Le groupe Ramery se diversifie pour réussir et surmonter la crise du BTP
Difficile parfois de quitter le statut de PME pour celui d’ETI (entreprise de taille intermédiaire). Et pourtant, les ETI, de par leur taille et leurs investissements, semblent celles qui résistent le mieux à la crise. C’est ce qu’a réussi à faire le groupe Ramery en rayonnant en France et (un peu) à l’international. Rencontre avec Philippe Beauchamps, président du directoire depuis 2007.
Avec ses 3 000 salariés sur l’ensemble du territoire – et entre 3 et 500 en Algérie en fonction des chantiers –, l’entreprise d’Erquighem-Lys a réussi à surmonter les difficultés que connaît le secteur du BTP, même s’il a fallu se battre et se diversifier pour maintenir les carnets de commandes. Si le métier d’origine du groupe était «Ramery travaux publics», l’entreprise a joué la carte de la diversification avec Ramery bâtiment (gros œuvre, créé en 1990), Ramery environnement (1999), Coexia (second œuvre, 2007) et Préam immobilier (promotion et aménagement immobilier, 2007). «Entre 2007 et 2014, notre chiffre d’affaires est passé de 270 à 540 millions d’euros. L’an dernier, 30% de notre chiffre s’est fait dans des activités qui n’existaient pas avant 2007», explique Philippe Beauchamps. La crise du bâtiment étant ce qu’elle, Ramery a fait le choix de la diversification, des marchés complémentaires et de l’expansion géographique. Un développement indispensable qui mène aujourd’hui le groupe à être présent sur cinq métiers : les travaux publics, le bâtiment, le second œuvre et lots technique, l’immobilier et l’environnement. Le groupe est arrivé sur cette dernière activité en 1999, avec la filiale Ramery environnement et ses trois entités : Ramery revitalisation, Ramery propreté et Ramery valorisation. Rentable avec un chiffre d’affaires de 66 M€ en 2014, Ramery environnement accompagne ses clients publics et privés dans la valorisation des matières de récupération (revitalisation de sites industriels, propreté, collecte et valorisation des ressources), que ce soit sur le centre de valorisation organique de Sequedin, le centre de valorisation énergétique de Flamoval à Arques ou encore l’unité de “tri valorisation matière et énergie” de Dourges. «Si on s’était planté, on serait dans une situation complexe. Mais si on n’avait pas créé cette filiale, on le serait aussi. Ramery, ce n’est plus que la grue avec le gros œuvre et les travaux publics !» Et il ne se cantonne plus qu’au Nord-Pas-de-Calais : en 2014, 32% du CA de Ramery bâtiment et de Ramery TP se sont faits sur des territoires encore inexploités en 2008. «C’est un fait : le Nord-Pas-de-Calais est en croissance démographique. Dunkerque perd 1 000 habitants par an. Quand une ville perd des habitants, les investissements baissent aussi. Nous avons donc décidé d’aller vers des bassins de vie où l’activité est plus importante. Cela explique l’évolution de Ramery bâtiment, avec notamment, en 2010, l’acquisition de Zanello, une entreprise générale de bâtiment basée en Normandie.» Mais aussi, l’acquisition de Stevenazzi à Creil ou de Snegso à Bordeaux et Bayonne… Ramery détient 100% du capital depuis 2012. «En 2015, plus de la moitié du CA sera réalisé en dehors du Nord-Pas-de-Calais. C’est une vraie révolution dans cette entreprise familiale que moi-même j’ai parfois du mal à suivre», avoue Philippe Beauchamps.
Pas d’euphorie. «Ce n’est pas l’euphorie dans le bâtiment. Oui, le sous-groupe Ramery bâtiment gagne de l’argent, mais de manière assez faible. Le département historique du groupe – les travaux publics – souffre le plus. Nous avons perdu de l’argent en 2013 et on en perdra encore en 2014 à hauteur de 2 millions pour un chiffre d’affaire de 198 M€. Ce ne sont donc pas des pertes abyssales, mais le marché est dégradé. La loi Duflot a cassé les règles de la promotion immobilière. Quand ça changera, on recommencera à faire de la constriction.» Et comme chez l’entreprise est animée d’une volonté de fer, la branche travaux publics a été «revisitée et remise à plat» avec l’arrivée en 2014 d’un nouveau directeur général, Bernard Duhamel. Avec comme priorités : la préservation des emplois − «parfois au détriment de la rentabilité» avoue Philippe Beauchamps − et l’ancrage dans des domaines autres que la voirie : en 2013, Ramery TP acquiert LCH à Rosult, spécialiste des réseaux, et devient ainsi leader grande région sur les travaux de réseaux et d’assainissement. «On se tourne également davantage vers les marchés publics et industriels, car on connaît l’état des marchés publics…»
Multi-expertise. En 2007, le groupe Ramery fait l’acquisition de huit sociétés de second œuvre et lots techniques : c’est la naissance de Coexia. De l’énergie à l’enveloppe du bâtiment ou l’aménagement intérieur, la filiale offre des solutions techniques, tant sur les constructions neuves qu’en rénovation. «Nous sommes leader de la couverture au nord de Paris, avec un chiffre d’affaires de 70 M€», poursuit Philippe Beauchamps. La même année, Préam immobilier a permis d’assurer la continuité des métiers de Ramery : «Nous l’avons créée au début de la crise. Aujourd’hui, la promotion immobilière, c’est à Lille et dans sa première couronne. Nous venons de dépasser le 1 000e contrat de réservation et avons vendu 160 lots en 2014.» Parmi les programmes d’envergure : Humanicité à Capinghem, le quartier des Arts de Lesquin…
Solidité financière. C’est aussi un choix assumé : chez Ramery, on n’ouvre pas le capital − «Ce n’est pas un besoin. Notre force, c’est notre solidité financière due à des chiffres et une volonté très claire de transparence par rapport au monde bancaire.» Le groupe a déjà acquis 65 sociétés depuis sa création : «Toutes les semaines ou presque, on me propose une entreprise à racheter. Ça demande des financements significatifs et il faudrait ouvrir le capital, mais je ne le souhaite pas. Il y aura une croissance externe en 2015, certainement dans le secteur de Ramery environnement», ajoute-t-il. L’histoire initiée par Michel Ramery en 1972 se poursuit…