Un restaurateur bisontin contraint AXA à indemniser sa perte d’exploitation Covid
L’assureur a indemnisé le restaurateur à hauteur de 460 000 €. Le jugement est appelé à faire jurisprudence.
À Besançon, dans le Doubs, Cyril Sautrot, un restaurateur dirigeant trois brasseries, a obtenu indemnisation de sa perte d’exploitation consécutive au Covid-19. L’assureur AXA vient de lui verser 460 000 € de provision, soit, pour chacun de ses établissements, respectivement 200 000, 160 000 et 100 000 €. Un chiffrage plus précis sera réalisé par un expert, qui rendra son rapport au plus tard d’ici 4 mois. L’assureur, très implanté dans le milieu de l’hôtellerie restauration, refusait d’indemniser la perte d’exploitation liée à l’épidémie, malgré l’existence d’une assurance spécifique dans son contrat d’assurance multirisque professionnel. Pour ce faire, il se réfugiait derrière une clause d’exclusion : « Sont exclues les pertes d’exploitation, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelle que soit sa nature et son activité, fait l’objet, sur le même territoire départemental que celui de l’établissement assuré, d’une mesure de fermeture, pour une cause identique ».
Une clause non-claire
« Il s’agit d’une clause hallucinante : comment une épidémie pourrait-elle ne concerner qu’un seul établissement dans un département ? », s’emporte l’avocat dijonnais Christophe Ballorin, qui représente Cyril Sautrot, président de la SAS Cafe’in qui exploite une brasserie « Café Leffe » et deux brasseries « Au Bureau » à Besançon et alentours. Le tribunal de commerce bisontin s’est rallié à sa position et a jugé la clause imprécise et devant être réputée non-écrite, le 10 février 2021. « La clause a été jugée non-claire, et devait donc être interprétée en faveur de l’assuré. Le tribunal de commerce de Besançon a, en outre, considéré celle-ci comme non-écrite, car elle aboutissait à priver le contrat de son objet », se félicite le juriste.
Une jurisprudence renforcée
Pour l’assureur, le revers est sévère, d’autant que, dans une autre affaire similaire, une décision de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, du 25 février dernier, confirme pour la première fois en seconde instance l’interprétation suivie à Besançon. Un jugement en appel qui renforce une jurisprudence largement constante. AXA a fait appel de la décision bisontine. « Les décisions sont assorties d’un droit d’exécution provisoire, lequel n’est pas suspendu par l’appel. AXA a donc effectué le versement exigé à mon client », précise l’avocat. L’assureur tente, désormais, d’imposer aux restaurateurs un avenant à leur contrat d’assurance pour exclure définitivement l’indemnisation d’une perte d’exploitation consécutive à cause épidémique.
Pour Aletheia Press, Arnaud Morel