Audience solennelle de rentrée à Arras

Véronique Dellelis, vice-présidente du tribunal d’instance d’Arras, et Marc Sauvage, nouveau président du tribunal de grande instance d’Arras.
Véronique Dellelis, vice-présidente du tribunal d’instance d’Arras, et Marc Sauvage, nouveau président du tribunal de grande instance d’Arras.

L’audience solennelle de rentrée du tribunal de grande instance (TGI) est l’occasion de faire le bilan de l’année judiciaire passée et une opportunité pour le président du tribunal et le procureur de la République d’exposer leurs actions et leurs résultats. Double événement pour cette audience du 28 janvier, puisque, au- delà de la tradition, le président du tribunal de grande instance, Marc Sauvage, a été installé dans ses fonctions.

 

D.R.

De nombreuses personnalités représentant les autorités civiles, militaires et religieuses étaient présentes à cette audience solennelle de rentrée exceptionnelle avec l’installation du nouveau président du tribunal de grande instance.

Les interventions se sont déroulées devant un parterre d’officiels, dont Jacques Witkowski, secrétaire général de la préfecture du Pas-de-Calais et sous-préfet d’Arras, Frédéric Leturque, maire d’Arras, les élus, les responsables de la gendarmerie, de la police et des douanes, de nombreux avocats ainsi que les représentants de la société civile.

La situation du tribunal de grande instance satisfaisante. Hugues Weremme, procureur de la République d’Arras, a tracé sans détour la situation du TGI : «Les difficultés de la chaîne pénale, évoquées à plusieurs reprises lors des audiences solennelles de rentrée, peuvent être considérées comme résorbées, cette constatation étant formulée après réalisation de l’audit du parquet réalisé le 13 décembre par le procureur général, lui-même à la tête d’une mission d’inspection composée de quatre magistrats de son parquet général.» Il complète son propos : «Notre bureau d’ordre, plaque stratégique d’enregistrement de tous les dossiers, procédures et correspondances qui arrivent ou quittent le parquet, est à jour. La situation du greffe correctionnel, service qui élabore matériellement les décisions pénales, est assainie et retrouve un rythme de croisière. L’exécution des peines fonctionne dans des conditions satisfaisantes.»

Saisie du produit des infractions. Dans la nouvelle législation, les services de police et de gendarmerie ont la possibilité de saisir le produit des infractions. «Ces dispositions législatives connues sous le nom de loi Warsmann ont fait évoluer le registre de l’enquête pénale qui ne doit plus se concevoir comme disposant de moyens coercitifs seulement pour le besoin de l’administration de la preuve, mais aussi pour l’appréhension des produits illicites, meubles ou immeubles, qu’ils aient été transformés ou non.» La juridiction dispose de moyens légaux pour priver le délinquant de son enrichissement. Un organisme spécialisé dépendant du ministère de la Justice, l’AGRASC (Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués), est chargé de gérer, réaliser et affecter le produit des biens confisqués.

Les enquêtes conduites avec le recours à ces dispositions incluent naturellement les dossiers de la sphère d’action du comité restreint de lutte contre les fraudes. «L’année à venir sera l’occasion de réaffirmer que la confiscation des biens des délinquants devient une conséquence systématique de la déclaration de culpabilité dès lors qu’ils sont le fruit d’une activité criminelle.»

 

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Hugues Weremme, procureur de la République d’Arras, lors de son intervention.

L’exécution des peines. L’action du parquet aura été dominée par l’application de l’exécution des peines. Ainsi, «les nouvelles modalités de transmission et de suivi des décisions emportant la mise à exécution de peines d’emprisonnement par les services de police et de gendarmerie aboutissent à leur traitement dans le délai de deux mois à partir du moment où nous adressons les extraits de jugement». Cette célérité se conjugue avec le plein effet des dernières lois pénitentiaires aux termes desquelles l’aménagement des peines fermes s’impose au juge de l’application des peines en première intention pour les décisions allant jusqu’à deux ans d’emprisonnement. «De manière à assurer l’application la plus efficace possible de la loi, le parquet a mis en place des enquêtes de personnalité confiées au milieu associatif à chaque fois que des réquisitions à de l’emprisonnement ferme apparaissent probables.» Dès l’évocation du dossier à l’audience, la juridiction peut maintenant prononcer une peine aménagée si l’opportunité existe.

