Les brasseurs de la région ne décolèrent pas !
Depuis quelques semaines, les brasseurs de la région sont sortis de leur réserve. Ils dénoncent l’augmentation des droits d’accise prévue dans le projet de loi de finances.
Installée dans les anciennes écuries d’une distillerie, la Brasserie du pays flamand fleure bon le malt et le houblon. Son créateur, Mathieu Lesenne, organise la visite de son établissement pour les élus et les journalistes. La cible : les droits d’accise qu’il dénonce. Dans une région où l’on boit 70 litres (de bière) par an par habitant, le sujet est délicat. Les brasseurs du Nord-Pas-de-Calais n’étaient plus qu’une vingtaine au début des années 2000. Une décennie plus tard, ils sont 33, développent plus d’une centaine de marques pour un volume de 5,5 millions d’hectolitres. Une centaine d’emplois directs en dépend. Or, depuis quelques semaines, la fiscalité les menace ; la hausse des droits d’accise a été votée à l’Assemblée nationale sans que l’amendement évitant la hausse, déposé par un groupe de députés de tous partis, ne soit adopté. A la Brasserie du pays flamand à Blaringhem, Mathieu Lesenne ne décolère pas : «C’est un métier où les investissements sont lourds. L’augmentation des droits d’accise me fait passer de 24 000 à 62 400 euros de taxe annuelle.» Il produit aujourd’hui 21 000 hectolitres pour une capacité de 25 000. Ce jeune artisan s’est installé il y a peu. «On est dans les premières années du crédit. J’avais prévu une hausse minime pour absorber l’augmentation du coût des matières premières. Avec la taxe, je ne m’en sortirai plus. Les clients n’accepteront pas une hausse à deux chiffres», explique le dirigeant de la brasserie qui emploie quatre salariés et collabore avec quatre agents commerciaux. «Est-ce que je peux prendre l’apprenti que je prévoyais pour 2013 ?», interroge-t-il désormais. Côté matières premières, les nouvelles ne sont pas bonnes non plus : le malt a augmenté de 100% ces cinq dernières années.
Une augmentation phénoménale. Jean-Pierre Decol, député de Flandres, vient rendre visite aux brasseurs. Il raconte : «A l’assemblée, on a été roulés dans la farine. On avait été reçus à Matignon, une délégation de députés de tous horizons… On avait des assurances sur l’amendement que nous avions déposé. En séance, on nous a bluffés !» La bière est taxée en fonction du volume produit : sous 10 000 hectolitres, l’artisan-brasseur paie 1,38 euro/l ; entre 10 000 et 50 000 hl, la taxe passe à 1,64 euro/l ; entre 50 et 200 000 hl, on monte à 2,07 euros/l. Enfin, passé la barre des 200 000 l, le brasseur en prend pour 2,75 euros/l. Le projet de loi de finances double, voire triple les taxes. Jusqu’à 7,2 euros/l ! Dernièrement, Catherine Génisson, sénatrice, vice-présidente des affaires sociales, a reçu les brasseurs mécontents. Jean-Pierre Decol a rallié d’autres parlementaires de tous groupes pour préserver l’industrie brassicole : «La bière est un produit culturel et populaire. On ne devrait pas toucher à un produit pareil ; 70% de la consommation est produite en France.» La suite se jouera probablement à la buvette des assemblées…