Le Sénat termine son marathon budgétaire en adoptant un texte remanié

Le Sénat a terminé mardi son marathon budgétaire avec l'adoption du projet de loi de finances pour 2024, remanié après trois semaines de débats qui ont révélé quelques points de convergence avec...

Le Sénat, le 14 novembre 2023 © Geoffroy VAN DER HASSELT
Le Sénat, le 14 novembre 2023 © Geoffroy VAN DER HASSELT

Le Sénat a terminé mardi son marathon budgétaire avec l'adoption du projet de loi de finances pour 2024, remanié après trois semaines de débats qui ont révélé quelques points de convergence avec le gouvernement mais surtout de multiples désaccords.

Dominée par l'opposition de droite, la chambre haute est allée au bout de la discussion du budget de l'Etat, au contraire de l'Assemblée nationale, bridée par l'utilisation de l'article 49.3 de la Constitution.

L'engagement par le gouvernement de sa responsabilité sur ce texte permet au camp présidentiel de ne conserver à l'Assemblée que les mesures qui lui conviennent et de rejeter toutes les autres. Cela complique les chances de voir les dispositions sénatoriales perdurer dans la version finale du budget, attendue le 21 décembre à l'issue de la procédure parlementaire.

Malgré tout, les sénateurs ont voté à 191 voix contre 102 leur version du budget, qui propose des économies face au déficit mais aussi des mesures de soutien, notamment envers les collectivités territoriales, toujours cajolées par la chambre des territoires.

"Le Sénat a proposé sept milliards de vraies économies. Pas des économies au détriment de la croissance ou de la transition écologique. Pas des économies de papier", a promis la sénatrice Les Républicains Christine Lavarde mardi. 

"Si la démocratie ne vit pas avec les apports du Sénat, je pense qu'on sera encore plus fragiles", a ajouté le rapporteur général Jean-François Husson, exhortant le gouvernement à "faire adopter" les propositions sénatoriales malgré le 49.3.

Dépenses rabotées

Parmi les mesures votées au Sénat: l'extension à trois jours du délai de carence dans la fonction publique d'Etat, la suppression de 10.000 postes chez les opérateurs étatiques, la diminution du budget de l'aide publique au développement et une nette restriction des aides aux entreprises employant des apprentis.

Systématiquement, le gouvernement a fait part de son opposition, s'agrippant à sa version du texte qui doit ramener le déficit public à 4,4% du PIB en 2024, contre 4,9% en 2023.

Sur plusieurs dossiers, les deux camps se sont même montrés irréconciliables. Le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave a notamment relevé "un vrai désaccord" sur les mesures de protection des ménages face à l'augmentation du prix de l'électricité. 

Le Sénat a voté pour un ciblage des aides vers les plus précaires grâce à de nouveaux "chèques électricité". Le gouvernement, lui, maintient sa volonté de limiter la hausse des prix pour tous les ménages à 10% maximum en février 2024.

Mêmes divergences sur le recentrage du prêt à taux zéro, rejeté par les sénateurs, tout comme sur l'avantage fiscal réservé aux fédérations sportives internationales dont la Fifa, contesté par la quasi-totalité de l'hémicycle. 

Immigration en toile de fond

En toile de fond, les tenaces débats sur l'immigration, au coeur de l'automne parlementaire, se sont aussi invités dans le budget: la majorité sénatoriale a ainsi diminué d'un tiers le budget de l'Aide médicale d'Etat (AME) pour les étrangers sans papiers...

Rares furent les avancées permises par ces débats quasiment joués d'avance. Un début de compromis a toutefois été trouvé pour la création prochaine d'un fonds territorial climat de 200 millions d'euros destiné aux collectivités territoriales.

Et la Première ministre Elisabeth Borne a fini par concéder une rallonge de 100 millions d'euros aux communes.

A gauche de l'hémicycle, les groupes ont tenté de lutter à la fois contre les propositions gouvernementales et celles de la droite sénatoriale... Avec un résultat mitigé, même si plusieurs mesures de justice fiscale ont été votées grâce au groupe centriste, comme un impôt légèrement relevé pour les très hauts revenus ou encore le durcissement de la fiscalité des locations meublées touristiques de type Airbnb.

"Nos propositions ont été refusées par le gouvernement et la droite main dans la main", a dénoncé le sénateur communiste Pascal Savoldelli, épinglant "des projets qui se confondent" entre exécutif et majorité sénatoriale.

"Nous ne pouvons nous résoudre à accepter que le Parlement ne soit plus qu'une caisse d'enregistrement de décisions prises hors de son sein", a repris le socialiste Thierry Cozic, en référence au 49.3, probablement réactivé dès jeudi à l'Assemblée sur ce budget.

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