Prison requise contre un ex-prieur de Riaumont, communauté traditionaliste du Pas-de-Calais

Deux ans de prison, dont un ferme, ont été requis mardi contre un ancien responsable de la communauté catholique traditionaliste de Riaumont, à Liévin (Pas-de-Calais) jugé pour consultation de pédopornographie, le premier procès autour de cet...

L'entrée du village d'enfants de Riaumont, le 7 mars 2025 à Liévin, dans le Pas-de-Calais © FRANCOIS LO PRESTI
L'entrée du village d'enfants de Riaumont, le 7 mars 2025 à Liévin, dans le Pas-de-Calais © FRANCOIS LO PRESTI

Deux ans de prison, dont un ferme, ont été requis mardi contre un ancien responsable de la communauté catholique traditionaliste de Riaumont, à Liévin (Pas-de-Calais) jugé pour consultation de pédopornographie, le premier procès autour de cet ancien "village d'enfants", au coeur de plusieurs enquêtes.

Le jugement a été mis en délibéré au 6 mai.

A l'audience devant le tribunal correctionnel de Béthune, Alain H., l'ancien prieur de 61 ans, vêtu d'une soutane beige recouverte d'un épais manteau bleu marine, a nié une grande partie des faits qui lui sont reprochés, s'étalant de 2012 à 2017.

A la barre, il a assuré que ses recherches sur des sites pornographiques s'inscrivaient dans le cadre d'une "étude anthropologique, sociétale, éducative", pour mieux comprendre la jeunesse d'aujourd'hui.

Alain H. a contesté le fait que la majorité de ces images mettaient en scène des mineurs, jeunes garçons ou adolescents, comme le nombre de fichiers illicites retrouvés sur ses ordinateurs - environ 2.000 selon les enquêteurs.

La procureure a estimé que le prévenu avait la volonté de "manipuler" ses interlocuteurs en faisant croire qu'il y avait une quelconque "dimension scientifique à tout ça". 

Le parquet a requis un an ferme "aménageable", c'est-à-dire sous bracelet électronique, et un an avec sursis, en plus d'une injonction de soins et une interdiction d'exercer une activité en contact habituel avec des mineurs.

premier procès attendu

Ce procès était très attendu car il est le premier à concerner un religieux de Riaumont. 

D'anciens pensionnaires de l'institution, qui affirment avoir été victimes de violences sexuelles ou physiques dans les années 1970 et 1990, ainsi qu'une enseignante qui avait fait un signalement au parquet de Béthune dès la fin des années 1970, ont assisté mardi au procès, tout comme l'actuel prieur de la communauté.

Alain H. est aussi mis en examen dans deux autres affaires: l'une concerne des faits de maltraitance d'enfants pensionnaires de Riaumont, et l'autre un viol au sein de l'institution, une affaire dans laquelle il est poursuivi pour "non dénonciation de crime".

Concernant le volet des violences sur mineurs, le parquet de Béthune a récemment requis la tenue d'un procès contre l'ancien prieur et cinq autres religieux de Riaumont.

Ces cas de maltraitance, des "violences sans incapacité" selon une avocate de la défense, se sont étalés de 2007 à 2019, les périodes variant d'un mis en cause à l'autre. Il s'agit de "gifles, coups, punitions dégradantes" envers "plusieurs dizaines" d'enfants au total, a précisé à l'AFP le procureur de Béthune, Etienne Thieffry.

Deux autres encadrants de Riaumont sont mis en examen pour agressions sexuelles. Une information judiciaire sur ce volet est en cours, comme pour l'affaire de viol, dans laquelle l'auteur présumé était mineur.

- prescription - 

Selon des témoins et anciens pensionnaires interrogés par l'AFP, d'autres faits graves se sont produits derrière les murs d'inspiration médiévale de Riaumont, qui se présente sur son site comme une "citadelle de l'espérance". Mais ces faits sont désormais prescrits.

"En France, on est spécialiste du +Grâce à Dieu les faits sont prescrits+", dénonce Arnaud Gallais, président de Mouv'Enfants, association de défense des droits de l'enfant.

M. Gallais réclame la dissolution de Riaumont et une loi pour allonger "à au moins 30 ans" le délai de prescription pour non dénonciation de crimes et agressions sexuelles sur mineurs.

Juchée sur une vaste colline boisée près de Lens, Riaumont a démarré dans les années 1960 comme foyer d'accueil pour enfants placés par les services sociaux, aux côtés d'enfants envoyés par des familles traditionalistes. 

Les premiers étaient des "esclaves" tandis que les seconds étaient "bien vus" par l'encadrement, affirme Charline Delporte, présidente de l'association Centre national d'accompagnement familial face à l'emprise sectaire (Caffes), qui suit Riaumont depuis 30 ans.

Après de premières remontées de sévices, Riaumont a perdu en 1982 son agrément pour enfants placés. La communauté a ensuite lancé une école privée hors contrat, qui n'a fermé qu'en 2019 sur décision administrative, après la révélation des mises en examen.

La préfecture a aussi interdit à la communauté d'accueillir des séjours de scouts cette année.

Interrogé vendredi dernier par l'AFP, le père Christophe Gapais, 61 ans, le nouveau prieur de la communauté, assure qu'il n'y avait pas de "violence institutionnalisée" à Riaumont.

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