Amiens Métropole mise sur l’industrie créative et culturelle

À l’occasion de l’inauguration du Nauti-poulpe à Bruxelles, Amiens Métropole a annoncé son ambition de créer une filière dédiée à l’industrie créative et culturelle qui doit avoir des retombées économiques.

Alain Gest, Thomas Spitaels, Pierre Matter, Philippe Close et François Schuiten lors de l’inauguration de l’œuvre à Bruxelles. © Aletheia Press/DLP
Alain Gest, Thomas Spitaels, Pierre Matter, Philippe Close et François Schuiten lors de l’inauguration de l’œuvre à Bruxelles. © Aletheia Press/DLP

Ce 29 novembre, une étrange créature a émergé à Bruxelles. Le Nauti-poulpe, sculpture-hommage à Jules Verne, ne reste que quelques semaines dans la capitale belge avant de migrer vers Amiens (voir encadré). L’œuvre d’art imposante annonce la volonté d’Amiens de créer une filière dédiée à l’industrie créative et culturelle : «Depuis quelques années, nous avons observé la montée en puissance de cette industrie. Pour certains d’entre nous, moi compris, il s’agit d’un sujet nouveau», confie Alain Gest, président d’Amiens Métropole.

Conscients de son potentiel économique et de son impact en termes de visibilité et d’attractivité, les élus locaux ont décidé d’investir ce champ d’activité. «Amiens Métropole a fait le choix de se positionner comme le territoire de l'innovation, de la recherche, des arts et de la culture. Il est donc naturel de s’intéresser à ce secteur porteur » analyse Alain Gest. La mise en œuvre d’une feuille de route, effective «dès aujourd’hui», doit intégrer l’écosystème existant tout en attirant des talents, des entreprises et des investisseurs. «Nous imaginons et posons les bases de l’environnement économique de demain», résume-t-il.

Un secteur à haut potentiel

Marc Lhermitte, associé chez EY et Alain Gest, président d’Amiens Métropole. © Aletheia Press/DLP

Pour structurer cette réflexion, Amiens Métropole est accompagnée par le cabinet EY (anciennement Ernst & Young). «La culture, qui joue un rôle essentiel dans notre éducation et l’éveil de nos esprits, est également devenue une économie puissante», observe Marc Lhermitte, associé chez EY et responsable du conseil en compétitivité et attractivité. «L’industrie créative et culturelle regroupe une dizaine de branches et représente 1,3 million d’emplois en France, soit plus que l’automobile», souligne-t-il.

Le consultant estime qu’à l’échelle de la métropole amiénoise, la filière pourrait créer à terme «quelques milliers» d’emplois. Soutenue activement par l’État et les collectivités, la création française est aujourd’hui un modèle envié à l’international. «Celle-ci est unanimement reconnue comme un domaine à fort potentiel. C’est pourquoi elle a été intégrée au Plan France 2030, qui vise à accélérer la transformation des secteurs-clés de notre économie», poursuit Marc Lhermitte. Ce dernier rappelle également que ces activités, par leur dimension événementielle, attirent naturellement l’attention, renforçant ainsi l’attractivité d’un territoire.

Un nouveau quartier pour de nouvelles activités

Cette ambition s’incarne d’ores et déjà à Amiens par la création de la Plateforme des images et de la création (PIC). Ce pôle d’excellence doit réunir Waide Somme, le département de l’ESAD dédié aux images animées, le Fonds régional d’art contemporain (FRAC) et l’association «On a marché sur la bulle», qui porte notamment les Rendez-vous de la bande dessinée. «Cet équipement servira de catalyseur pour ce nouvel écosystème. Ces trois composantes seront connectées avec l’ensemble des acteurs de la filière image, mais aussi avec le monde économique, de la recherche et, plus largement, de l’innovation», explique Alain Gest.

Ce projet s’inscrit aussi pleinement dans le cadre du développement de la ZAC Gare La Vallée. «Dans cette zone résolument futuriste, nous aurons tout le loisir de mixer habitats, activités “classiques” et ces nouveaux acteurs, qui, nous le savons, se structureront progressivement», ajoute le président. Pour ce dernier, le quartier de la gare doit être l'illustration d'une ville tournée délibérément vers l’avenir, avec pour symbole le Nauti-poulpe. «Cette sculpture matérialise cette passerelle entre ce que nous sommes aujourd’hui et les industries de l'imaginaire et de la créativité qui façonneront notre identité future» conclut Alain Gest.

Le Nauti-poulpe, une œuvre monumentale

Le Nauti-poulpe est une création du dessinateur belge François Schuiten et du sculpteur français Pierre Matter. © Aletheia Press/DLP

«Lorsque le projet de dessiner une créature inspirée de l’univers de Jules Verne s’est concrétisé, j’ai immédiatement pensé au sculpteur Pierre Matter, qui a une véritable fascination pour le monde animal», se souvient François Schuiten, auteur de bande dessinée, illustrateur et scénographe belge. L’enjeu pour les deux artistes était de proposer un regard résolument contemporain sur l'univers vernien, sans nostalgie ni approche «trop illustrative». Après quelques «égarements», François Schuiten et Pierre Matter ont imaginé le Nauti-poulpe.

«Nous voulions trouver un objet hybride, mêlant animalité et mécanique, en référence au Kraken de 20 000 lieues sous les mers, mais aussi au Nautilus», détaille-t-il. Initialement prévu pour être installé devant la gare, le Nauti-poulpe prendra finalement place devant la halle Freyssinet, au cœur du quartier Gare La Vallée. «C’est une chance formidable, car nous avons une esplanade très vaste où il était possible de faire surgir le Nauti-poulpe de l’eau», souligne Pierre Matter. Le bronze final mesure 9,5 mètres de long, 7 mètres de large et 5 mètres de haut. La sculpture, qui a nécessité un investissement global de 800 000 euros HT, sera officiellement inaugurée le 24 mars prochain, jour anniversaire de la mort de Jules Verne.

Avant Amiens, le Nauti-poulpe fait escale à Bruxelles

Le Nauti-poulpe a vocation à devenir l’emblème d’Amiens. © Aletheia Press/DLP

En 2021, François Schuiten fait part à Thomas Spitaels, co-fondateur de la galerie Champaka à Bruxelles, de son projet de création du Nauti-Poulpe. «J'ai pensé que ce serait fantastique que cette œuvre puisse faire escale ici», confie l’homme d’affaires belge. Convaincu par le projet, le bourgmestre de Bruxelles, Philippe Close, a proposé d’installer la sculpture face au Palais de Justice, au cœur de la place Poelaert.

«Je pense que l’on rend ainsi un magnifique hommage à Jules Verne, à nos villes aussi, qui sont en perpétuel développement et dans lesquelles l'art a toute sa place», souligne-t-il. Le Nauti-Poulpe restera à Bruxelles jusqu’à la mi-février avant de rejoindre Amiens, où il prendra ses quartiers au cœur du quartier Gare la Vallée. «Le voyage occupe une place centrale au sein des romans de Jules Verne, et nous perpétuons en quelque sorte cet héritage», note Alain Gest, président d’Amiens Métropole. L’élu rappelle que, depuis 2020, la collectivité a lancé un ambitieux programme d'action pour mettre en valeur «la vie de l'un des écrivains les plus connus au monde».