Violences à Bétharram: sous pression de la gauche, Bayrou "récuse" les accusations de mensonge

François Bayrou a "récusé" mercredi les accusations de mensonge portées par la gauche sur sa connaissance des violences et agressions sexuelles dans un établissement catholique qu'ont fréquenté ses...

Le député La France insoumise (LFI) Paul Vannier pose une question au Premier ministre, le 11 février 2025 à l'Assemblée nationale à Paris © Thibaud MORITZ
Le député La France insoumise (LFI) Paul Vannier pose une question au Premier ministre, le 11 février 2025 à l'Assemblée nationale à Paris © Thibaud MORITZ

François Bayrou a "récusé" mercredi les accusations de mensonge portées par la gauche sur sa connaissance des violences et agressions sexuelles dans un établissement catholique qu'ont fréquenté ses enfants, les qualifiant de "polémiques artificielles".

Le parquet de Pau mène l'enquête depuis un an sur plus d’une centaine de plaintes visant des violences physiques, agressions sexuelles et viols qui auraient été commis au collège-lycée Notre-Dame-de-Bétharram entre les années 1970 et 1990.

Le chef du gouvernement, originaire de la région, y a scolarisé plusieurs de ses enfants et son épouse y a enseigné le catéchisme.

La semaine dernière, des témoins interrogés par l'AFP, après une enquête de Mediapart, ont affirmé que le Premier ministre avait connaissance dès la fin des années 1990 d'accusations d'agressions sexuelles. M. Bayrou était ministre de l'Éducation nationale entre 1993 et 1997.

"Je récuse les polémiques artificielles sur ce sujet", a déclaré le Premier ministre devant l'Assemblée nationale. 

"Jamais je n'ai été, à cette époque, averti en quoi que ce soit, (...) des faits qui ont donné lieu à des plaintes ou à des signalements", a redit le chef du gouvernement. Il avait déjà assuré mardi n'avoir "jamais été informé" par le passé de ces agressions.

La réponse n'est "pas à la hauteur de la gravité des faits ni de la souffrance des victimes", a protesté sur X le patron du PS Olivier Faure. "Bayrou démission", a réclamé Mathilde Panot, cheffe des députés de la France insoumise.

François Bayrou avait été interpellé par le député écologiste Arnaud Bonnet, qui lui demandait des "réponses claires" ou sinon de quitter son poste, comme avant lui le député LFI Paul Vannier.

Lumière

"Vous avez menti devant la représentation nationale", a lancé M. Vannier, en citant de nouveaux documents de Mediapart. "Allez-vous (...) en assumer toutes les conséquences et présenter votre démission ?".

Déjà interrogé mardi par M. Vannier, le chef du gouvernement avait exprimé sa "sympathie" pour "les personnes, les hommes ou les garçons, qui ont été en souffrance dans ces affaires-là".

La formulation a suscité l'ire des députés socialistes, qui ont jugé dans un communiqué qu'"en ne prononçant jamais le mot +victimes+", M. Bayrou "a fait preuve d'une légèreté inacceptable", compte tenu de "la gravité de ces faits" qui ont eu lieu pendant près de 60 ans.

"Votre silence indique que l'omerta règne au sommet de l'Etat. Il engage directement le président de la République, seul responsable de votre maintien à Matignon", a complété Paul Vannier. 

Et "il donne aux députés une immense responsabilité au moment de voter ou de ne pas voter votre censure" mercredi sur le budget de la Sécurité sociale, même si la motion, qui n'est pas soutenue par le PS, a peu de chances d'être adoptée. Une autre motion du PS doit être examinée la semaine prochaine.

Collage

Le ministre de la Justice Gérald Darmanin, qui a répondu sous les huées à Paul Vannier, a dit "avoir une pensée pour tous ces enfants (...) victimes et qui méritent, me semble-t-il, mieux que des jeux politiciens", et renvoyé au parquet de Pau, "seul à pouvoir communiquer" sur cette affaire.

Selon le procureur de Pau, interrogé mercredi, les auditions de victimes sont terminées et le parquet doit décider désormais des suites judiciaires à donner.

François Bayrou assure que "lorsque la première plainte est déposée", selon lui "en décembre 1997", il a "quitté déjà le ministère de l'Education nationale depuis des mois", et qu'il n'aurait pas scolarisé ses enfants dans un établissement visé par de "tels soupçons".

En avril 1996, une plainte avait déjà dénoncé les violences physiques d'un surveillant - qui a été condamné - sur un enfant de la classe d'un des fils de M. Bayrou 

Puis en mai 1998, alors que François Bayrou était redevenu député des Pyrénées-Atlantiques et président du Conseil général, un ancien directeur de l'institution avait été mis en examen et écroué pour viol.

Selon Le Monde et La République des Pyrénées, François Bayrou a rencontré en 1998 le juge chargé d'instruire ce dossier. Cet ancien magistrat affirme qu'ils avaient évoqué l'affaire et a dit à Mediapart ne pas comprendre pourquoi l'actuel Premier ministre le "dément aujourd'hui".

Mediapart a aussi dévoilé mardi la lettre d'un ancien élève adressée en mars 2024 à François Bayrou qui raconte des faits d'attouchements subis à la fin des années 1950, restée sans réponse.

Mercredi, l’association Mouvenfants, fondée par Arnaud Gallais, ancien membre de la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise), a collé des messages sur les murs du collège-lycée dénonçant "50 ans de déni" ou "112 plaintes pour des violences", qui ont vite été retirés.

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