Présidence LR: Wauquiez et Retailleau à droite toute

Laurent Wauquiez veut envoyer les étrangers sous OQTF à Saint-Pierre-et-Miquelon, Bruno Retailleau attaque les "juges rouges" : à plus d'un mois du congrès qui désignera le nouveau président des Républicains, la campagne des deux candidats vire...

Laurent Wauquiez, président du groupe parlementaire de la Droite Républicaine et candidat à la présidence du parti Les Républicains, lors d'un meeting à Oullins Pierre-Bénite, le 28 mars 2025 dans le Rhône © JEFF PACHOUD
Laurent Wauquiez, président du groupe parlementaire de la Droite Républicaine et candidat à la présidence du parti Les Républicains, lors d'un meeting à Oullins Pierre-Bénite, le 28 mars 2025 dans le Rhône © JEFF PACHOUD

Laurent Wauquiez veut envoyer les étrangers sous OQTF à Saint-Pierre-et-Miquelon, Bruno Retailleau attaque les "juges rouges" : à plus d'un mois du congrès qui désignera le nouveau président des Républicains, la campagne des deux candidats vire très à droite pour séduire les militants.

Provocation, surenchère, voire une "tentative désespérée" de se relancer face à des sondages défavorables comme l'insinue un soutien de son rival ? 

L'idée controversée de Laurent Wauquiez de miser sur le climat "dissuasif" de Saint-Pierre-et-Miquelon pour convaincre les étrangers frappés d'une obligation de quitter le territoire (OQTF) de rentrer dans leur pays consterne le politologue Jean-Yves Camus.

"C'est à côté de la plaque. Une façon de ne pas traiter sérieusement le problème", affirme-t-il à l'AFP, déplorant que "40 ans après, la droite n'ait toujours pas compris comment on combattait le Rassemblement national". 

On y parvient "en ayant une approche de fond, une panoplie de mesures qui tiennent la route et non pas en lâchant une petite phrase qui ne trompe absolument personne, car on sait bien que ça ne se fera pas", regrette-t-il.

Ce virage à droite d'une campagne où le patron des députés LR revendiquait jusqu'alors l'héritage de Jacques Chirac en allant à la rencontre des militants, sème doute ou désarroi, parfois auprès de certains de ses soutiens.

Il a en tout cas provoqué la colère du groupe indépendant Liot à l'Assemblée nationale, dans lequel siège notamment le député Saint-Pierrais Stéphane Lenormand, qui a réclamé "des excuses sincères aux habitants" de la collectivité ultramarine.

"Vu les réactions, l'idée est mauvaise, le buzz aussi", regrette un cadre du parti qui aurait préféré que son candidat profite de la campagne "pour se démarquer du RN en défendant une droite moderne et non celle beaucoup plus rance".

Le "petit manuel" de Ciotti

Une opinion que ne partage pas un conseiller de l'Union de la droite républicaine (UDR), le parti fondé par Eric Ciotti qui avait lui-même conquis en 2021 la présidence de LR face à Bruno Retailleau, avant de s'allier au RN l'été dernier lors des législatives. 

A l'en croire, Laurent Wauquiez aurait puisé son idée dans ce qu'il présente comme le "petit manuel pour gagner les élections internes", en d'autres termes la campagne victorieuse du député des Alpes-Maritimes qui avait proposé dans la dernière ligne droite la création "d'un Guantanamo à la française".   

"C'est habile, car si Bruno Retailleau réagit de manière trop modérée il va déplaire aux adhérents et s'il va plus loin il se mettra en porte-à-faux avec le gouvernement", souligne cette source, justifiant ainsi le refus du ministre de l'Intérieur de commenter les propos de son rival.

"La base de LR est plus radicale que la tête", explique un soutien du député de Haute-Loire, rappelant que l'élection du président les 17 et 18 mai est limitée aux adhérents.

Pas de quoi convaincre Jean-Yves Camus pour autant: "Quand on lance une mesure qui ne se fait pas, on ajoute du carburant au moteur de Marine Le Pen qui passe son temps à attaquer Les Républicains en disant qu'ils promettent la lune en période électorale" et ne tiennent pas leurs promesses une fois au pouvoir. 

Pour le spécialiste de communication politique Philippe Moreau-Chevrolet, Laurent Wauquiez espère "capter l'attention sur soi, être un marqueur d'extrême droite, de droite dure", tout en soulignant que son rival vendéen "s'est d'ailleurs positionné bien avant lui" sur ce terrain-là.

Le ministre de l'Intérieur, qui a le vent en poupe dans les sondages, a également multiplié les déclarations polémiques ces dernières semaines.

Dans les jours qui ont suivi la condamnation à 5 ans d'inéligibilité de Marine Le Pen, il s'en est pris au Syndicat de la magistrature, classé à gauche, évoquant des "juges rouges".  

"Vive le sport, et donc à bas le voile", a-t-il également déclaré fin mars lors d'un rassemblement intitulé "Pour la République, la France contre l'islamisme".

La justice ayant peut-être mis hors course Marine Le Pen pour la présidentielle, "il y a une course (pour) conquérir la légitimité à droite, faire l'union des droites derrière soi et espérer l'emporter en 2027", analyse Philippe Moreau-Chevrolet.

Le soutien du ministre de l'Intérieur dément toutefois un virage : "Il dit ce qu'il a toujours dit. Il est bien à droite, une droite assumée qui n'est pas honteuse".

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