Entretien avec Xavier Roy, directeur général de France clusters
Le cluster, cet outil coopératif au service du territoire et des entreprises
Si ces derniers mois, le mot cluster a
plutôt désigné des souches importantes de Covid-19, il est aussi
le regroupement d'acteurs économiques et d'écosystèmes
spécialisés, partout en France. Dans les Hauts-de-France, on compte
20 clusters et pôles de compétitivité. Xavier Roy, directeur
général de France clusters, fait le point sur la dynamique.
La Gazette Nord - Pas-de-Calais : Tout d'abord, présentez-nous France clusters.
Xavier Roy : L'association existe depuis 22 ans. Nous animons l'ensemble de la communauté de clusters et de pôles de compétitivité en France, tout en accompagnant les institutions dans le déploiement de politiques publiques. C'est par exemple le cas avec les EPCI (établissement public de coopération intercommunale).
Quel est le rôle d'un cluster ?
On compte près de 300 clusters – dont 54 pôles de compétitivité – en France, répartis sur l'ensemble du territoire, et à 99%, ce sont des structures associatives. Le cluster, comme le pôle de compétitivité, est un outil de développement économique. Il accompagne les entreprises pour innover sur des marchés. Tout cet écosystème représente plus d'1,5 million d'emplois, dont 3 000 ingénieurs projets salariés, et plus de 80 000 entreprises bénéficient de ces savoir-faire.
Le cluster a deux cibles : l'entreprise et les territoires. Avec toujours, la volonté de jouer la coopération.
C'est-à-dire ?
Vis-à-vis des territoires, il s'agit de pérenniser des emplois à travers une dynamique coopérative. Et mettre l'entreprise au cœur du système via des réunions entre entreprises du même secteur d'activité. Mais au-delà du réseau, le cluster associe l'ensemble des autres parties prenantes comme les acteurs du financement, de l'innovation, les laboratoires, les EPCI, etc.
D'autant plus que les entreprises
doivent constamment faire face à la concurrence internationale et
pour cela, elles doivent se structurer...
En France, les entreprises gardent une configuration classique, avec un tissu important de TPE et de PME. Mais comment suivre le mouvement face, en effet, à une internationalisation constante ? La dynamique de cluster leur permet de mieux appréhender ces notions. Avec son agilité, un cluster répond encore plus aux enjeux de la crise.
Tous les secteurs d'activité
sont-ils représentés dans les 300 clusters français ?
Historiquement, on pense plutôt au textile technique, à la mécanique, au numérique ou à la santé. Mais il y a aujourd'hui des clusters en tourisme, secteur qui a dû faire face aux enjeux de la numérisation. Je pense aussi à la e-santé, au plastique, aux produits de la mer... Il y a clairement un virage de clustering des secteurs classiques vers des démarches multisectorielles.
France Clusters vient de sortir une "mapster" – la contraction de "mapping" et de "cluster" – autour du
bien-vieillir. Quel est son but ?
Il y a un vrai enjeu sur les questions de silver économie. Dans les Hauts-de-France, l'INSEE évoque 2 millions de seniors en 2050, soit 172 000 de plus qu'en 2015. Eurasanté, Nutrition-Santé-Longévité et Cluster Senior (Arras), par exemple, ont fait de ce secteur leur cheval de bataille. Le bien-vieillir, c'est plus qu'une filière : c'est un vrai marché dans lequel d'autres acteurs que ceux de la silver économie peuvent agir. Prenez le cas de l'automobile, de l'agroalimentaire, du tourisme...
Cette mapster regroupe 41 clusters
intéressés par le bien-vieillir et recense 120 solutions innovantes
à destination des seniors et des aidants. En un clic, les
professionnels peuvent savoir à qui s'adresser.
Cette cartographie est évolutive ?
Bien évidemment. Notre objectif, c'est
d'avoir plusieurs cartographies de différents secteurs d'activité pour faire sortir les entreprises de leur sillon thématique et aller
vers de nouveaux marchés. Je pense par exemple à la transition
numérique, à la transition écologique ou à l'économie
circulaire.
Et en Hauts-de-France ?
«La
région s'est beaucoup appuyée sur sa vingtaine de clusters dont sept pôles (EuraMaterials, i-Trans, Industrie et Agro-Ressources,
Nutrition-Santé-Longévité, Aquimer, PICOM et Team2,
ndlr), avec une politique tournée vers ces pôles
d'excellence régionale. Les Hauts-de-France se sont bien approprié l'outil au service du développement économique. Il y a une identité
productive moins construite qu'en Occitanie avec l'aéronautique mais
une vraie expertise sur le e-commerce.»