Trump veut ouvrir l'extraction minière sous-marine en eaux internationales, la Chine proteste

Donald Trump a décidé d'ouvrir l'extraction à grande échelle de minerais dans les grands fonds océaniques, y compris en eaux internationales, une initiative vivement dénoncée par la...

Le président américain Donald Trump lors d'une réunion dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, le 24 avril 2025 © SAUL LOEB
Le président américain Donald Trump lors d'une réunion dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, le 24 avril 2025 © SAUL LOEB

Donald Trump a décidé d'ouvrir l'extraction à grande échelle de minerais dans les grands fonds océaniques, y compris en eaux internationales, une initiative vivement dénoncée par la Chine comme enfreignant "le droit international".

Le président américain a signé jeudi un décret en ce sens, qui remet en cause de l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM), théoriquement compétente en haute mer.

Vendredi, Pékin a réagi estimant que ce projet d'extraction dans les eaux internationales "enfreint le droit international".

"L'autorisation par les États-Unis des activités de prospection et d'exploitation des ressources minérales sur leur soi-disant plateau continental extérieur enfreint le droit international et nuit aux intérêts de la communauté internationale dans son ensemble", a déclaré devant la presse Guo Jiakun, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.

Ce passage en force du président américain hérisse en outre des associations de protection de l'environnement, qui alertent sur les dégâts que ferait une telle exploitation sur les écosystèmes marins.

Le texte du décret demande au secrétaire au Commerce, Howard Lutnick, "d'accélérer l'examen" de candidatures "et la délivrance de permis d'exploration et d'extraction" de minéraux "au-delà des juridictions" américaines.

Il saisit également le ministre de l'Intérieur, Doug Burgum, pour en faire de même pour les eaux territoriales.

L'initiative doit permettre de collecter un milliard de tonnes de matériaux en dix ans, a indiqué un haut responsable américain.

L'AIFM a juridiction sur les fonds marins des eaux internationales, en vertu d'accords que les Etats-Unis n'ont, néanmoins, jamais ratifiés.

Contactée par l'AFP, l'AIFM n'a pas donné suite dans l'immédiat.

Le décret enjoint également le secrétaire au Commerce de préparer un rapport sur "la faisabilité d'un mécanisme de partage" du produit des fonds marins.

"En se lançant dans l'extraction minière en eaux internationales, à contrepied du reste du monde, le gouvernement ouvre la voie à d'autres pays pour en faire de même", a réagi Jeff Watters, vice-président de l'ONG Ocean Conservancy, dans un communiqué.

"Et cela aura des conséquences négatives pour nous tous et pour les océans dont nous dépendons", a-t-il prévenu.

Aucune extraction minière commerciale n'a encore eu lieu dans les fonds marins, aux Etats-Unis ou ailleurs.

Certains Etats ont, en revanche, déjà octroyé des permis d'exploration dans leurs zones économiques exclusives, notamment le Japon et les îles Cook.

Créer des emplois

Le gouvernement Trump estime que l'extraction minière en eaux profondes pourrait créer 100.000 emplois et augmenter de 300 milliards de dollars le produit intérieur brut (PIB) des Etats-Unis, sur 10 ans toujours, a indiqué un responsable.

"Nous voulons que les Etats-Unis devancent la Chine dans ce domaine", a expliqué cette source.

L'extraction concerne principalement les nodules polymétalliques, des sortes de galets posés sur les fonds marins, riches en minéraux comme le manganèse, le nickel, le cobalt, le cuivre ou les terres rares.

Ces dernières sont des métaux aux propriétés magnétiques très prisées pour les véhicules électriques, panneaux solaires, mais aussi smartphones et ordinateurs portables.

"Les Etats-Unis font face à un défi économique et de sécurité nationale sans précédent, à savoir la sécurisation de leurs approvisionnements en minéraux critiques sans en passer par des adversaires étrangers", fait valoir le décret.

En 2023, 31 élus au Congrès, tous républicains, avaient adressé une lettre au ministre de la Défense, Lloyd Austin, réclamant que le gouvernement Biden permette l'extraction minière sous-marine.

"Nous ne pouvons pas laisser la Chine s'arroger et exploiter les ressources des fonds marins", avaient-ils écrit. Le gouvernement n'y avait pas répondu publiquement.

Protection à Hawaï

L'entreprise canadienne The Metals Company (TMC) a annoncé en 2025 son intention de contourner l'AIFM en demandant prochainement le feu vert des Etats-Unis pour commencer à exploiter des minerais en haute mer.

Pour son patron, Gerard Barron, le décret "marque le retour du leadership américain" dans le domaine des minéraux sous-marins, a-t-il déclaré dans un réaction transmise à l'AFP.

"TMC se tient prêt à mettre en œuvre le premier projet d'extraction commerciale de nodules polymétalliques au monde", a-t-il ajouté.

"C'est un exemple clair de la priorisation des compagnies minières au détriment du bon sens", a regretté Katie Matthews, de l'association Oceana.

En juillet 2024, le gouverneur démocrate d'Hawaï, Josh Green, a ratifié un texte interdisant l'extraction minière dans les eaux territoriales de cet Etat situé au beau milieu du Pacifique.

De nombreuses organisations de défense de l'environnement s'opposent à la collecte de minéraux, qu'elles accusent de menacer gravement l'écosystème marin.

"Trump est en train d'exposer l'un des écosystèmes les plus fragiles et méconnus à l'exploitation industrielle incontrôlée", a commenté Emily Jeffers, avocate du Centre pour la diversité biologique (CBD), rappelant que plus de 30 pays sont favorables à un moratoire.

"La haute mer nous appartient à tous", a-t-elle ajouté, "et la protéger est un devoir pour l'humanité."

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