Crise du COVID-19 : la «to do list» des employeurs

Le 30 janvier dernier, l’OMS a qualifié «d’urgence de santé publique de portée internationale» l’épidémie de nouveau coronavirus (Covid-19). Aujourd’hui l’épidémie s’étend sur tout le territoire national et de multiples questions se posent  : comment gérer le coronavirus dans l’entreprise qui poursuit son activité ? L’employeur a-t-il des obligations de prévention ? Comment gérer les absences ou le télétravail des salariés ? etc.

© Mongkolchon
© Mongkolchon

Le Code du travail soumet l’employeur à une obligation de sécurité : en synthèse, cela signifie qu’il doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la santé et la sécurité physique et mentale des travailleurs, par des moyens adaptés et des mesures préventives. Cette obligation est de résultat.

Quelles mesures préventives ?

L’employeur doit informer par tout moyen le personnel des mesures de prévention individuelles et collectives. Il doit notamment :

– rappeler les règles de sécurité : alerter en cas d’apparition des symptômes, limiter les voyages, adopter les gestes « barrière »… Il n’existe pas d’obligation d’afficher les consignes du gouvernement, mais il est conseillé de le faire ;

– privilégier le télétravail quand nécessaire ;

– différer / éviter le plus possible le déplacement des salariés dans des zones à risque (Chine, Italie, ou zones françaises à risque comme le Bas Rhin, l’Oise, etc) ;

– privilégier les visioconférences et éviter les regroupements de personnes ;

– fournir des équipements de protection si nécessaire ;

– consulter le médecin du travail.

Quel rôle pour le CSE ?

Le comité social et économique (CSE) promeut notamment la santé et la sécurité dans l’entreprise. Il peut donc préconiser des mesures de prévention conjointement avec l’employeur.

Quelles mesures adopter pour les salariés en situation à risque (retour des zones à risque, contact avec une personne infectée ou enfants contaminés) ?

L’employeur peut notamment  :

– aménager le poste de travail en limitant les contacts ;

– confiner le salarié à domicile (a minima 14 jours) et privilégier le télétravail ;

– demander au salarié d’appeler le 15 en cas de doute sérieux de contamination.

Comment réagir lorsqu’un cas de coronavirus avéré se déclare dans l’entreprise ?

L’employeur doit notamment :

– informer les salariés et le CSE ;

– nettoyer les locaux en prévoyant des équipements à usage unique pour les agents de nettoyage ;

– imposer le confinement pendant 14 jours, notamment pour les salariés qui ont été en contact avec la personne contaminée ;

– imposer des équipements de protection si cela est nécessaire ;

– contrôler l’état de santé des salariés (un dépistage thermique régulier est possible s’il est prévu dans le règlement intérieur, sans quoi il faut réunir le CSE ou prévoir une note de service), si cela est particulièrement justifié et proportionné.

Quelle indemnisation en cas d’arrêt de travail pour confinement ?

En cas d’arrêt délivré par l’Agence régionale de santé (ARS) pour le salarié ou pour son enfant, le salarié bénéficie des indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS) sans jour de carence, ni condition de durée d’activité dès le premier jour d’arrêt, et perçoit, dans tous les cas, la part complémentaire, conformément au décret n° 2020-227 publié au JO le 9 mars dernier. L’employeur peut demander une enquête.

Comment assurer la poursuite de l’activité de l’entreprise ?

Au delà de la mise en place du télétravail, l’employeur peut notamment :

– Déplacer les congés payés déjà posés par le salarié pour couvrir la quatorzaine ou lui suggérer d’en poser (et non lui imposer) / mobiliser les jours RTT qui sont « à la libre disposition de l’employeur », en respectant le délai de prévenance prévu par accord collectif (pas ceux qui sont à l’initiative du salarié) / reporter les repos compensateurs de remplacement (RCR) si cela est possible dans l’accord et sinon les déplacer (mais pas en imposer la prise) ;

– établir conjointement avec les instances représentatives du personnel et les salariés un plan de continuité de l’activité assurant la prévention des risques pour la santé des travailleurs. Dans ce plan, il faut : identifier les missions nécessaires à l’activité en toutes circonstances, les missions pouvant être interrompues pendant une certaine période, les ressources nécessaires à l’activité, et prévoir une extension des délégations ou un système de suppléance.

De plus, le déplacement de salariés dans une zone à risque n’est pas interdit en cas d’impératif, mais l’employeur devra s’assurer de respecter les 14 jours sanitaires à leur retour. En théorie, le salarié ne peut faire valoir un droit de retrait que s’il est soumis à un danger grave et imminent, ce qui sera probablement assez rarement le cas.

En cas de baisse d’activité due à un grand nombre de salariés malades, confinés ou gardant leurs enfants malades :

– possibilité de bénéficier du chômage partiel (il faut effectuer la demande sur le portail dédié). L’Etat verse une allocation;

– possibilité de recourir au FNE formation pour bénéficier d’actions de formation dont 50 ou 70% est assuré par l’État, si cela entre dans le cadre de l’obligation de maintien d’emploi.

A contrario en cas de hausse d’activité, l’employeur peut envisager pour les salariés présents (notamment, dans le secteur de la santé) de :

– déroger aux durées maximales de travail et repos hebdomadaire (sous conditions et il faut en informer l’Inspection du travail et consulter le CSE) ;

– aménager la durée du travail (modulation, heures supplémentaires…) ;

– recourir aux CDD et intérimaires.

Enfin, l’employeur peut bénéficier si nécessaire d’un étalement des charge sociales et fiscales (report d’échéances Urssaf, non majoration des retards etc).

Amélie BONNIEUL, département droit social (amelie.bonnieul@fidal.com) et Grégory OLCZAK-GODEFERT, avocat associé, directeur régional, département droit social, (gregory.olczak-godefert@fidal.com