Jules : de la fast fashion à l'écoconception

Comme de nombreuses marques textiles, Jules est en train de revoir son modèle : pour s'affranchir de la fast fashion, la marque roubaisienne se lance dans une démarche vertueuse avec l'objectif d'écoconcevoir 50% de sa collection en 2023 et 100% en 2030.

La marque ambitionne de rapprocher la production au plus près de la France.
La marque ambitionne de rapprocher la production au plus près de la France.

Chez Jules, pour parler d'écoconception, on parle d'«in progress». Comprenez un label Jules qui permet de repérer les vêtements qui contiennent des matières écoresponsables : coton issu de l'agriculture biologique, coton et polyester recyclés... Un vrai changement de paradigme quand on sait que la marque produit 15 à 16 millions de pièces chaque année et a vendu 20 millions de vêtements en 2019.

Si la crise Covid a laissé des traces – une perte de 130 M€ de chiffre d'affaires en 2020 –, Jules est aussi en de train de se relever doucement d'une année difficile en 2018 avec le PSE chez Happychic, la fermeture de 80 magasins et la fusion entre Jules et Brice.

«Nous n'avons pas toujours été au rendez-vous au niveau des collections ou de l'accueil en magasin. On essaie de rattraper notre retard. Jules a toujours été au-dessus de l'équilibre, malgré notre pire année en 2018. Même si nous avons perdu entre 90 et 100 M€ de chiffre d'affaires depuis le début de l'année 2021, la reprise a été meilleure que ce que nous avions imaginé. Le consommateur français a envie de se faire plaisir, sur le web et en magasin», se réjouit Franck Poillon, directeur général depuis septembre 2020.

N°2 de la mode masculine

Et surtout, l'ambition de Jules est affichée : prendre la place de son principal concurrent Celio, premier en parts de marché avec environ 1 500 magasins dans 46 pays et très implanté en région parisienne. L'enseigne de prêt-à-porter masculin, placée en juin 2020 en redressement judiciaire, ébranlée par la crise sanitaire, a dû fermer une centaine de magasins sur les 478 que compte la marque dans l'Hexagone.

Une crise qui souligne la difficulté économique du marché de la mode (en baisse de 17% en 2020 selon l'Institut de la mode), déjà en recul depuis plusieurs années.

Pas de course à la promotion

Cap donc sur des collections mieux pensées en amont : une production calculée au plus juste qui a fait économiser à la marque 1,8 million de pièces depuis 2019. «On produit au plus près de nos ventes et il n'y a plus de courses à la promotion. On a arrêté d'acheter des produits neufs pour les soldes. La surabondance de stock n'est plus notre créneau», poursuit le directeur général.

Des ateliers de réparation ont aussi été mis en place dans une douzaine de magasins en France et en Belgique, où le consommateur peut venir faire réparer ses vêtements, même ceux qui ne sont pas issus de chez Jules.

Franck Poillon, directeur général de Jules.

C'est aussi le retour progressif d'une production plus proche de la France : la marque ambitionne de produire 25% de sa collection en Europe et dans le bassin méditerranéen, contre 10% aujourd'hui. Dans la même mouvance, le Fashion Denim Center, à Neuville-en-Ferrain – dont les travaux sont en cours pour une ouverture à la fin de l'année –, devrait permettre la production française de 120 000 pièces de jeans Jules d'ici trois ans (sur les 400 000 que produira l'usine du regroupement FashionCube : Pimkie, Bizzbee, Rouge Gorge Lingerie, Grain de Malice et Orsay).

«L'écoconception, ce n'est pas que les matières ! C'est tout un travail sur la construction du produit : imaginer son début et sa fin de vie.»

Des ouvertures de magasins prévues

Présent dans 15 pays à l'étranger, Jules réalise entre 10 à 12% de son chiffre d'affaires à l'export, avec des ambitions de croissance à l'international, notamment en Afrique de l'Ouest. Si la crise Covid a bouleversé les comportements d'achat, elle n'a pas freiné les ambitions de la marque au niveau de l'ouverture de magasins : entre 50 et 60 nouvelles enseignes sont prévues à horizon 2023, dont 25 à 35 en France, notamment en Ile-de-France, un secteur sur lequel Jules n'a pas toujours été présent et s'est donc fait griller des parts de marché par son principal concurrent, Celio.

Si la marque aux trois millions de clients fidélisés réfléchit activement à mieux adapter son business model, elle n'en est encore qu'aux prémices quant à la production sur demande. «On est sur un berceau textile à Roubaix et il y a de nombreuses initiatives locales auxquelles nous sommes attachés. On va investir sur le grammage, la matière... On a testé la seconde main avec des corners en magasin, mais les résultats sont encore timides. Aujourd'hui nous ne sommes pas encore assez mûrs pour la production sur demande», concède Franck Poillon.

Une étape à la fois, donc, pour la marque qui veut s'affranchir de son étiquette de grande distribution pour revenir à un modèle plus vertueux et adapté aux besoins des consommateurs.