Les taxis manifestent contre le covoiturage sanitaire, le gouvernement les invite à discuter en janvier

Non au covoiturage pour aller chez le médecin: des milliers de taxis ont manifesté lundi à travers toute la France contre la nouvelle loi de finance de la Sécurité sociale...

Manifestation de taxis contre le covoiturage pour aller chez le médecin, le 11 décembre 2023 à Toulouse © Ed JONES
Manifestation de taxis contre le covoiturage pour aller chez le médecin, le 11 décembre 2023 à Toulouse © Ed JONES

Non au covoiturage pour aller chez le médecin: des milliers de taxis ont manifesté lundi à travers toute la France contre la nouvelle loi de finance de la Sécurité sociale, qui mutualise les trajets des patients médicalisés.

Le président de l'Union nationale des taxis (UNT) Rachid Boudjema a indiqué lundi soir que les taxis étaient invités à discuter des décrets d'application de cette mesure le 12 janvier au ministère de la Santé.

A l'appel de son organisation, des chauffeurs ont ralenti ou bloqué la circulation lundi sur les grands axes de Paris, Marseille, Toulouse, Lille ou Bordeaux. 

En Ile-de-France, les taxis ont notamment ralenti le trafic lundi matin sur l'A1 (nord), avant de converger vers le ministère de la Santé, dans le centre de la capitale.

Ces taxis s'opposent à un article du budget de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2024, passé en force au Parlement le 4 décembre. 

Le gouvernement veut pousser les patients à accepter une offre de transport sanitaire (véhicule sanitaire léger ou taxi conventionné) partagée avec d'autres patients, via une plateforme en ligne. 

"Arrêtez de culpabiliser le malade comme le transporteur", a lancé Rachid Boudjema. "Aujourd'hui le transport partagé on le réalise déjà. Mais il faut que le patient l’accepte et que ça ne soit pas incommodant pour lui, sans détours, sans trop d’attente". 

Environ 350 taxis ont également manifesté à Toulouse, perturbant la circulation autour de l'aéroport de Blagnac, près d'un site Airbus où se déplaçait dans l'après-midi le président Emmanuel Macron. 

Plateformes

Les trajets en ambulance ou en taxi sont remboursés s'il sont liés à une hospitalisation, à une affection de longue durée, à un accident du travail, ou s'ils impliquent un trajet de plus de 150 kilomètres. 

Ces transports ont représenté des remboursements de près de 5,5 milliards d’euros en 2022, et 65 millions de trajets ont été réalisés sur l'année pour les seuls taxis et véhicules sanitaires légers (VSL), selon les auteurs du texte de loi. 

L'idée est d'en réduire le coût pour la Sécurité sociale à hauteur de 100 millions d'euros par an entre 2025 et 2027, ainsi que la pollution.

Près de 15% des trajets sont déjà partagés, avec des dispositifs incitatifs pour les transporteurs les plus partageurs. Mais le refus des patients reste un obstacle de taille.

Sans raison médicale valable pour la refuser, les patients n'ont ainsi plus le droit au tiers payant et devront donc avancer les frais. Ils ne seront ensuite remboursés que sur la base du prix d'un transport partagé.

Selon le gouvernement, cette mesure impacte peu les patients car elle ne concerne que les transports programmés, lorsque le transport partagé est possible et autorisé par le médecin, par exemple pour les trajets liés à des séances de dialyse ou de rééducation.

Du bétail

Dans les zones rurales, le transport médical représente jusqu'à 90% du chiffre d'affaires des professionnels, selon la Fédération des artisans du taxi. 

L'UNT estime que le transport partagé ne fait pas baisser le chiffre d'affaires des taxis, mais elle voudrait exclure du dispositif les plateformes qui mettent en relation hôpitaux et transporteurs, comme pour les médecins ou les VTC, prenant une part du gâteau. 

"Sous prétexte de vouloir faire des économies, ils ne pensent pas du tout au patient", a lancé à Paris le taxi Kamel Belaz. "Le patient, le pauvre, on a l’impression que c’est du bétail."

Avec ces "navettes médicalisées", "on nous enlèverait le médical", a déploré Sergio Valleret, devant la gare Saint-Jean de Bordeaux. 

"On ne peut pas se permettre de faire attendre nos clients en fin de consultation ou de soin, pour une durée indéterminée", souligne Emmanuelle Cordier, de la Fédération nationale du taxi (FNDT). Par ailleurs, "l’Etat se cache derrière des chiffres, mais avec la désertification médicale, et les rassemblements de structures de soins, on fait de plus en plus de kilomètres", souligne-t-elle.

Sa fédération n'a pas appelé à la manifestation, en prévision d'une échéance importante attendue pour 2024 et qui pourrait nécessiter une nouvelle mobilisation: la renégociation de la convention des taxis avec l'Assurance maladie.

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