L’usine aspire à un futur extraordinaire
2019, l’année de l’industrie ? Après des décennies à valoriser une économie des services, c’est l’industrie qui est aujourd’hui promue au rang de modèle désirable. En novembre dernier, à Paris, l’événement «L’Usine Extraordinaire» invitait le grand public à découvrir les coulisses d’un monde qui a bien changé.
«Ça lui fait mal ?», s’inquiète une jeune fille brune en voyant le bras de Rosa s’approcher du crâne du patient. Rosa est un robot hyper-sophistiqué destiné à assister les chirurgiens du cerveau, et c’est une classe de première, une vingtaine d’ados attentifs, venus de Gennevilliers, qui assiste à la démonstration (réalisée avec un mannequin). Bienvenue à «L’Usine Extraordinaire, l’événement pour changer d’idée sur l’usine !», manifestation destinée à montrer les réalités de l’industrie du XXIe siècle et à séduire les jeunes générations. L’événement se tenait sous les verrières du Grand Palais, à Paris. Tout un symbole, le bâtiment ayant expressément été construit pour abriter l’Exposition Universelle de 1900, vitrine technologique et industrielle des nations… Ouvert gratuitement au grand public, l’Usine Extraordinaire s’adresse particulièrement aux plus jeunes, ceux qui doivent encore décider de leur avenir professionnel. Le 22 et 23 novembre 2018, quelque 10 000 élèves – classes de 4e, 3e, lycées généraux… – étaient au rendez-vous, d’après les organisateurs de l’événement. Ces derniers avaient mis les moyens pour séduire leurs recrues potentielles, qui ont découvert des animations très diverses, sur les 77 000 m2 de l’espace d’exposition. Par exemple, sur le stand de l’entreprise Sew-Usocome, les visiteurs étaient invités à chausser des lunettes 3D pour s’immerger dans l’une des usines de l’entreprise classée «Usine du Futur.» L’établissement, hyper-automatisé, assemble et produit des robots, à partir de 55 000 composants. Un peu plus loin, c’est Michelin qui conviait à découvrir ses usines, loin de l’image de l’industrie du XIXe siècle.
Retisser des liens
En explorant différents thèmes, comme l’environnement – avec des illustrations d’économie circulaire – mais aussi le bien-être et la communauté au travail, les industriels se sont présentés aux jeunes sous un jour séduisant. L’initiative était menée par la Fondation Usine Extraordinaire. Celle-ci a été créée par des filières et des industriels français, précisément dans l’objectif de «retisser des liens entre l’usine et la société». De nombreux mécènes la soutiennent, parmi lesquels la fondation d’entreprise Michelin, EDF, l’UIMM, l’Union des industries et métiers de la métallurgie, ainsi que des institutionnels comme le Conseil de l’industrie (dépendant de Bercy), et également Bpifrance, la banque publique d’investissement. Ces industriels ont fort à faire pour redorer leur image : depuis plusieurs décennies, la France se désindustrialise. Et si les causes de ce phénomène sont multiples, les experts s’accordent, en général, à constater un manque d’appétence pour ces métiers, dans une société qui valorise surtout les services. Mais le vent est peut-être en train de tourner : les organisateurs de «l’Usine Extraordinaire» rappellent que les exportations de biens industriels français ont pesé pour 473 milliards d’euros en 2017, en hausse de 4,5 % par rapport à l’année précédente (d’après les douanes). Par ailleurs, des emplois sont à pourvoir : 50 000 postes, chaque année, dans les industries mécaniques jusqu’en 2025. Et 47 % des lycéens en série S ou technologique souhaitent travailler dans l’industrie, d’après un sondage OpinionWay pour les arts et métiers, de 2018.