Standardisation des produits : des consommateurs disruptifs ?
Les consommateurs sont de plus en plus nombreux à souhaiter des produits moins standard. La tendance, qui s'est développée depuis la pandémie, pourrait profiter aux commerces indépendants.
Existe-t-il un syndrome Ikea, une sorte de lassitude à reconnaître la même table basse, de salon en salon ? C'est ce que semble montrer un sondage consacré à la «standardisation du shopping», présenté le 22 mars, à Paris par Frédéric Michaud, directeur général adjoint d'Opinion Way. Il s'agit de la première édition d'une étude commanditée par Faire, plateforme de mise en relation entre marques et commerces indépendants. La toile de fond que dépeignent les réponses des consommateurs demeure celle de pratiques d'achat bien enracinées, qui ne vont pas dans le sens de la recherche de l'originalité.
En effet, «les grandes chaînes de magasins restent le mode d'achat privilégié par les Français, dans six cas sur 10», explique Frédéric Michaud. C'est particulièrement net pour les secteurs de l'alimentation, de l'hygiène-beauté, du mobilier et de la déco. «Il s'agit d'un modèle historique qui perdure. Toutefois, nous voyons pointer des évolutions», prévient Frédéric Michaud. Plusieurs tendances l'indiquent. Par exemple, les consommateurs recherchent des boutiques indépendantes (sur Internet ou physiques) pour les accessoires de luxe et bijoux.
Autre signe, le commerce de proximité est le deuxième mode préféré après les grandes chaînes, pour les achats de produits alimentaires et d'hygiène beauté. Par ailleurs, toutes les catégories de consommateurs n'ont pas les mêmes goûts. Les plus de 65 ans privilégient le commerce de proximité, les 25 à 34 ans, Internet, et les catégories populaires, les grandes chaînes… Dans ce panorama, «nous voyons monter une tendance qui consiste à rechercher des produits qui reflètent la personnalité de l'acheteur», constate Frédéric Michaud. C'est notamment le cas pour les vêtements : 33% des consommateurs sont à la recherche de ces produits, dans lesquels ils se reconnaissent.
D'autres, en proportion non négligeable, demeurent toutefois indifférents au sujet : 22% d'entre eux veulent avant tout un produit standard, qui fonctionne. Et 26% des consommateurs choisissent tout simplement ce qui leur plaît, sans autre critère particulier, une attitude très prononcée chez les plus de 65 ans. Tendance minoritaire, 8% seulement déclarent choisir en fonction de la mode. Globalement, ces motivations sont les mêmes pour les objets de décoration que pour les vêtements.
Le standard : pratique et ennuyeux
Sur cette base, la pandémie a fait évoluer les attentes en matière de consommation, dans le sens d'un désir de produits moins standard. Par exemple, 49% des consommateurs attachent plus d'importance que précédemment à l'origine du produit qu'ils achètent. Près du quart déclarent accorder moins d'importance qu'avant la crise, au fait qu'il soit à la mode. Quasiment la même proportion d’entre eux (30% environ) se sentent plus concernés par l'originalité du produit, et par l’adéquation de celui-ci à sa propre personnalité qu’auparavant. Chez les jeunes, cette proportion atteint 42%, signe de l'importance de cette thématique au sein de la nouvelle génération.
Autre constat, lorsque les consommateurs sont interrogés sur les leviers et les freins à leur consommation, deux tendances majeures se dégagent : 39% des sondés déclarent préférer les petits commerces, indépendants. Et 31% accordent leur confiance aux marques reconnues ; le fait qu'elles ne le soient pas engendre un réflexe de réticence. «Il y a une vertu très forte accordée au commerce indépendant. Et la marque reste un point de référence», synthétise Frédéric Michaud. Dans ce cadre, les marques indépendantes qui parviennent à se faire connaître ont une carte à jouer.
En effet, les consommateurs considèrent qu'elles sont attractives. En particulier, 86% d'entre eux estiment qu'elles préservent le savoir-faire local. Les attentes des consommateurs vis-à-vis de ces marques se lisent aussi, en creux, dans la manière dont ils considèrent l'offre globale, jugée standardisée. Pour eux, cette dernière permet aux sociétés concernées de s'adresser à un large public (80%), et pour le consommateur, elle constitue une garantie de facilité de choix et de qualité (50%). Mais 26% seulement trouvent que cela permet des prix avantageux.
Au total, «les avantages sont faiblement reconnus à la standardisation des produits(…). En revanche, les inconvénients sont bien pointés du doigt», remarque Frédéric Michaud. D'après les consommateurs, en effet, standardisation rime avec conseils de vendeurs peu personnalisés (74%), moindre effort des marques pour créer une offre originale (65%), et perte d'authenticité (76%).