France relance : la filière santé régionale mise à l'honneur avec 36 nouveaux projets labellisés

Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, des Finances et de la Relance, et Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l'Industrie, ont annoncé 36 nouveaux lauréats de l'appel à projets «Résilience» du volet industrie France relance. Parmi eux, trois entreprises régionales de la filière santé : Diagast, Innobiochips et X'Prochem.

La filière santé régionale : la troisième place des pôles nationaux et plus de 1 100 entreprises.
La filière santé régionale : la troisième place des pôles nationaux et plus de 1 100 entreprises.

Ces 36 lauréats totalisent plus de 310 millions d'euros d'investissements industriels, dont 77 millions de soutien de l'Etat. Avec 87 projets lauréats, la santé est le secteur le plus représenté1 à hauteur de 108 millions d'euros pour près de 400 millions d'investissements productifs. Depuis le début de la pandémie la volonté du Gouvernement est claire : relocaliser la production en France pour soutenir l'industrie. Au total, plus de 538 M€ d'aides de l'Etat pour 309 lauréats sur les 948 candidatures reçues et près de 2,1 milliards d'euros d'investissements productifs au total.

Les PME représentent la majorité des lauréats (205 sur les 309 lauréats). Lancé le 31 août, l'appel à projets «(Re)localisation», doté d'une enveloppe initiale de 600 M€ sur trois ans, vise à soutenir les secteurs stratégiques : santé, agroalimentaire, électronique, intrants essentiels de l'industrie – chimie, matériaux, matières premières, etc. – et télécommunications-5G.

Trois lauréats de la filière santé en région

Parmi les PME, Diagast, la filiale de l'EFS (Etablissement français du sang), a été récompensée pour sa relocalisation de dispositifs médicaux ABTest Card® et ABD PAD®, essentiels pour la sécurité transfusionnelle. Le projet à hauteur de 1,7 million d'investissement était déjà dans les tuyaux depuis quelques mois et a été accéléré par l'aide de l'Etat que l'entreprise se garde de divulguer. «Nous allons réindustrialiser la production, auparavant sous-traitée dans une usine d'assemblage hors Union européenne», explique Anne Fovet, responsable communication.

Le nouveau site de Diagast, à Eurasanté, est opérationnel depuis 2019.

Une partie du site industriel de Loos – opérationnel depuis 2019 – sera dédié à la production des dispositifs ABTest Card® et ABD PAD®, deux innovations brevetées : «Cette nouvelle ligne de production va nous permettre de réaliser du thermoscellage de façon industrielle, pour augmenter notre capacité et réduire les coûts. Aujourd'hui, nous faisons face à de nombreuses demandes et la production peut avoir du mal à suivre.»

Car si la technologie de Diagast reste la même, les produits évoluent sans cesse. «L'évolution de la technique de thermoscellage nous permet aussi de réduire de 80% la consommation de plastique.» Même si l'horizon n'est pas immédiat – cette production devrait démarrer dans un laps de temps de deux ans –, huit emplois directs sont prévus, générant 5 000 heures d'activités indirectes.

«Nous allons réindustrialiser la production, auparavant sous-traitée dans une usine d'assemblage hors Union européenne»

La PME régionale, seule entreprise française dans ce secteur de niche, fait face à des mastodontes espagnols et américains. Loin de se laisser impressionner, avec ses 38 M€ de chiffre d'affaires en 2020, Diagast compte bien sur le savoir-faire français pour faire la différence. Dans le monde, 30 tests sont réalisés chaque seconde avec les produits Diagast.

Jusqu'à 25 000 tests haute résolution produits par jour

Même volonté du côté d'Innobiochips, dirigée par Vianney Souplet. La PME d'une quinzaine de salariés a été sollicitée au début de la pandémie par la DGA (Direction générale de l’armement) pour développer un test sérologique haute définition. Covidiag a rapidement été mis sur le marché avec une production de plusieurs centaines de milliers de tests, distribués pour moitié à l'export (Royaume-Uni, Autriche, Belgique).

Vianney Souplet, fondateur et dirigeant d'Innobiochips.

Son innovation est de taille : «Covidiag permet de détecter des anticorps contre au moins cinq constituants du virus, là où les tests sérologiques classiques n’en détectent qu’un seul. Le test évolue constamment. Nous avons ainsi embarqué récemment les variants anglais, sud-africain et brésilien, et bientôt indien, pour encore mieux évaluer l’immunité des patients. En fait, on miniaturise les tests pour obtenir un système d'analyse beaucoup plus performant», explique Vianney Souplet, dirigeant de la société.

L'unité de production, déjà présente à Loos, sera étendue d'ici quelques semaines, pour produire jusqu'à 25 000 tests haute définition par jour. D'un investissement d'1,3 M€ – financé à hauteur de 50% par l'Etat –, ce projet a clairement été accéléré par l'appel à projets «Résilience» : «On aurait probablement enclenché le projet mais pas forcément à court terme.» Et avec un agrandissement des effectifs puisqu'Innobiochips pourrait compter jusqu'à 40 salariés au pic le plus intense de production.

Vers de nouvelles solutions thérapeutiques

Reda Mhidia, cofondateur et dirigeant d'X'Prochem, à Eurasanté, se réjouit du coup de pouce de l'Etat pour sa future plateforme de production, même s'il ne connaît pas, pour l'heure, le montant de la subvention. L'entreprise de sept salariés, créée en 2012, développe des principes actifs pour les biomédicaments, en partenariat avec des laboratoires de recherche, des biotechs et groupes pharmaceutiques.

Reda MHIDIA, CEO d'X'Prochem.

«Nous fabriquons des principes actifs pour les biomédicaments. X'Prochem utilise des robots pour assembler la matière et relier ensemble les atomes. Nos produits seront les médicaments de demain», explique-t-il. Et le marché des biomédicaments est gigantesque : 240 milliards d'euros en 2019 et une prévision de 320 M€ en 2025. «Dans les vaccins contre la Covid-19, vous trouvez des produits issus de la biotechnologie», précise-t-il.

Ultra-précise, la technologie de X'Prochem permet de produire ce que les systèmes biologiques ne peuvent pas faire, et donc de créer de nouvelles molécules pour trouver de nouvelles solutions thérapeutiques innovantes, par exemple pour le cancer.

Pour monter en puissance et répondre à un marché mondial, X'Prochem pourra produire ces principes actifs (en opposition aux principes chimiques) dans une unité de production régionale. Si lieu n'a pas encore été entériné, il est certain qu'il sera en Hauts-de-France, probablement sur le site du CHR de Lille dès cet été, avec, à terme, une vingtaine d'emplois qualifiés d'ici deux ans.

1. Suivent l'agroalimentaire, l'électronique, les intrants essentiels à l'industrie et les télécommunications-5G.