Les notaires veulent contribuer à la gestion du patrimoine p
Crise oblige, les propriétés des pouvoirs publics, État, communes et autres départements, sont désormais gérées de manière plus dynamique. Le notariat consacrera son congrès, en juin, à ces propriétés publiques, mais refuse de s’immiscer dans le débat sur l’organisation territoriale.
Bienvenue dans le grand bain de l’organisation territoriale ! Les notaires aiment souligner, régulièrement, leur «proximité» avec les maires, avec lesquels ils partagent le goût pour le terroir et, à l’occasion, quelques parties de chasse. Mais le monde des élus locaux n’est plus ce qu’il était. Aux communes se sont ajoutés les structures intercommunales et un redoutable écheveau de réglementations administratives. «Au lieu d’être un élément de simplification, la création des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) est plutôt un facteur de complexification», constate, comme bien d’autres observateurs avant lui, Pierre- Jean Meyssan, notaire à Bordeaux, chargé par ses pairs de coordonner les travaux du prochain congrès de sa profession, qui se déroulera à Lyon du 16 au 19 juin. Le notariat va pourtant devoir se pencher sur cette complexité. Le praticien bordelais a choisi d’intéresser ses confrères participant au congrès au sort des «propriétés publiques».
«Réveiller la belle au bois dormant»
Le thème, pour ardu qu’il semble être, est en phase avec l’actualité politique et juridique. La nouvelle réforme de l’organisation territoriale, baptisée «Acte 3 de la décentralisation» par le gouvernement, sera discutée ce printemps au Parlement. Par ailleurs, soulignent les notaires, «le patrimoine public français est en pleine mutation». Les différents niveaux de collectivités possèdent des propriétés dont la valeur totale pourrait atteindre «la centaine de milliards d’euros», assurent les praticiens. Les pouvoirs publics, lourdement endettés, optent désormais pour une «gestion dynamique» de ce patrimoine, ce qui implique la vente de certains biens, la concession à des acteurs privés, voire la participation du secteur privé à la gestion publique. Pour qualifier cette politique, les notaires ont trouvé une formule, «réveiller cette belle au bois dormant qu’était la propriété publique». En juin, l’équipe du congrès expliquera aux notaires rassemblés à Lyon que les occasions, pour un praticien décidé à conseiller une collectivité ou une entité publique sur la gestion de son patrimoine, ne manquent pas. Le notaire peut ainsi intervenir lorsqu’une société HLM organise la vente d’appartements à ses locataires, qu’un maire souhaite acquérir une crèche alors que la compétence en question a été transférée à l’EPCI ou encore que la commune envisage une acquisition en état futur d’achèvement. Afin de fournir un cadre à ces actes, le notariat déclinera, comme il le fait à chaque congrès, une série de propositions destinées aux pouvoirs publics. «Nous en présenterons moins que les autres années. Puisque nous ne cessons de dénoncer l’inflation législative, nous sommes cohérents en détaillant moins de propositions», lâche Pierre-Jean Meyssan.
«Puissant lobby» des élus
En examinant l’environnement juridique du patrimoine public, les notaires seront nécessairement confrontés à la complexité de l’organisation territoriale. En profiteront-ils pour proposer de réduire le nombre de collectivités ou de niveaux ? Le président du congrès balaie cette tentation d’un revers de main. «Nous ne nous sentons pas le droit de porter ce message-là», dit-il. La complexité du fameux millefeuille territorial n’a pourtant pas échappé au praticien. «Il serait tentant de regrouper les communes», admet-il. De même, le fait que chacun des quelque 37 000 maires de France dispose aujourd’hui du droit d’octroyer un permis de construire ne facilite pas la tâche des juristes. «Il serait séduisant de retirer le permis de construire aux maires», un transfert de ce droit aux EPCI étant susceptible de «créer une distance appréciable» entre le lieu et l’objet de la décision. Malgré ce constat sévère, les notaires, qui entretiennent d’ordinaire des relations de confiance avec les décideurs politiques, ne traiteront pas de l’organisation territoriale au cours de leur congrès. Le sujet relève selon eux des choix politiques. Pour le praticien bordelais, «le responsable politique qui imposera à certains élus de se dépouiller de certaines compétences aura un courage extrême et nous serons très fiers de lui». Mais pour l’heure, et sans doute encore pour longtemps, toute réforme se heurte «au lobby extrêmement et puissant des élus locaux», dit encore Pierre-Jean Meyssan. La «proximité» entre maires et notaires n’autorise pas tout.