Les tribunaux de commerce en soutien aux entreprises en difficulté
Entre injonctions de payer et procédures de prévention des difficultés, les tribunaux de commerce proposent leurs services aux entrepreneurs confrontés à des problèmes ponctuels ou plus structurels.
Les Assises des délais de paiement et des financements se sont tenues le 17 octobre dernier, alors que la Banque de France venait de décider de dégrader la cote de plus de 800 entreprises en raison de retards de paiement à leurs fournisseurs. C’est dans le cadre de ce rendez-vous annuel, organisé par les acteurs français de la gestion de crédit, que la présidente du Tribunal de commerce de Nanterre, Catherine Drévillon, a rappelé que « nous pouvons agir sur les délais de paiement car le tribunal de commerce est aussi au service des entreprises pour leur permettre de recouvrer leurs créances, lorsqu’il y a un contentieux ».
Accélérer le recouvrement des factures
« Si vous être le créancier et que vous avez besoin de faire recouvrir vos créances, le plus simple c’est l’injonction de payer », a-t-elle poursuivi. Au tribunal de commerce de Nanterre, « nous rendons une ordonnance d’injonction de payer en une semaine. Pour l’ensemble des tribunaux de commerce en France, il faut compter entre une semaine et quinze jours. » Aujourd’hui, « tout est dématérialisé, c’est très simple et la demande se fait dans des délais très rapides » pour les situations les plus simples. Lorsque le dossier est « moins évident », le créancier peut en passer par la procédure de référé, qui permet au juge de prendre rapidement une décision provisoire.
S’informer sur les solutions existantes en fonction de sa situation
En charge du traitement des difficultés des entreprises, et notamment des procédures collectives (sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires), les tribunaux de commerce proposent également des solutions en matière de prévention. Tout d’abord, « dans tous les tribunaux de commerce de France, des juges ou anciens juges consulaires sont à la disposition des chefs d’entreprise pour les recevoir et les informer sur les procédures qui existent dans la situation qui les concerne, et ce, de façon confidentielle », a précisé Catherine Drévillon.
Conciliation et mandat ad hoc, les procédures de prévention des difficultés
Autres possibilités : les procédures préventives de mandat ad hoc et de conciliation. « Ce sont des procédures confidentielles, initiées à la demande du dirigeant, lorsque l’entreprise connaît une difficulté de toute nature – financière, économique, ou encore juridique, du fait d’une difficulté entre associés, par exemple. Cela permet au dirigeant de venir devant le tribunal expliquer sa situation et demander la nomination d’un conciliateur ou d’un mandataire ad hoc, c'est-à-dire d’un super-négociateur qui va aider à régler les difficultés de l’entreprise à un moment donné. » Le plus souvent, il s’agit « d’un problème de renégociation de crédits – de la durée des crédits en particulier – pour réduire le montant des charges trimestrielles ou mensuelles », mais aussi « de problèmes de renégociation de bail avec le bailleur, par exemple ».
Des solutions abordables, même pour les plus petites entreprises
Ces procédures préventives « ont longtemps eu la réputation d’être très chères, très compliquées », a-t-elle relevé. Or, « ce n’est plus le cas car, en général, la personne qui est nommée en tant que conciliateur ou mandataire ad hoc est un mandataire ou un administrateur judiciaire, et ces derniers savent s’adapter. Ils sont capables de travailler avec des budgets très raisonnables pour les petites entreprises. » Au tribunal de commerce de Nanterre, « nous avons ouvert une grosse centaine de conciliations et mandats ad hoc depuis le début de l’année, et une bonne trentaine de ces entreprises comptaient moins de 15 salariés. » Cela s’adresse donc à toutes tailles d’entreprises, « des plus petites aux très grosses ».
Aller vers le tribunal sans attendre que le tribunal vienne à soi
En matière de prévention des difficultés, les petites entreprises sont aujourd’hui « mieux informées par leurs conseils, experts-comptables et avocats ». On voit aujourd’hui davantage de petites d’entreprises devant le tribunal en procédure préventive « et c’est très important car, si c’est anticipé, on peut vraiment sortir l’entreprise d’un mauvais pas et, à défaut, si la situation est vraiment devenue grave, un redressement judiciaire bien préparé ou une sauvegarde bien préparée permettent d’assurer la pérennité de l’entreprise ». Et de conclure : « Il faut vaincre cet obstacle de la peur du tribunal. Vous serez accueilli avec tous les égards que vous méritez. »
Bientôt les premiers « tribunaux des activités économiques »
Menée dans douze tribunaux de commerce en France (Auxerre, Avignon, Le Havre, Le Mans, Limoges, Lyon, Marseille, Nancy, Nanterre, Paris, Saint-Brieuc, et Versailles) , l’expérimentation du tribunal des activités économiques (TAE) va démarrer le 1er janvier 2025. Dans les juridictions concernées, toutes les procédures collectives seront du ressort du tribunal de commerce, hormis celles visant les professions juridiques réglementées (avocats, notaires, commissaires de justice…) qui continueront d’être traitées par les tribunaux judiciaires.
En parallèle, une « contribution pour la justice économique » va être instaurée – contribution qui, en réalité, ne reviendra pas à la justice commerciale, mais sera versée au budget général du ministère de la Justice. Des décrets d’application doivent encore venir préciser ce volet de la réforme, mais la loi prévoit que seules les entreprises requérantes de plus de 250 salariés soient redevables de cette contribution, qui sera remboursée si les parties arrivent à un accord et se désistent de leur instance, avant la fin de la procédure. Une incitation à recourir à la médiation et à la conciliation.
M.L.