Six bailleurs sociaux signent une charte contre les offres trop basses

Six grands bailleurs de la région se sont associés pour signer une charte permettant la détection des offres trop basses. Un signal envoyé au marché, autant que l’assurance de coûts maîtrisés.

Lille Métropole Habitat est l'un des six signataires de la charte.
Lille Métropole Habitat est l'un des six signataires de la charte.
D.R.

Lille Métropole habitat est l'un des six signataires de la charte.

Très gros donneurs d’ordre dans la région, six bailleurs sociaux ont décidé de signer ensemble une charte les engageant à détecter les «offres anormalement basses» leur parvenant en réponse à leurs appels d’offres. Une procédure systématique depuis mars, mise au point en réponse à la dégradation de la situation dans le secteur ces dernières années, synonyme d’incertitude pour les promoteurs. «Lille Métropole habitat, c’est 500 réhabilitations et 300 constructions par an. Ces quatre dernières années, nous avons passé 400 marchés chaque année, pour une valeur de 100 à 120 M€, résume Olivier Schubnel, directeur du développement et du patrimoine chez LMH, l’un des signataires de la charte. Quand on est un gros prestataire comme nous, il est primordial de bien acheter. Or, la crise qui frappe le secteur du BTP depuis plusieurs années nous oblige à être plus attentif aux risques, et notamment ceux que font courir les offres anormalement basses.»

Bien qu’attractive, une offre qui sort du lot en étant particulièrement basse par rapport aux autres peut en effet cacher bien des déconvenues. Et en premier lieu, une entreprise en difficulté, avec un fort risque de défaillance en cours de chantier, et donc de retards et de surcoûts. Ou encore, un devis mal ficelé ou mensonger, dissimulant des coûts imprévus qu’il faudra payer au prix fort par la suite. Ou le recours à un matériel ou des services de moindre qualité, qui induiront des frais sur le long terme. Et enfin, un recours abusif aux travailleurs détachés, voire à du travail dissimulé, phénomène auquel les bailleurs sont très attentifs. «De plus en plus d’entreprises sont également tentées d’enlever une ligne hiérarchique, et donc budgétaire,  en ne prévoyant plus de conducteurs dédiés sur un chantier, mais en les partageant entre plusieurs sites, note Olivier Schubnel. Cela induit moins de surveillance, donc des retards et des surcoûts, et plus de vigilance encore de la part du maître d’ouvrage.»

Formule mathématique. Les offres reçues sont donc désormais passées au crible, et au travers d’une formule mise au point par les signataires de la charte. Dans un premier temps, les agents établissent la moyenne de prix de l’ensemble des offres reçues. Sont écartées de la suite du calcul les offres supérieures de 20% à cette moyenne. Une nouvelle moyenne est ensuite calculée, sans les offres les plus élevées. Sont alors considérées comme suspectes les offres inférieures d’au moins 10% à cette nouvelle moyenne. Les entreprises concernées sont alors contactées par les services des bailleurs et doivent justifier de la faiblesse de leur proposition. «Dans la plupart des cas, les explications sont tout à fait recevables, et être classé dans les offres ‘suspectes’ n’est pas éliminatoire a priori. Un entrepreneur peut nous prouver que tout ou partie de son matériel est amorti depuis longtemps, ce qui lui permet de baisser les prix. Ou alors exposer une stratégie assumée, avec une politique de prix pour entrer sur un marché par exemple. Ou alors la proximité d’un chantier avec le siège de l’entreprise, qui élimine le budget transport. Tous les arguments sont recevables, à condition qu’ils soient justifiés», assure Olivier Schubnel. Le bailleur fait ensuite son choix parmi les offres reçues, comme pour n’importe quel appel d’offres.

Gestion du risque. «C’est une politique de gestion du risque, dans un contexte où nous nous engageons dans une démarche de très forte qualité envers nos publics. C’est notre responsabilité morale et financière de nous assurer de la qualité des matériaux et du service, surtout quand les travaux ont lieu dans des logements habités. Il est important par exemple que les ouvriers soient en mesure de répondre aux questions des locataires.» LMH compte 32 000 logements dans la Métropole, gérés par 800 collaborateurs.

Note

L’ensemble des bailleurs signataires : FFB Nord-Pas-de-Calais, Office du bâtiment Nord-Pas-de-Calais, Maison flamande, LMH, Habitat 62/53 Picardie, Logis 62, Maisons & Cités-Soginorpa, Vilogia.