L’entreprise et les salariés

Revue de récentes décisions de la Cour de cassation en matière de droit du travail.

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Contrats de travail

La perte du droit à l'indemnité de non-concurrence ne vaut que pour l'avenir et qu'à compter du jour où la violation de l'obligation de non-concurrence a été constatée. (Cass. soc., 18 décembre 2024, pourvoi n° 23-19381)

La prise d’acte de la rupture permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail. Une cour d’appel ne peut pas dire que la prise d’acte de la rupture produit les effets d’une démission, en se référant uniquement à l’ancienneté des manquements, sans rechercher si ceux-ci n’étaient pas suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail. (Cass. soc., 18 décembre 2024, pourvoi n° 23-19664)

Licenciements

Le report de date de convocation à l'entretien préalable au licenciement ayant été décidé, en l’espèce, à la seule initiative de l'employeur, le point de départ du délai d'un mois pour notifier le licenciement à la date prévue pour le premier entretien préalable courait à partir de ce premier entretien, quand bien même celui-ci n'avait pas eu lieu et avait été remis. (Cass. soc., 18 décembre 2024, pourvoi n° 23-18274)

L’employeur doit indiquer dans la liste des postes disponibles pour le reclassement, mise à la disposition des salariés menacés de licenciement économique, les critères de départage arrêtés, afin de pouvoir identifier le salarié retenu, sur des bases objectives, en cas de candidatures multiples pour un même poste. À défaut de cette mention, l’offre est imprécise en ce qu’elle ne fournit pas les éléments d’information de nature à donner aux salariés les outils de réflexion déterminant leur décision. Ce qui caractérise un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement et prive le licenciement de cause réelle et sérieuse. (Cass. soc., 8 janvier 2025, pourvoi n° 22-24724)

Aucune disposition légale ou réglementaire n’autorise le directeur de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire à déléguer son pouvoir de licencier. Dès lors, la lettre de licenciement n’ayant pas été signée par le directeur général de l’établissement, mais par le directeur des ressources humaines, lequel n’avait reçu délégation de signature que postérieurement à la notification du licenciement, celui-ci est privé de cause réelle et sérieuse. (Cass. soc., 8 janvier 2025, pourvoi n° 23-12462)

Santé au travail

L’employeur est tenu de verser au salarié déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l’emploi occupé précédemment, à l’issue des périodes de suspension provoquées par un accident du travail ou une maladie professionnelle, et dont le contrat de travail a été rompu, une indemnité compensatrice d’un montant égal à celui de l’indemnité compensatrice de préavis légale. Le salarié ne peut donc pas prétendre au paiement de l’indemnité conventionnelle de préavis, prévue par la convention collective applicable à l’entreprise. (Cass. soc., 18 décembre 2024, pourvoi n° 23-15897)

Un salarié victime d’un accident du travail qui aide bénévolement un ami durant la suspension de son contrat de travail ne manque pas à son obligation de loyauté envers son employeur. Dès lors, en l’espèce, en l’absence de faute grave, le licenciement prononcé pour ce motif est nul. En effet, l’activité concurrente n’était pas établie, le salarié étant intervenu à titre amical et bénévole et l’employeur ne démontrant pas qu’il aurait perçu une rémunération ; ni le détournement de marchandises appartenant à l’entreprise. Et la récupération, y compris dans l’enceinte de l’entreprise, de bidons abandonnés ne constituait pas une faute grave, pas plus que l’absence du salarié de son domicile, entre 9 heures et 11 heures. (Cass. soc., 27 novembre 2024, pourvoi n° 23-13056)

François TAQUET, avocat,
spécialiste en droit du travail et protection sociale