SECMA : le dernier Mohican de l’automobile de loisir

L’entreprise SECMA, basée à Aniche, produit des véhicules de loisir depuis 50 ans désormais, et son fondateur Daniel Renard ne compte pas s’arrêter en si bon chemin.

Daniel Renard a fondé SECMA il y a 50 ans désormais. @Marie Boullenger
Daniel Renard a fondé SECMA il y a 50 ans désormais. @Marie Boullenger

Tout le secteur de l’automobile est occupé par quelques grands groupes qui se partagent presque l’intégralité des marques dans le monde. Tout le secteur ? Non. Car il existe une petite usine dans le Nord, à Aniche, qui résiste encore et toujours face aux géants de la voiture. Ce résistant se nomme SECMA (Société d’Étude et de Construction de Mécanique Automobile) et est dirigé par son créateur Daniel Renard. Ce dernier, âgé de 77 ans, est un irréductible. Il se décrit lui-même comme «un Martien». Un Martien donc, qui a passé toute sa vie avec des moteurs, que ce soit de moto-cross dans sa jeunesse ou de voiture plus ou moins imposante. L’histoire commence en 1974, dans son garage : «Au début, j’avais fait un petit véhicule pour le loger dans un bus anglais qui me servait d’atelier, car je faisais du moto-cross», explique le dirigeant. Ce petit véhicule deux places est l’une de ses premières créations et peut se conduire sans permis.

La suite est une affaire de hasard et de chance, comme le souligne Daniel Renard : «Un journaliste est passé devant mon garage et a vu ce bus et la petite voiture. Il a fait une photo, qui est parue dans le journal un dimanche. Et le lundi matin, en me présentant à mon garage, j’avais le premier client qui voulait acheter cette voiture. Voilà comment l’aventure a commencé», se remémore le chef d'entreprise. Depuis, ce sont 40 000 véhicules qui sont sortis de l’usine de SECMA, majoritairement sans permis dans un premier temps, avant de se concentrer sur les voitures de loisir et les buggys. La clientèle a donc évolué pour se focaliser, d’abord sur des jeunes conducteurs, avec un prix de départ de 19 950 francs, soit environ 4 000 euros actuels, puis sur des passionnés souhaitant «retrouver le plaisir de la conduite qu’on a perdu au volant des voitures modernes. Cela a toujours été mon slogan», ajoute-t-il. Ainsi, le dernier-né des ateliers de SECMA, le F16 Turbo, peut atteindre 250 km/h. Un volant à ne pas mettre entre toutes les mains donc.

De grands noms au volant

Ces amateurs de conduite pure sont donc un peu plus aisés que les premiers clients de la marque qui cherchaient des voitures sans permis. En moyenne, les voitures produites par SECMA coûtent entre 22 000 et 44 000 euros. Un prix qui s’explique, entre autres, par le fait que la totalité du véhicule soit produite à 100 % au sein des ateliers d’Aniche par les 18 employés de la marque en bleu de travail, à l’exception de la boite de vitesse et des moteurs, qui viennent de chez Peugeot et Renault. Le reste des matériaux est réalisé dans l’usine, avec des machines qui, pour certaines, ont vu défiler les décennies sans sourciller. Chez SECMA, il y a peu d’électronique dans l’atelier, comme dans les voitures, car comme le dit Daniel Renard, «ces machines-là ne tombent jamais en panne».

Le F16 Turbo est le dernier né des ateliers SECMA.

Et c’est cela qui attire les clients du monde entier, même si depuis quelques années, l’export ne représente plus que 10 % de la centaine de vente à l’année. Néanmoins, cela n’a pas empêché SECMA de vendre ses automobiles en Angleterre, en Australie, aux Etats-Unis et dans les pays nordiques tels que le Danemark, où l’un des modèles a été utilisé pour une publicité de la marque de ketchup Heinz. Une reconnaissance internationale qui va plus loin que la publicité, puisque la marque a également des clients prestigieux. Nigel Mansell, champion du monde de Formule 1 en 1992, s’est retrouvé plus d’une fois au volant d’une voiture SECMA, tout comme l’ancien président des Etats-Unis Bill Clinton et le Prince Rainier de Monaco. La chanteuse Pink a d’ailleurs acheté deux modèles de buggy.

Ce genre de vente aide à booster le chiffre d’affaires, qui a atteint 2,4 millions d’euros en 2023. Une belle réussite pour l’un des derniers constructeurs automobile indépendant, qui refuse de revoir ses ambitions à la baisse : «Nous souhaitons continuer à nous développer et rester en vie également. Nous avons en permanence de nouveaux projets», conclut le dirigeant.