Législation
Des changements comptables majeurs pour les indépendants mosellans en 2023
Modalités de création d’entreprise qui changent, mises à jour des règles de la Cipav, nouvelles TVA… Le 1er janvier entrent en vigueur plusieurs réformes impactant les travailleurs indépendants. Ils sont pas loin de 20 000 en Moselle. Détails.
Le travail indépendant se trouve au cœur de nombreux débats sur l’avenir du travail et de la protection sociale. Ces débats questionnent les situations de travail indépendant en raison du développement des zones grises entre salariat et non-salariat et de la tendance à l’hybridation de ces deux statuts et sont accentués par la crise pandémique. Ils interrogent la pertinence du critère de subordination juridique, qui reste structurant pour distinguer les salariés des travailleurs indépendants. Le brouillage des statuts interroge directement la construction des droits sociaux, qui diffèrent selon le statut occupé. L’amélioration des droits sociaux les moins bien couverts des travailleurs indépendants, notamment ceux à faibles revenus, se pose. Les requalifications de situations d’indépendance en salariat opérées par certaines juridictions règlent une partie des questions, pour ceux qui en bénéficient. Les dispositifs publics tendent à homogénéiser l’espace de travail en cherchant à limiter les coûts sociaux des changements de statuts. L’ouverture récente de droits de chômage aux indépendants - limités cependant - en donne une illustration, de même que les incitations à la responsabilité sociale des opérateurs des plateformes. Le travail indépendant offre ainsi un observatoire privilégié des transformations en cours du travail.
Du changement à la création
Artisans, commerçants et professions libérales. C’est le triumvirat de l’activité indépendante. En Moselle, les femmes et hommes qui détiennent ce statut sont quelque 18 000 : 47 % de professions libérales, 28 % de commerçants et 25 % d’artisans. En février dernier, un statut unique pour les entrepreneurs individuels, protecteur de leur patrimoine personnel, a été créé. Il permet que le patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel devienne par défaut insaisissable par les créanciers professionnels, alors qu'auparavant la résidence principale était protégée. Seuls les éléments nécessaires à l’activité professionnelle de l’entrepreneur pourront à l'avenir être saisis en cas de défaillance professionnelle. La séparation des patrimoines s’effectuera automatiquement, sans démarche administrative ou information des créanciers. Ces Mosellans sont exploitants agricoles, électriciens, coiffeurs, restaurateurs, pharmaciens, avocats, artistes… Le statut de travailleur indépendant recoupe une kyrielle de quotidiens professionnels. Ce 1er janvier 2023, plusieurs textes bougent sous la forme de réformes touchant directement ces indépendants. Premier élément à épouser la voie du changement : la création d’entreprise. Auparavant géré par les CFE (Centres de formalités des entreprises), le processus est désormais centralisé via un guichet unique accessible depuis le site de l’INPI (Institut national de propriété industrielle). Depuis le 1er juillet 2021, ce portail internet dédié à la création d’entreprise devient la voie unique pour créer sa société, quel que soit le statut juridique choisi. Les entreprises individuelles (dont les micro-entreprises), les SASU/SAS et les EURL/SARL sont toutes concernées.
Être en phase avec les urgences environnementales
Seconde modification d’importance, le remplacement de la TVS. Pour renforcer une certaine cohérence avec les enjeux environnementaux actuels, la taxe sur les véhicules de société fait peau neuve en 2023, remplacée par deux taxes annuelles sur les véhicules de tourisme utilisés dans le cadre d’une activité économique (et donc exploités dans le cadre de votre activité professionnelle en tant qu’indépendant). La taxe annuelle sur les émissions de CO2 : elle se base sur un barème linéaire où chaque gramme de CO2 émis au kilomètre est associé à un montant. Trois barèmes sont applicables : le barème WLTP pour les véhicules immatriculés après le 1er mars 2020, la norme NEDC pour les véhicules utilisés depuis janvier 2006, mais dont la première mise en circulation a eu lieu après le 1er juin 2004, la puissance fiscale pour les véhicules qui n’entrent pas dans les deux premières catégories. La taxe annuelle sur l’ancienneté des véhicules : cette seconde taxe est calculée en fonction de la première mise en circulation du véhicule et de sa source d’énergie (essence ou diesel). Il existe de nombreuses exonérations partielles ou totales si votre véhicule est hybride ou 100 % électrique.
