Les cessions d’entreprises enfin analysées de près !

La Caisse d’épargne Nord de France monte encore en puissance avec sa 3e Journée de la transmission. Le temps fort a été l’étude statistique nationale de l’Observatoire BPCE montrant que les idées sur les cessions sont pour la plupart caduques…

Entretiens non stop à Euratechnologie
Entretiens non stop à Euratechnologie

 

D.R.

Entretiens non-stop à EuraTechnologies.

Cette 3e rencontre à EuraTechnologies entre cédants, candidats repreneurs d’entreprise et tous les acteurs de la transmission restera dans les annales : pour la première fois, on a pu disposer de chiffres nationaux crédibles avec ricochet régional. Et surtout d’une analyse des tendances sur le type de PME à céder, des catégories de cédants, des rapports âge/performance de la société cédée et des interactions souvent brouillonnes entre la raison industrielle et le psychique.

 Le rapporteur Alain Tourdjman1 a commenté le rapport de l’Observatoire2. La table ronde qui a suivi, animée par le rédacteur en chef de La Gazette, Philippe Schröder, a permis de façon complémentaire de rappeler par le vécu les ingrédients qui favorisent une transmission et les freins. Ce qui est remarquable après cette 3e Journée, c’est que l’on dispose enfin de chiffres fiables et récents pour étayer les propos. Et les surprises ne manquent pas !

 

D.R.

J.F. Pansard entouré de Pascal Arnoult et Michel Legras.

Enfin des bons chiffres“. Cette grande enquête a pris cinq mois en 2010. Les chiffres nationaux se vérifient à peu de choses près dans notre région. La France  compte 207 000 PME dont certaines ont pour objectif, via la transmission notamment, de passer au stade d’ETI (établissement de taille intermédiaire), soit de 250 à 5 000 salariés, le problème français étant que nos PME restent trop petites et donc peu concurrentielles même au niveau européen. La méthode utilisée a été de recenser et de s’en tenir aux simples chiffres sans aucune estimation, procédé aléatoire. En 2010, 6 500 cessions ont été constatées (5 500 en 2005) : 1 000 via des holdings de PME, 1 500 par des actionnaires majoritaires, 500 intra-familiales et avec d’autres types, on atteint le chiffre de 9 000, en fait plus de 12 000 cessions vérifiées. «On a enfin des bons chiffres, estime Alain Tourdjman, malgré un manque d’informations sur les actionnaires majoritaires.»

 

L’âge, la géographie, la taille… Première surprise : l’âge du cédant n’est pas déterminant dans la transmission ; 58% des vendeurs ont 55 ans en moyenne. Dans les PME de 19 à 100 salariés, les cessions se multiplient mais dans celles de 10 à 19 salariés, les cédants de plus de 76 ans ne sont que 6%. Néanmoins l’âge joue un rôle. La transmission survient en raison d’un départ à la retraite, de la nécessité de relancer la PME, pour des raisons techniques (changement de gouvernance, vente d’une structure…). En fait, autre surprise, nos PME sont à 60% des holdings. Deux catégories de cédants apparaissent : des jeunes qui veulent changer d’air et des sexagénaires qui n’ont connu qu’une seule PME et en ont assuré la pérennité ou, plus rarement,  comptent sur un solide repreneur pour le faire. Cela va conditionner les comportements lors de la cession.

Géographiquement, «les disparités sont importantes et surprenantes même, avoue Alain Tourdjman, sans doute dues aux particularismes locaux. Ainsi le Nord-Pas-de-Calais se situe au-dessus de la moyenne nationale mais avec un gros écart en faveur du Nord, le Pas-de-Calais comptant des dirigeants plus âgés. »

La taille de la PME entre en jeu. En général, une PME transmise se noiera dans une structure plus large, mais ce n’est pas automatique, cela dépend de sa taille de départ. La limite dans le Nord-Pas-de-Calais est de 50 salariés, le taux de concentration y est plus élevé qu’en France. Sur 1 000 dirigeants, un quart a l’intention de céder dans les deux ans mais le taux diffère si le dirigeant a plus de 60 ans (ils sont 49% dans ce cas). Néanmoins, le nombre de cessions ne cesse d’augmenter. Il y a disparité entre l’intention et la réalisation : en intention de 14 000 à 20 000 PME seraient cessibles. En fait, on est loin du compte car il existe des freins.

 

D.R.

Alain Tourdjman en pleine explication de l'étude de l'Observatoire BPCE.

