L'engagement : une raison d'être pour Anaïk
On peut être une grande entreprise, réaliser 52 M€ de chiffre d'affaires et engager l'ensemble de ses collaborateurs – et de ses clients – dans une démarche vertueuse. Anaïk, concepteur et fabricant de cadeaux promotionnels pour de grandes marques internationales, se veut investie dans son rôle d'entreprise à mission. Elles ne sont que 26 en France à s'être engagées dans la démarche.
C’est un engagement qui s’amorce bien au-delà de la démarche, initiée par la loi Pacte : «C’est un mouvement qui vient de l’intérieur. Nous devons définir nos actions, émettre un rapport d’évaluation… Les conditions juridiques sont larges, c’est à l’entreprise d’avoir son cadre. Pour Anaïk, notre mission est ‘100% d’émotion et 0% d’impact’», explique Frédéric Delloye, CEO. Il faut dire que dans un secteur où les produits sont majoritairement fabriqués et importés en Asie, la PME de Villeneuve-d’Ascq veut renverser la tendance. Le cadeau promotionnel – 3,8% du budget communication des annonceurs – est indispensable à la fidélisation des consommateurs, tout en restant une variable d’ajustement. Parmi les clients d’Anaïk, essentiellement des grands noms de la cosmétique et de la mode ainsi que des compagnies aériennes, une identité à respecter : «Pour un client, un cadeau promotionnel n’est pas un sous-produit, il représente la marque. Chaque personne qui reçoit un cadeau y est sensible, mais elle veut quelque chose d’utile.» Un gros enjeu de marque donc, avec une maîtrise de l’identité visuelle mais aussi un contrôle qualité renforcé depuis quatre ans via un logiciel dédié pour la traçabilité des filières d’excellence, jusque dans l’usine en Chine, pays où Anaïk est présente depuis 2001. De Villeneuve-d’Ascq à Paris, en passant par Hong Kong, Dubaï, Londres ou encore New York, la présence de l’entreprise de Villeneuve-d’Ascq est internationale avec 52% du CA réalisé à l’export – même si le siège régional compte la majorité des effectifs avec une quarantaine de collaborateurs. En 2020, ce ne sont pas moins de 28 millions de cadeaux qui ont été distribués par les clients d’Anaïk, malgré une baisse de 20% du CA. «Nous cherchons à nous déployer davantage aux Etats-Unis. Nous allons investir massivement car c’est un marché qui a besoin de solutions locales», poursuit Frédéric Delloye. D’ici deux ans, le CEO espère atteindre 60% du CA à l’international.
50% des collections conçues dans une démarche vertueuse
Anaïk doit sans cesse se réinventer : suivre les modes mais aussi les envies des consommateurs, soucieux de recevoir des cadeaux utiles mais différents selon les pays. Là où l’Américaine plébiscitera du gros volume, l’acheteuse européenne préférera de l’utile et de l’esthétique, alors que la cliente asiatique cherchera de belles finitions et du raffinement… Dès la conception du produit, Anaïk veut rendre sa démarche la plus vertueuse possible : utilisation de coton recyclé ou de bioplastique, mise au point d’une filière tracée du recyclage de bouteilles plastique en un tissu polyester 100% recyclé… En 2019 et après deux ans de R&D, les ingénieurs textile ont mis au point une collection en tissu polyester 100% recyclé et recyclable à partir de PET (polyéthylène téréphtalate). Et 3% du CA de cette filière est reversé à l’association Wings of the Ocean, qui dépollue les océans et sensibilise sur les conséquences des déchets plastique en mer. «En 18 mois, nous avons fabriqué près de 500 000 sacs et trousses issus du recyclage de 332 000 bouteilles en plastique», se félicite le CEO, qui mise sur une conception de produit à 0% impact de CO2. Le groupe a ainsi été force de propositions auprès d’enseignes de parfumerie pour proposer d’autres types de trousses. Le chemin est long, et concilier coût et écoconception reste la première contrainte : «Bien sûr que les clients veulent du Made in France, mais si économiquement parlant nous faisons un effort, le client doit le faire aussi», concède, lucide, Frédéric Delloye. Rien qu’en supprimant les emballages, Anaïk a économisé 40 t de plastique et ambitionne même le 0% d’emballages individuels pour 2025. L’entreprise a déjà rendu neutres en carbone plus de 120 000 produits.
Des sacs fabriqués en région
Pour aller plus loin, Anaïk lancera dès la fin de cette année une nouvelle filière de sacs promotionnels, en partenariat avec un tisseur et des confectionneurs régionaux. «Nous sommes en relation avec un atelier de confection de 120 salariés dans les Hauts-de-France, qui fabriquait des masques et se posait des questions sur ‘l’après’.» LVMH aurait déjà montré son intérêt pour la démarche puisqu’historiquement, Anaïk fabriquait déjà des trousses de toilette Hermès dans les Hauts-de-France. Si le marché a été fortement impacté par la crise, plus spécialement aux Etats-Unis et au Moyen-Orient, Anaïk a pu compter sur les retailers et les VADistes régionaux dont le budget est resté stable, sauf bien évidemment pour les marques en souffrance. En plus de son engagement en tant qu’entreprise à mission, Anaïk est en train de se préparer à la labellisation très exigeante B Corp (pour Benefit Corporation) : 200 questions auxquelles doit répondre l’entreprise, autour de cinq domaines (la gouvernance, les collaborateurs, les communautés, l’environnement et les clients). Seules 80 entreprises ont décroché le fameux sésame en France. «Cela pousse les entreprises à ne pas être les meilleures du monde mais les meilleures pour le monde. Nous n’agissons pas uniquement pour la planète mais aussi pour les personnes.» Accélérer la transformation pour être dans l’après, changer la gouvernance pour mieux intégrer les collaborateurs, Anaïk, impulsée par son dirigeant, est résolument entrée dans une nouvelle typologie d’entreprise, au-delà du seul profit économique. Un exemple à suivre…