Valence à la pointe de la chasse aux fuites d'eau

Casque sur les oreilles, Joris Raynaud balaie le bitume avec un étrange appareil à embout en forme de cloche. Ce "chercheur de fuites" est à l'affût d'un tuyau percé à Valence, une agglomération en...

Renouvellement d'une canalisation d'eau, à Valence (Drôme), le 13 septembre 2023 © OLIVIER CHASSIGNOLE
Renouvellement d'une canalisation d'eau, à Valence (Drôme), le 13 septembre 2023 © OLIVIER CHASSIGNOLE

Casque sur les oreilles, Joris Raynaud balaie le bitume avec un étrange appareil à embout en forme de cloche. Ce "chercheur de fuites" est à l'affût d'un tuyau percé à Valence, une agglomération en pointe dans la traque au gaspillage d'eau.

"Chaque fuite est un cas particulier. Il y en a rarement qui se ressemblent", relève son collègue Alexandre Libat qui, lui aussi, a l'ouïe affinée par l'expérience. Il le faut: le son de l'eau qui s'échappe d'une canalisation est peu distinct pour le néophyte. Ambiance radar de sous-marin.

Dans le centre de pilotage d'"Eau de Valence Romans Agglo", les techniciens traquent ce son à l'aide de 750 appareils acoustiques installés dans le réseau, "la plus forte concentration française en capteurs innovants", selon Maxime Durand, directeur-général de cette régie publique.

Sur les trois énormes écrans accrochés au mur, cartes et schémas s'enchaînent.

La nuit, autour de 02H00, quand le calme règne, les capteurs "écoutent" les tuyaux. En cas de détection d'un bruit anormal, guidés "au mètre près" par la technologie, les techniciens sont immédiatement déployés pour préciser la localisation du tuyau défaillant.

"On intervient en moins de deux heures si c'est visible sur la chaussée, 24 heures maximum si la fuite est enterrée", se félicite Maxime Durand.

En ce milieu de semaine, dans une zone industrielle de Bourg-lès-Valence, c'est le branchement d'une société qui fuit. La pelleteuse a soulevé le macadam, les ouvriers sont à l'œuvre, pelle à la main, pour dégager le tuyau.

"On pressentait qu'il y avait un souci dans le quartier. On sait combien d'eau sort des canalisations. Dès que le débit augmente, on se pose des questions", explique Olivier Baumann, responsable support exploitation.

Les ouvriers finissent par tomber sur une première fuite. "On voit qu'il y a déjà eu une réparation, la pièce a lâché avec les années. C'est pour ça qu'on ne s'embête plus avec les réparations", souligne-t-il: plutôt que de changer une pièce, c'est tout le branchement qui sera renouvelé.

Météo des nappes

La question des fuites est primordiale dans la gestion de l'eau, ressource menacée par le réchauffement climatique. Fin mars, le gouvernement avait présenté un "plan eau" de 180 millions d'euros par an pour résorber "en urgence" les fuites dans les points les plus sensibles du pays.

Valence et son agglomération font figure de bons élèves avec un taux de fuite inférieur à 15%, alors que la moyenne nationale est de 20%. L'objectif est désormais d'atteindre un rendement de 90% du réseau. "C'est un peu plus long et ça se fait sur le long terme", souligne Maxime Durand. 

Au-delà de la chasse aux fuites, la régie communautaire, qui investit entre 6 et 7 millions d'euros par an, déroule un programme de renouvellement de ses canalisations plus rapide que la moyenne.

"On est sur un taux de renouvellement de 1 à 1,2 % par an du réseau, alors que la moyenne nationale est 0,6%", se félicite Lionel Brard, président de la régie et adjoint au maire de Valence, Nicolas Daragon (LR), en charge de la transition écologique.

Là encore, la technologie vient à l'appui des décisions.

"L'idée c'est de faire de la maintenance prédictive, en gros agir avant que ça casse. Réduire le délai de fuite c’est bien, mais l'idéal c'est qu'il n'y ait pas de fuite. Donc il faut changer les canalisations avant", observe M. Brard. 

L'intelligence artificielle aide à cibler les zones où les canalisations sont les plus fragiles. L'ancienneté, le passage fréquent de camions, la présence de chantiers adjacents mais aussi la sécheresse qui cause des mouvements de terrain, sont autant de risques d'usure.

Plus largement, la régie, qui capte l'eau dans la plaine du Vercors avant de la traiter dans son usine, fourmille de projets sur la préservation de la ressource ou la surveillance des nappes phréatiques face au changement climatique.

"Savoir quelle quantité d'eau on a (...) ça nous permet de contrôler l'état des masses d'eau bien en amont du captage, d'anticiper les risques de pollution", souligne Maxime Durand. Et créer à terme "une météo des nappes" à proposer aux usagers.

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