L'industrie agroalimentaire s'inquiète
Pourront-elles faire face aux négociations commerciales en cours ? Les entreprises du secteur de l'agroalimentaire sont fragiles : elles voient leur rentabilité baisser alors qu'elles devraient investir, met en garde l'ANIA, Association nationale des industries alimentaires.
Alors
que les négociations commerciales sont entamées,
c'est un cri d'alerte : les 20 000 entreprises du secteur de
l'agroalimentaire sont dans une situation difficile prévient
l'ANIA, Association nationale des industries alimentaires. Cette
dernière représente
19 037 entreprises, dont 98% de PME pour un chiffre
d'affaires de 212 milliards d'euros.
Le baromètre qu'elle a publié en décembre dernier dresse un panorama inquiétant : la rentabilité des industriels alimentaires se dégrade. 46% d'entre eux s'attend à une baisse de leurs marges. La tendance naît de l'évolution divergente de deux courbes : celle des prix des produits alimentaires qui ont cessé de croître et celle des prix de production qui continuent d'augmenter. En dépit d'un ralentissement, en 2024, les coûts de production sont à la hausse sur tous les postes de dépenses pour 64 % des entreprises de l'agroalimentaire, selon l'ANIA. Sur un an, les prix de l’énergie ont augmenté de 2,4 %, la masse salariale et les transports de 4,3%, les matières premières industrielles de 3,7 %.
À rebours de ces prix de production qui continuent d'augmenter, l'inflation sur les produits alimentaires s'est éteinte en 2024. «Attention : retour de la déflation en GMS [grandes et moyennes surfaces] depuis 5 mois», prévient même l'ANIA. Entre septembre 2022 et 2023, la hausse des prix de l'alimentation avait fortement contribué à nourrir l'onde inflationniste naissante. Et les impacts sur la demande ont été forts, au détriment des entreprises du secteur, rappelle l'étude. Les Français ont acheté moins de produits alimentaires. En 2023, par exemple, le volume d'achats en supermarchés a reculé de 4,5 % de janvier à septembre, contre 2% pour les autres biens de consommation. En outre, les consommateurs se sont concentrés sur des produits moins coûteux, via un recours majeur aux promotions et une fréquentation accrue des enseignes discount.
La
guerre des prix
Aujourd'hui, ces entreprises à la rentabilité en berne doivent faire face à des défis qui requièrent d'importants investissements, selon l'ANIA. À commencer par une nécessaire modernisation d'un appareil industriel qui apparaît vieillissant à l'heure de l'intelligence artificielle et de la robotisation. Un tiers environ des usines ont plus de 25 ans et un quart seulement dispose d'une ligne totalement automatisée ou robotisée.
Autre
défi de taille : la nécessité de réduire de plus de 25% les
émissions de gaz à effet de serre des industries alimentaires à
2030 pour atteindre les objectifs de décarbonation. Dans le contexte
actuel des négociations commerciales avec la grande distribution,
cet état des lieux impose de relancer «le
débat sur les relations des industries et du commerce et la
répartition de la valeur entre producteurs et distributeurs»,
selon l'ANIA . «La
guerre des prix que se livrent inlassablement les distributeurs entre
eux doit cesser cette année. Le juste prix doit être enfin payé
aux entreprises de l’agroalimentaire pour leur permettre de
rémunérer convenablement leur travail, ainsi que celui des
agriculteurs»,
plaide Jean-François
Loiseau, président
de l’ANIA dans un communiqué.
Dans le même sens, le 28 novembre dernier, Pact’Alim, association qui représente des PME et ETI de l’alimentation, redoutant une pression des distributeurs sur les industriels, lançait un appel au respect des lois Egalim. «il est nécessaire de préserver le tissu de PME et ETI agroalimentaires capables de transformer dans les territoires les matières premières agricoles, de la pêche et de l’aquaculture», rappelait l'association. Les négociations commerciales en cours doivent être achevées le 1er mars 2025 pour les produits de grande marque.