Avant sa mise en place, ce dispositif a fait l’objet d’échanges fructueux entre les magistrats du siège et du parquet pour aboutir à une application pratique et réaliste. Dans le même esprit, «les services de police et de gendarmerie ont été sollicités pour renouer avec la rédaction d’une notice de renseignements incluant certaines vérifications des éléments de personnalité». Avec ces éléments, la décision permet une personnalisation de la peine, premier élément de prévention de la récidive. «Le barreau a également été sollicité s’agissant des justificatifs que toute personne poursuivie est invitée à fournir à l’audience.» Ces aménagements de peine sont souhaitables sachant que le taux d’occupation des établissements pénitentiaires est alarmant et que « l’emprisonnement constitue une solution par défaut».

Prévention de la délinquance. Le dernier sujet abordé par le procureur est la prévention de la délinquance, thème de liaison entre 2012 et 2013. La loi de 2007 fait du maire l’acteur principal de la prévention de la délinquance au sein de sa commune. Le procureur souligne «l’engagement des collectivités locales qui investissent des moyens, de l’énergie et mettent en place des actions au sein des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance». Ils ont toute leur place dans l’action menée et leur déclinaison sera confortée par une assise territoriale plus large avec la réforme des intercommunalités (communauté urbaine d’Arras et communauté de communes des vertes collines du Saint-Polois). «Les actions conduites à destination de territoires de plus en plus étendus, y compris en direction des plus jeunes avec le relais actif de l’Education nationale, auront nécessairement un meilleur impact et constituent une note d’espoir.»

Arras, une juridiction très sollicitée. Véronique Dellelis, vice-présidente du tribunal d’instance d’Arras, a présenté la juridiction qui comprend une équipe de dix-huit magistrats du siège, dont deux juges d’instruction, trois juges d’application des peines, deux juges des enfants et quatre juges d’instance. Arras, siège du tribunal d’application des peines pour le Pas-de-Calais, est également le siège de la juridiction départementale de l’expropriation. De plus, un juge préside la commission départementale de la vidéosurveillance, un autre préside la commission départementale de conciliation en matière fiscale. Comme l’exprime Véronique Dellelis, «cette  implication dans diverses  missions départementales n’a rien d’anecdotique car, cumulées, elles contribuent à imposer à la juridiction un rythme de travail  particulièrement cadencé». On peut y ajouter la médiation familiale, particulièrement développée dans la juridiction ; une intense activité du tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) ; et un tribunal paritaire des baux ruraux d’Arras, le plus important de la cour d’appel.

 

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Véronique Dellelis, vice-présidente du tribunal d’instance d’Arras, et Marc Sauvage, nouveau président du tribunal de grande instance d’Arras.

Le nouveau président prend ses marques. Dans son intervention introductive, le président s’est montré très ouvert sur les relations du tribunal avec l’ensemble des corps constitués. Ainsi, il a identifié trois lieux importants où le tribunal est appelé à travailler de concert avec le représentant de l’Etat : le conseil départemental d’accès au droit, la commission d’évaluation des établissements pénitentiaires et le contrôle des hospitalisations sous contrainte. L’équipe du tribunal n’est pas en reste : «Un tribunal, ce n’est pas seulement des magistrats. Ce sont  des greffiers, des fonctionnaires, des agents techniques, du personnel de surveillance, toute une communauté de travail dans laquelle chacun est nécessaire au bon fonctionnement de l’ensemble et doit être reconnu  pour ce qu’il apporte.» Puis il développa son analyse de la justice en faisant référence à une description très concrète du fonctionnement de la justice que le philosophe français Paul Ricoeur a proposée. Vaste discussion que semble apprécier Marc Sauvage, passionné de littérature et de philosophie.