Mariage de raison ? Pour Alain Tourdjman, le principal ralentisseur, c’est la difficulté à trouver le bon repreneur. «Il faut, précise-t-il, que cédant et repreneur forment un bon couple !» Dans le cas contraire, la PME va-t-elle disparaître ? « Non, répond-t-il. Au-delà des 70 ans du cédant, le taux de disparition n’est pas supérieur. Mais quand le vieillissement s’accélère, il a de plus en plus de mal  à trouver un repreneur qui lui aille.» Dans les freins à la reprise, qu’est-ce qui est déterminant. Le prix ? «Pas vraiment, poursuit-il, car ce couple va devoir d’abord vérifier qu’il a la même vision de la PME, si cela se fait, alors seulement on parle argent. Et une transmission s’apparente plus à une cession dans laquelle il y a certes une vente mais aussi un transfert gratuit de capital confiance et de valeurs humaines. Voilà la dimension qualitative de la transmission !»

 Finalement, les cédants de plus de 60 ans sont passés depuis 2005 de 12 à 17,8%, mais les plus de 70 ans font encore vivre 800 000 salariés. «Cela bouge, remarque Alain Tourdjman. Les jeunes dirigeants montent dans les structures qui possèdent encore des dirigeants vieillissants. Tout le monde s’accommode en fait de cette réalité avec pragmatisme. Problème : les PME stagnantes ralentissent leur développement, il y a un vrai enjeu macro-économique. On voit que quand il y a reprise, le CA grimpe avec l’investissement et l’endettement, mais c’est plus dynamique. C’est parce qu’il y a beaucoup de cessions que la moyenne d’âge des dirigeants baisse et pas le contraire !»

 

1. Les participants à la table ronde : Pascal Arnoult, Philippe Vasseur, président de la Chambre régionale de commerce et d’industrie, Alain Tourdjman, directeur des études et prospectives du groupe BPCE, Michel Legras, dirigeant de Sarasin-Actor, Jean-François Pansard du cabinet Pansard et Associés.

2. L’étude complète sur www.bpce.fr

 

Pour la Cenfe, plus de 18 000 TPE-PME dont s’occuper…
Pour Pascal Arnould, membre du directoire de la Cenfe chargé du pôle “Banque des décideurs” en région, cette 3e Journée de la transmission est l’occasion de rappeler quelques temps forts de son action. «Nous sommes sur un bassin de 50 000 créations en cinq ans, hors auto-entrepreneurs, chiffres des CCI régionales. Mais les entreprises qui faillissent deviennent transmissibles… En 2020, plus d’un patron sur cinq aura plus de 60 ans alors qu’ils ne sont que 16% pour l’instant. Donc ce sont 18 000 TPE-PME qui sont de notre ressort à nous la Cenfe ! Nous réalisons plus de 500 opérations l’an en région avec nos partenaires, la CRA et Aparté, les CCI, réseau Entreprendre et La Gazette Nord- Pas de Calais. Nous gérons l’épargne, nous finançons les projets, l’immobilier et le marché de l’entreprise. Avec trois atouts : des dépôts importants, 20% de fonds propres et une action 100% régionale. Notre objectif en 2012-2013 est de rencontrer 2 000 entreprises de la région pour proposer des outils de développement.»

 

Une formule originale qui plaît
La Caisse d’épargne Nord de France Europe consacre de nombreux mois à l’organisation de ces Journées de la transmission, et ce, de la façon la plus moderne et pratique possible : tout se fait par le Net. Le noyau dur d’entrepreneurs qui a participé  à la première édition − 130 chefs d’entreprise cédants ou repreneurs − s’est enrichi de 50 participants supplémentaires lors de ce troisième rendez-vous à EuraTechnologies Lille-Lomme. Pascal Arnoult et ses collaborateurs, dont Pascale Sciacaluga, responsable marketing, véritable cheville ouvrière de l’opération, ont voulu encore innover via un speed-dating particulièrement dynamique qui a rassemblé 160 rendez-vous et 20 conseils de cédants-experts en fusion-acquisition, ouvrant aussi les portes aux entrepreneurs de la région parisienne et de Belgique. «L’originalité n’est pas ennemie du pragmatisme, a relevé Pascal Arnoult. Nous mettons tout en œuvre pour que cédants et repreneurs trouvent un cadre agréable et pratique à leurs négociations, sachant que notre action n’a qu’un but : que les reprises d’entreprises augmentent dans notre région, dans l’intérêt de tous et de l’entreprise elle-même.»
La Cenfe a mobilisé aussi ses partenaires : le réseau Entreprendre Nord qui a organisé un échange sur le thème «Comment réussir la première rencontre avec les équipes en place ?». Puis Aparté-CCI Nord de France a animé «La valorisation d’une entreprise : quel impact sur le secteur d’activité ?». Enfin, l’Observatoire BPCE a présenté les témoignages de repreneurs et conseils en Fusac sur la dynamique de la transmission en Nord-Pas-de-Calais.
Contact. Cenfe : au 03 28 36 63 61.