Procès RN: Le Pen dénonce une "décision politique" mais y croit encore pour 2027
Marine Le Pen a fustigé lundi une "décision politique" et un "jour funeste pour notre démocratie", après sa condamnation à une inéligibilité immédiate pour cinq ans, et réaffirmé ses ambitions pour la présidentielle de 2027...

Marine Le Pen a fustigé lundi une "décision politique" et un "jour funeste pour notre démocratie", après sa condamnation à une inéligibilité immédiate pour cinq ans, et réaffirmé ses ambitions pour la présidentielle de 2027 en demandant une audience en appel rapide.
"Des juges ont mis en place des pratiques que l'on croyait réservées aux régimes autoritaires", a tancé sur le plateau de TF1 la cheffe de file du RN, quelques heures après le coup de tonnerre de la décision du tribunal de Paris dans l'affaire des assistants parlementaires européens.
La peine d'inéligibilité "apparaît nécessaire", a justifié la présidente du tribunal, soulignant la "gravité des faits", "leur nature systématique", "leur durée", le "montant des fonds détournés" mais aussi "la qualité d'élu" des personnes condamnées.
Marine Le Pen, qui a également écopé d'une peine d'emprisonnement de quatre ans dont deux ferme aménagés sous bracelet électronique (elle n'ira pas en prison), a répliqué en dénonçant une "décision politique" et un "état de droit violé".
Elle a confirmé son intention de faire appel, demandant que "la justice se hâte", pour assurer une audience et une décision à temps pour la prochaine présidentielle.
"Je ne vais pas me laisser éliminer ainsi", a affirmé la patronne des députés RN, écartant pour le moment l'idée de passer le témoin à Jordan Bardella. Le président du RN est "un atout formidable (...) j'espère que nous n'aurons pas à user de cet atout plus tôt qu'il n'est nécessaire", a-t-elle répondu.
"Il y a un petit chemin. Il est certes étroit, mais il existe", a-t-elle assuré.
Quant à Jordan Bardella, il a estimé que "c'est la démocratie française qui est exécutée" et appelé à une "mobilisation populaire et pacifique" et lançant une pétition sur le site du parti.
A ce stade la marche vers l'Elysée de l'une des favorites du scrutin -un sondage publié dimanche dans le JDD la créditait de 34 à 37% d'intentions de vote au 1er tour- apparaît très fortement compromise, vu les délais habituels de la justice. Le procès en appel ne devrait pas se tenir, au minimum, avant un an, avec une décision plusieurs semaines plus tard, soit pas avant la fin 2026, à quelques mois de la présidentielle.
Et sans garantie que la cour d'appel rende une décision différente de celle du tribunal.
Bayrou "troublé
Marine Le Pen a reçu plusieurs soutiens à l'étranger, en particulier de l'extrême droite européenne. Le Kremlin a déploré une "violation des normes démocratiques", quand le Premier ministre hongrois Viktor Orban a écrit "Je suis Marine!" sur X.
Devant des journalistes, le président américain, Donald Trump, a comparé la condamnation de Marine Le Pen à ses propres déboires judiciaires. "C'est une très grosse histoire", a-t-il déclaré depuis la Maison Blanche.
"Elle n'a plus le droit d'être candidate pendant cinq ans alors qu'elle faisait la course en tête", a ajouté Donald Trump, lui-même condamné l'an dernier dans l'affaire des paiements cachés à une actrice de films X alors qu'il était en campagne pour sa réélection.
Son allié Elon Musk avait dénoncé auparavant un "abus du système judiciaire", et prédit "un retour de bâton".
L'ex-président brésilien d'extrême-droite Jair Bolsonaro (2019-2022), lui-même condamné à une peine d’inéligibilité au Brésil, a lui dénoncé une "persécution" de Mme Le Pen.
Le Premier ministre François Bayrou (relaxé pour des faits similaires mais en attente d'un second procès) a lui été "troublé" selon son entourage, alors que le patron de LFI, Jean-Luc Mélenchon (visé par une enquête dans un dossier semblable) a estimé que "la décision de destituer un élu devrait revenir au peuple".
En réponse "aux réactions virulentes", le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) français a publié un rare communiqué pour dire son "inquiétude" d'une remise en cause de "l'indépendance de l'autorité judiciaire".
Dans la soirée, le premier président de la cour d'appel de Paris a dénoncé des "menaces" et "des attaques personnelles à l'encontre des trois magistrats" qui ont rendu le jugement du tribunal.
Des menaces "inacceptables dans une démocratie et préoccupantes pour l'indépendance de l'autorité judiciaire", a dénoncé dans la foulée sur X le garde des Sceaux, Gérald Darmanin.
Les autorités surveillent de près et sont attentives à toute menace qui pourrait cibler la présidente de la 11e chambre correctionnelle du tribunal de Paris, selon une source proche du dossier.
Système" d'économies
Le tribunal a "pris en considération, outre le risque de récidive, le trouble majeur à l'ordre public, en l'espèce le fait que soit candidate à l'élection présidentielle une personne déjà condamnée en première instance", a justifié la présidente.
Considérant qu'il y avait bien eu un "système" entre 2004 et 2016 pour faire faire des "économies" au RN en payant avec l'argent du Parlement européen des assistants d'eurodéputés travaillant en réalité pour le parti, le tribunal a condamné 23 autres personnes, ainsi que le FN devenu RN, qui s'est vu infliger deux millions d'euros d'amende, dont un million ferme, et une confiscation d'un million d'euros saisis pendant l'instruction.
Le parti et les autres condamnés devront aussi payer quelques 3,2 millions d'euros au Parlement (le montant total des détournements s'élève à 4,4 millions mais 1,1 ont déjà été remboursés).
Devant Marine Le Pen, 56 ans, assise en veste bleue au premier rang, le tribunal avait rapidement annoncé que les neuf eurodéputés poursuivis étaient coupables de détournement de fonds publics, et les douze assistants coupables de recel.
Marine Le Pen était "au coeur de ce système", encore plus quand elle a pris la suite de Jean-Marie Le Pen à la tête du parti à partir de 2011.
Il n'y a pas eu d'"enrichissement personnel", mais "il y a bien un enrichissement du parti", a martelé la présidente, notant que les salaires octroyés aux assistants parlementaires étaient plus "confortables" que ce que le parti aurait pu se permettre.
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