Les députés français adoptent la "taxe Zucman", un impôt plancher sur le patrimoine des "ultra-riches"

Dans une France marquée par un déficit public qui se creuse, l'Assemblée Nationale a adopté jeudi dans la nuit la "taxe Zucman", un impôt plancher sur le patrimoine des "ultra-riches" porté dans l'hémicycle par les écologistes pour lutter contre "l'injustice fiscale", mais décrié par...

Les députés ont adopté une proposition de loi des écologistes qui instaure un impôt plancher de 2% sur le patrimoine des "ultra- riches", inspirée d'une proposition de l'économiste Gabriel Zucman © Thibaud MORITZ
Les députés ont adopté une proposition de loi des écologistes qui instaure un impôt plancher de 2% sur le patrimoine des "ultra- riches", inspirée d'une proposition de l'économiste Gabriel Zucman © Thibaud MORITZ

Dans une France marquée par un déficit public qui se creuse, l'Assemblée Nationale a adopté jeudi dans la nuit la "taxe Zucman", un impôt plancher sur le patrimoine des "ultra-riches" porté dans l'hémicycle par les écologistes pour lutter contre "l'injustice fiscale", mais décrié par le camp gouvernemental qui y voit une mesure "confiscatoire".

Le texte, inspiré par les travaux de l'économiste Gabriel Zucman, instaure un impôt plancher sur le patrimoine des 0,01% des contribuables les plus riches en France afin de s'assurer qu'ils payent au moins 2% de leur fortune en impôt.

"Une immense avancée!" a réagi l'économiste sur le réseau social X après l'adoption du texte. "C’est un pas de géant pour la France et cela pourrait inspirer d’autres pays", a-t-il écrit.

L'objectif est d'"introduire un minimum de justice", "les ultra-riches" payant en proportion de leurs revenus "presque deux fois moins" d'impôts et de prélèvements que les Français en moyenne, souligné la députée écologiste Eva Sas, rapporteure du texte.

Le déficit public de la France doit s'établir à 6,1% du Produit intérieur brut en 2024, largement au-dessus des 3% tolérés par Bruxelles, selon la commission des Finances de l'Assemblée.

La proposition de loi a été adoptée par 116 voix contre 39, avec le soutien des députés de la gauche, l'abstention du Rassemblement national (extrême droite) et une faible mobilisation du camp gouvernemental.

Adoptée en première lecture à l'Assemblée à l'occasion de la "niche" parlementaire du groupe écologiste et social, elle n'est en revanche pas encore inscrite à l'ordre du jour du Sénat, dominé par une alliance de la droite et du centre, et où ses chances d'être adoptées sont minimes.  

Le texte envoie "le signal" que "l'immunité fiscale des milliardaires, c'est terminé", s'est réjouie Eva Sas à l'issue du vote. 

"Comment expliquer qu'Isabelle, médecin dans un hôpital public, paie plus d'impôts en proportion de ses revenus que Bernard Arnault ? Karim, boulanger (...) plus que les héritiers de Chanel ? Et Tao, cheminot (...) plus que Françoise Bettencourt ?", a également interrogé la députée du groupe écologiste Clémentine Autain à la tribune, citant des grands noms de milliardaires français. 

Confiscatoire

C'est grâce à "des schémas d'optimisation fiscale mis en place par les plus riches", via des holdings notamment, a expliqué Mme Sas. Ainsi, "ils perçoivent très peu de revenus et ne paient en conséquence que très peu d'impôts".

Avec cette contribution, qui concernerait environ 1.800 personnes, selon Mme Autain, "nous pouvons faire entrer dans les caisses de l'Etat entre 15 et 25 milliards d'euros".

Soit "une somme conséquente, dont nous avons particulièrement besoin par les temps qui courent, pour nos services publics qui sont à réparer ou pour agir concrètement pour la transition écologique", a détaillé la députée.

La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a exprimé à l'unisson des groupes du camp gouvernemental sa ferme opposition à cette contribution qu'elle juge "confiscatoire et inefficace".

Si la proposition écologiste était définitivement adoptée, elle "ferait immédiatement partir les milliers de foyers et avec eux les capitaux à l'étranger", selon la ministre.

Le gouvernement planche actuellement sur l'instauration d'un "impôt minimal différentiel", pour s'assurer que la somme des impôt payés soit au moins égale à 0,5% du patrimoine, en excluant les biens professionnels. 

Pour tenter de limiter l'exil fiscal, un dispositif prévoyant que les biens des 0,01% les plus riches continuent d'être imposables pendant les cinq années suivant leur départ de France a été ajouté. 

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