«L’idée, c’est de maintenir le lien et l’unité de notre profession»

Les offices notariaux sont eux aussi impactés par la crise sanitaire et le confinement. Comment la profession s’est-elle organisée pour faire face à cette situation inédite ? Le point avec Me Daniel Gallet, président de la chambre interdépartementale des notaires du Nord - Pas-de-Calais.

"Nous sommes très à l’écoute de nos confrères et de leurs difficultés" souligne Daniel Gallet.
"Nous sommes très à l’écoute de nos confrères et de leurs difficultés" souligne Daniel Gallet.

La Gazette : Comment la profession a-t-elle réagi à l’annonce du confinement ?
Daniel Gallet : Lorsque le confinement a été décrété par le Gouvernement, la Chambre interdépartementale a immédiatement demandé aux notaires de ne plus accueillir de public dans leurs offices. C’était important de participer activement et de façon exemplaire à la lutte contre la propagation du virus. Le recours au télétravail a d’abord été la solution privilégiée lorsque c’était possible, pour les clercs rédacteurs par exemple. Sur la base du volontariat, certains collaborateurs ont pu continuer à travailler à l’étude, dans le respect évident des gestes barrières et de la distanciation sociale. Comme beaucoup d’entreprises, certains offices ont rapidement été contraints de devoir opter pour le chômage partiel. Nous avons évidemment assuré dès le début la continuité du service public avec une notion de service minimum.

Par quels biais ?
Le notaire se doit d’être disponible et accessible pour ses clients, par les moyens dématérialisés – mail, téléphone et visioconférence – pour le suivi de dossiers en cours, sur les conséquences des ordonnances dans le cadre de l’urgence sanitaire, la régularisation des actes – par comparution à distance ou par procuration –,  pour tous types de conseils… Cela fait partie de nos obligations et permet de garder le contact. De son côté, la Chambre continue de se réunir, essentiellement via des conférences téléphoniques pour coordonner et harmoniser les pratiques, et répondre aux très nombreuses questions que se posent nos confrères.

Lesquelles reviennent ?
Nombre d’interrogations portent sur la réception des actes. Notre position est claire : pas de réception de clients dans nos locaux, sauf urgence exceptionnelle, comme l’établissement d’un testament, qui ne pourrait se faire qu’à l’office ou chez le client. La Chambre interdépartementale a proposé à ce sujet au directeur de l’Agence régionale de santé qu’il puisse nous contacter en cas de demande d’établissement de testament dans le milieu hospitalier.

Qu’en est-il des transactions immobilières ?
Nous sommes face à plusieurs problématiques : aujourd’hui il n’est pas possible, avant de signer, de faire une visite du bien, les entreprises de déménagement ne travaillent pas… Le notaire peut, il est vrai, procéder à des signatures de compromis sans la présence des clients, à condition qu’il ait toutes les pièces nécessaires et indispensables pour le préparer, comme les diagnostics par exemple, les différents acteurs du marché immobilier ne pouvant travailler les uns sans les autres. Cela reste pour le moment marginal.

“Notre position est claire : pas de réception de clients dans nos locaux, sauf urgence exceptionnelle, comme l’établissement d’un testament”, affirme Daniel Gallet. © Bruno Bleu

Concernant les signatures des actes par comparution à distance rendues possibles par le décret du 4 avril, comment les notaires procèdent-ils et comment s’assurer qu’elles soient sécurisées ?
C’est un dispositif particulier. Le notaire donne lecture, explique l’acte au client dans le cadre d’une visioconférence et il constate le consentement. Le notaire signe seul, et il y a évidemment une procédure hautement sécurisée. Il faut que les deux parties soient équipées pour réaliser une visioconférence codée – un système agréé par le CSN –, et que soit délivrée au client une clé de cryptage permettant de rendre la signature incontestable lors du recueil de son consentement. La délivrance de cette clé de cryptage peut nécessiter d’avoir recours, toujours à distance, à une procédure d’identification poussée.

La Chambre a-t-elle pris des mesures spécifiques pour accompagner les notaires ?
Nous sommes très à l’écoute de nos confrères et de leurs difficultés, et nous communiquons régulièrement auprès d’eux. Ce côté humain est primordial : nous avons mis en place une cellule animée par des membres de la Chambre et dédiée à nos jeunes confrères installés depuis moins de deux ans. Une autre cellule va voir le jour pour les offices en difficulté financière, afin de les accompagner en cas de procédure de liquidation judiciaire ; nous voulons anticiper. Nous avons également des réunions avec les présidents des associations des notaires des différents arrondissements pour relayer les informations de la Chambre, et afin qu’ils nous fassent remonter les difficultés rencontrées par certains confrères. Début avril, le Conseil supérieur du notariat a lancé l’opération “36 20 dites notaire”, à laquelle notre Chambre a participé. Il s’agissait de répondre à des sollicitations de clients. Dans le Nord – Pas-de-Calais, nous avons reçu environ 4 000 appels. Un numéro vert a également été mis en place* qui vient lui aussi en appui des notaires pour répondre aux interrogations des clients. L’idée, c’est de maintenir le lien et l’unité de notre profession, avec une notion de solidarité et d’adaptabilité.

Comment envisagez-vous la reprise de l’activité notariale ?
Forcément au ralenti : pendant deux mois, il y aura eu très peu de transactions, voire aucune.

  • 0 800 33 56 87.

Mesures d’aides

En plus des mesures d’aides établies par le Gouvernement, les notaires peuvent bénéficier d’un plan de soutien spécifique aux professions juridiques, proposé par la Banque des territoires, avec des prêts de trésorerie ou des découverts autorisés.


Les chiffres-clés du notariat dans le Nord – Pas-de-Calais

  • 299 offices.
  • 754 notaires : 427 exercent dans le cadre d’une structure sociétaire, 99 en individuel et 228 salariés.
  • 2 500 collaborateurs.