 180 000 paires par an, soit 20% des ventes. « Cela tient à cœur de nos clients. Le MIF est l'une de nos forces », témoigne Pauline Ranger, cheffe de produit chaussure de la marque. Laquelle dispose de deux usines, auxquelles sont associées deux écoles de la chaussure, dans le Maine-et-Loire. Insoft, lui, est implanté à Romans-sur -Isère, berceau de la chaussure.
Il y réalise la totalité de sa production. Quant au groupe familial Royer, fondé en 1945, il importe quelque 20 millions de paires de chaussures, par an ( Ellesse, Converse...) . Mais il s'efforce de favoriser un sourcing proche, en important des produits réalisés au Portugal, en Espagne et en Italie. Et il achète aussi des espadrilles dans le Sud-Ouest de la France. Toutefois, « on ne pourra pas tout fabriquer en France », prévient Mickaël Royer, vice-président du groupe. En cause : la perte de savoir-faire et le manque d'investissement dans les technologies, aujourd'hui plus matures en Asie, lieu d'approvisionnement encore incontournable.
Repère
En 2019, la France a importé 480 millions de paires de chaussures, selon les chiffres du Conseil national du Cuir.