De la Cipav à l'Urssaf
Troisième réforme : elle concerne les professionnels libéraux. Ceux affiliés à la Cipav pour le paiement de leurs cotisations sociales professionnelles verront désormais l’Urssaf prendre en charge la collecte de ces cotisations pour la retraite de base, la retraite complémentaire et l’invalidité-décès. À noter : les cotisations de retraite complémentaire et d’invalidité-décès ne sont plus calculées sur une base forfaitaire mais proportionnellement en fonction des revenus. Le barème est en cours de validation. Cette mesure tend à centraliser le paiement des contributions sociales et permet aux professionnels libéraux concernés d’utiliser l’ensemble des services de l’Urssaf. Par ailleurs, les plafonds pour bénéficier du régime de la micro-entreprises seront revus à la hausse en 2023. Les nouveaux seuils proposés dans la loi de finances : de 72 600 € à 77 700 € en prestation de service, de 176 200 € à 188 700 € pour les activités commerciales (achat/vente) et industrielles. Également, comme pour le régime de la micro-entreprise, les seuils de TVA évoluent en 2023. Par conséquent, le texte de loi adopté définitivement sans vote par l’Assemblée nationale le 17 décembre, valide une franchise en base de TVA en 2023 si les seuils suivants ne sont pas dépassés : 36 800 € pour les activités de prestations de services (avec un seuil de tolérance fixé à 39 100 € si le chiffre d’affaires de l’année N-2 était inférieur à ce palier) et 91 900 euros pour les activités commerciales et industrielles (avec un seuil de tolérance fixé à 101 000 € si le chiffre d’affaires de l’année N-2 était inférieur à ce palier).
CFE et CVAE
Parmi les autres mesures entrant dans le champ des indépendants : la Déclaration sociale des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés (DS PAMC), déclaration annuelle dématérialisée qui sert au calcul des cotisations sociales des professionnels médicaux conventionnés par l’assurance maladie, laisse place à la Déclaration sociale et fiscale unifiée (DSFU) intégrée dans la déclaration de revenus 2042. Comme son nom l’indique, cette déclaration permet de centraliser le calcul de toutes les cotisations sociales que vous devez dans le cadre d’une activité médicale ou paramédicale ; la revalorisation des plafonds d’exonération de la Cotisation foncière des entreprises (CFE) pour les entreprises situées dans des zones franches urbaines - territoire d'entreprise (ZFU-TE) ou implantées dans des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV, anciennement ZUS pour zones urbaines sensibles) et la suppression de la Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), qui a déjà vu son taux se réduire de 50 % en 2021, sera encore abaissée de moitié en 2023 pour être complètement supprimée en 2024. Elle concerne les professionnels ayant un chiffre d’affaires supérieur ou égal à 500 000 € hors taxe, peu importe leur régime d’imposition ou statut juridique. On le voit, dans le paysage fiscal des indépendants, les changements sont conséquents.
PLFSS 2023 : ce qui change pour les indépendants
Le projet de loi de financement pour la sécurité sociale (PLFSS), adopté en lecture définitive, a livré plusieurs mesures relatives aux indépendants : correction de la DSN (Déclaration sociale nominative) effectuée désormais par l'Urssaf, modification des indemnités journalières avec le gel des revenus de 2020 dans le calcul des IJ des indépendants les plus touchés par la crise sanitaire (les IJ pour les travailleurs indépendants malades de la Covid-19 sont maintenus à un taux minimal), renforcement de la lutte contre la fraude aux cotisations et prestations, suppression des cotisations vieillesse pour les médecins libéraux en cumul emploi-retraite.