JUNIA, un campus à la croisée des disciplines

JUNIA, l'institution qui forme depuis 1885 les «futurs dirigeants industriels», mise sur la pluridisciplinarité : les ingénieurs d'aujourd'hui doivent à la fois être scientifiques, techniques, responsables et tournés vers le futur. Partenariats auprès des entreprises, mise en valeur de la recherche, implication dans la société... JUNIA réaffirme son ancrage régional et international.

Amaury Flotat, président de JUNIA et Thierry Occre, directeur général.
Amaury Flotat, président de JUNIA et Thierry Occre, directeur général.

Il y a 10 ans, HEI (Hautes Etudes d'Ingénieur), ISEN (Institut Supérieur de l'Electronique et du Numérique) et ISA (Institut Supérieur d'Agriculture) fusionnaient pour donner naissance à Yncrea puis JUNIA en 2020. Aujourd'hui, ce sont près de 5 000 étudiants – 18% d'internationaux – et 450 salariés dont un peu moins de la moitié d'enseignants chercheurs, qui font de JUNIA la plus grande école d'ingénieurs de France, dans le label EESIG attribué par l'Etat (Etablissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général).

«Nous avons identifié quatre transitions : nourrir durablement la planète, accélérer la transformation énergétique et urbaine, développer la transition numérique et industrielle et renforcer les technologies de la santé et du bien-vivre. Et pour réussir ces transitions, il faut croiser et rendre les disciplines hybrides» explique Thierry Occre, directeur général.

Un nouveau parcours pour «décrypter le monde»

Au programme de ces trois grandes écoles, une quarantaine de spécialisations et sept cycles préparatoires mais surtout, le petit dernier, le «parcours des humanités» : «les jeunes ont besoin de prendre de la hauteur. On va leur proposer de la philo, de l'éthique, de l'histoire des sciences...» abonde Thierry Occre. Un socle davantage orienté vers les sciences humaines donc, qui viendra compléter les programmes scientifiques. Ce n'est pas le seul programme qui évolue : le domaine historique «Systèmes électriques» a été modifié en «Systèmes électriques et renouvelables», pour coller aux évolutions énergétiques et environnementales.

Le Palais Rameau, d'ici 2024. Crédit photo ATELIER 9.81 - Perrot&Richard - Willy Pulse.

Dès la rentrée 2023, de nouvelles formations RNCP (Répertoire National des Certifications Professionnelles) de niveau bac +3 et bac +5 vont aussi ouvrir, sous la banière JUNIA XP, la filiale dédiée à la formation continue et à l'accompagnement de l'innovation avec des diplômes différents de ceux d'ingénieur et notamment sur des métiers comme celui de végétaliseur urbain, de technicien du recyclage...

Un premier bachelor en développement informatique a ouvert en septembre 2022 et d'autres devraient suivre sur les campus de Lille et de Bordeaux. «Il s'agit de former plus rapidement et plus vite. C'est une demande des entreprises et des industries» complète Thierry Occre. À terme, JUNIA vise entre 300 et 400 étudiants sur le campus lillois et une centaine en Nouvelle-Aquitaine.

Démontrer par la pratique et l'expérience

Le Palais Rameau est sans doute celui dont on a déjà le plus entendu parler : pour chaque grand axe de son projet, JUNIA veut mettre en face un démonstrateur. Ces environnements équipés et fonctionnels doivent s'appuyer sur les compétences de chercheurs, de consultants mais aussi d'entreprises, pour rendre la recherche directement applicable.

Et sur le site du Palais Rameau, ce seront 5 000 m2 d'agriculture urbaine à horizon 2023-2024, à la fois sous serre mais aussi en extérieur qui permettront à tout à chacun de venir prendre conscience de l'agriculture et de l'alimentation de demain. 20 M€ d'investissement de la part de JUNIA pour ce tiers lieu qui rassemblera des bacs maraîchers, une halle agroalimentaire, des serres, un toit-potager... : «ce sera un lieu pour les chercheurs, les étudiants et les entreprises. L'idée, c'est de passer de la paillasse à l'échelle 1 dans tous les démonstrateurs que nous avons» poursuit Thierry Occre.

JUNIA compte une dizaine de démonstrateurs en région, à l'image de cultures près de Lorgies, d'une ferme urbaine à Fives Cail, d'agroforesterie à Ramecourt, etc. Chaque année, JUNIA consacre 7 M€ à la recherche sur un budget global de 50 M€.

Susciter davantage de vocations

Néanmoins, JUNIA – comme les autres écoles d'ingénieurs – peine à accueillir les étudiants : «La réforme du bac ne nous a pas aidés. Il y a deux fois moins de bacheliers scientifiques et donc, deux fois moins de candidats» déplore Amaury Flotat, président. Globalement, l'école a observé une baisse de 15% du nombre de candidats. Sur l'ensemble des formations, JUNIA compte 35,7% de filles.

Si de nombreuses écoles se tournent vers l'Asie, JUNIA préfère miser sur l'Afrique avec des partenariats, notamment auprès de l'école BEMTEC (150 étudiants à Dakar) ainsi qu'au Maroc et à Abidjan. «Nous voulons y enseigner localement et transférer des méthodes pédagogiques et un savoir-faire de plus de 100 ans» poursuit Thierry Occre.

Une molécule pour soigner le cancer du poumon ?

Issue de l'équipe Sustainable Chemistry, dirigée par Alina Ghinet, enseignante chercheuse chez JUNIA, la molécule HEI3090 semble prometteuse contre le cancer du poumon : les évaluations pré-cliniques sur la phase animale viennent de se terminer et la phase clinique va commencer à la fin de l'année. Son ambition ? Soigner la fibrose pulmonaire et le cancer broncho-pulmonaire, première cause de décès par cancer.

Cette molécule HEI3090 vise à transformer la mélasse de betterave sucrière en une molécule destinée au traitement contre la fibrose pulmonaire et le cancer du poumon. Elle est donc mieux tolérée parce que naturelle puisqu'elle contient des atomes déjà présents dans l'organisme. «Nous sommes co-porteurs du projet avec le Centre Oscar Lambret» précise Thierry Occre.