Les activités créatives, levier de croissance pour Picwic
Qui ne connaît dans la région l’enseigne Picwic qui, avec son offre de jouets et de jeux, séduit les plus jeunes ? Pour assurer son développement et son avenir, elle élargit son concept au segment des activités créatives avec l’objectif de séduire… les adultes.
C’est parce que le marché et la demande existent et que les activités créatives constituent une offre complémentaire aux jouets dans laquelle les parents, et plus spécifiquement les mamans, se retrouvent que l’enseigne Picwic teste depuis la dernière fête des Mères, dans trois de ses 21 magasins, un concept qui fait la part belle au segment des activités créatives.
Trois magasins tests. Pour n’être pas neuve dans l’enseigne – “déjà à la création de l’enseigne en 1977, le premier magasin à Englos disposait d’une partie de son offre en activités créatives et l’avait mentionné sur sa façade, et entretemps elles avaient été renommées travaux manuels”, rappelle Alexandre Dupriez, directeur général de l’enseigne Picwic depuis 2003 –, cette offre d’activités créatives est appelée à s’inscrire parmi les plus pointues et les plus larges du marché et à faire de Picwic une enseigne référente dans ce secteur complémentaire de celui des jeux et jouets. Décidée l’an dernier, la création de cet univers à vocation expérientielle est effective depuis mai et porte sur une surface de vente de 700 m2, permise par la taille des trois magasins où il est testé : Valenciennes-La Sentinelle (2 500 m2), Barentin près de Rouen en Seine-Maritime, et Lomme, ces deux derniers développant 4 000 m2, alors que celle des autres magasins (généralement des 2 000 m2) ne permette de lui octroyer que 300 à 400 m2, pour n’atteindre que 100 m2 dans le “petit” magasin d’Englos (1 000 m2).
Cette extension de surface a pour corollaire celle de la gamme désormais composée de 14 000 références, et même de 18 000 références à Lomme, contre 7 000 à 8 000 auparavant, à comparer avec les quelque 10 000 références présentes en jouets.
“Il y a une vraie demande sur ce marché des activités créatives”, se réjouit Alexandre Dupriez, ne serait-ce qu’au vu du nombre des enseignes qui s’y développent même s’il regrette qu’il reste encore “très impalpable” en l’absence de panélistes spécialisés.
Un marché de tendances. L’enseigne, qui réalise actuellement quelque 15% de son chiffre d’affaires sur ce secteur, tous magasins confondus, avec un panier moyen d’une quinzaine d’euros en activités créatives pour une cinquantaine d’euros en global, espère revenir au niveau des 20% qu’il a pu représenter dans les années 2003, 2004 et 2005 et même de l’accroître. “A l’époque, rappelle le directeur général, le phénomène des perles tirait l’activité créative vers le haut. Ce marché a alors plus que triplé avant de se réduire, tout en restant puissant, à une dizaine de pourcent de l’activité contre 50%. Les activités créatives sont des phénomènes de mode avec aujourd’hui le home déco qui descend et le scrapbooking qui monte.”
Implantée entre les caisses et l’espace Lego en fond de magasin, plus proche du secteur par ses aspects création et construction que l’espace Playmobil, la zone dédiée aux activités créatives se décline en plusieurs sous-secteurs, les uns plus “classiques”, tels les beaux-arts, le modelage, la mosaïque, le bois, que d’autres plus riches en nouveautés, tels le scrapbooking (qui fait “le gros de la tendance” selon la responsable du secteur), les décors de cérémonie, les perles en vrac… Au top 3 des activités, le bois, “support utilisé par toutes les techniques”, “l’incontournable” scrapbooking et le tissu grâce au tissu au mètre, autre nouveauté du lancement du concept, et au tricot “qui marche toujours très bien”.
Des avantages, l’activité créative en compte quelques-uns à commencer par l’accroissement de clientèle qu’elle soit unique ou mixte, selon qu’elle fréquentait ou non jusqu’alors les magasins de jouets, mais aussi en termes de marge financière “plus correcte que sur les jouets très marketés” et de saisonnalité avec une fréquentation plus lissée sur l’année, même si elle est liée aux phénomènes d’affluence comme la période de Noël, source de suractivité. C’est dire si l’évolution des tests en cours est suivie de près.
Conjoncture difficile. D’autant que, si sur les activités créatives, l’activité est “très favorable”, au global, elle affiche “de légères régressions”, dans un marché qui est lui-même en décroissance de 3 à 4% depuis six mois avec des hypermarchés entre -6 et -7% et des spécialistes plus proches de zéro. Et ce, après une année 2011 qui, avec un chiffre d’affaires égal à 115 M€, n’a pas “été bénéficiaire pour la première fois depuis dix ans pour des problématiques internes à résoudre et externes avec des replis de marché à partir de novembre dus à un nombre de visites en baisse”, conséquence du relais très fort sur Internet en fin d’année.
De quoi regretter la période très favorable connue jusqu’en 2006 avec des taux de croissance très forts à deux chiffres. Il est vrai que depuis, la filière a souffert tant de la crise de la qualité en 2007 que du renforcement de la concurrence avec l’abandon de la loi Dutreil et l’arrivée de la LME (loi de modernisation de l’économie) qui a permis de voir “à la fin 2011 des prix de vente inférieurs aux prix de vente fournisseurs, de la crise de la qualité en 2007”, alors qu’avant “on était tous à zéro de marge sur les produits marketés, mais avec des prix à peu près identiques”. Ajouté à ces raisons le développement des sites web, notamment Amazon, c’est toute la filière qui a dû se repositionner.
Challenges relevés. Face à cette dureté des temps, l’enseigne, dont la part de marché se situe entre 3 et 4%, loin du leader entre 12 et 14%, n’est pas restée inactive. Elle a ainsi développé un bureau de représentation en Asie à Shenzhen pour y faire de l’assemblage et du relooking dans une perspective d’homogénéité. Elle a achevé il y a deux ans la remise en linéaires droits de tous ses magasins après une expérience de corners peu concluante. Elle a aussi lancé depuis un an et demi sur quasiment tous les rayons ses marques propres et notamment dans les activités créatives pour enfants sur la partie “Premières créations” avec la marque Bicolor. “Pour autant, nous sommes toujours très en retard par rapport à d’autres comme la Grande Récré ou King Jouet”, ajoute Alexandre Dupriez.
S’il avoue une présence sur Internet limitée, “avec un site qui n’est pas marchand et est un peu dépassé”, et reconnaît qu’il y a “une vraie demande sur un site marchand”, il s’interroge sur l’opportunité d’une présence marchande quand “on n’a pas de visibilité sur des ventes de produits sur lesquels on n’a que de la destruction de valeur”. “Notre offre de marques propres n’est pas assez développée pour développer un site entier autour d’elles… A part y mettre des produits à des prix moins chers que ceux auxquels on les achète !”
Depuis sa création en 1977 à Englos par Stéphane Mulliez, l’enseigne Picwic a déjà bien connu des vicissitudes comme la concurrence que lui a apportée en son temps l’implantation de l’enseigne Toys”R”Us en 1989. De nouveaux challenges s’imposent à elle. L’évolution stratégique de son positionnement avec le double objectif d’un élargissement de la clientèle vers les adultes et d’une désaisonnalisation de la fréquentation des magasins en est un. Reste à en conforter durablement les premiers résultats positifs pour rester dans la cour des grands.