L'entreprise et les salariés

L'entreprise et les salariés

Dans plusieurs décisions récentes, la chambre sociale de la Cour de cassation se prononce sur la motivation de la lettre de licenciement, dans le cadre d’un licenciement économique. Elle apporte des précisions lorsque l’entreprise appartient à un groupe.

Licenciements économiques : motivation La lettre de licenciement qui fait état d’une suppression de poste et d’une réorganisation de l’entreprise destinée à sauvegarder sa compétitivité, invoque un motif économique suffisant et l’employeur peut justifier, devant le juge, de la situation du secteur d’activité du groupe auquel appartient l’entreprise. (Cass. soc. 3 mai 2016. Pourvoi n° 14-29698, 14-29699, 14-29700).
Lorsque la lettre de licenciement invoque une réorganisation rendue nécessaire en raison de difficultés de l’entreprise et de sa situation financière, les juges du fond doivent vérifier l’existence des difficultés invoquées par l’employeur. (Cass. soc. 3 mai 2016. Pourvoi n° 14-24916). Si la lettre de licenciement doit énoncer la cause économique du licenciement telle que prévue par l’article L. 1233-3 du Code du travail et l’incidence matérielle de cette cause économique sur l’emploi ou le contrat de travail du salarié, l’appréciation de l’existence du motif invoqué relève de la discussion devant le juge, en cas de litige. (Cass. soc. 3 mai 2016. Pourvoi n° 15-11046). Pour la Haute juridiction, la lettre de licenciement qui mentionne que le licenciement a pour motifs économiques la suppression de l’emploi du salarié, consécutive à la réorganisation de l’entreprise, justifiée par des difficultés économiques et (ou) la nécessité de la sauvegarde de sa compétitivité, répond aux exigences légales. Ce, sans qu’il soit nécessaire qu’elle précise le niveau d’appréciation de la cause économique quand l’entreprise appartient à un groupe de sociétés. Et «c’est seulement en cas de litige qu’il appartient à l’employeur de démontrer, dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué», précise la chambre sociale.

Licenciement pour faute : fraude Dès lors que le système de traitement des données personnelles a été déclaré à la Cnil et vise à lutter contre l’utilisation frauduleuse des badges de télépéage, sans exclure un tel usage par un salarié de l’entreprise, le licenciement  du salarié pour ce motif procède d’une cause réelle et sérieuse. (Cass. soc. 3 mai 2016. Pourvoi n° 14-23150).  Un salarié de la société des Autoroutes du Sud de la France (ASF) avait été licencié pour faute : il avait apposé sur son véhicule personnel, un badge réservé à un usage professionnel interne et l’avait utilisé pour franchir un péage. Contestant son licenciement, il avait saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes indemnitaires. Pour la Chambre sociale de la Cour de cassation, le système de traitement des données personnelles utilisé par l’employeur avait pour finalité déclarée auprès de la Commission nationale de l’Informatique et des Libertés (Cnil) la lutte contre l’utilisation frauduleuse des badges de péage d’autoroutes, sans que soit exclu un usage frauduleux par un salarié de l’entreprise ; l’intéressé avait reconnu être le propriétaire du véhicule dans lequel avait été utilisé le badge, dont il avait l’usage dans le cadre de son emploi pour ASF. Dès lors, le licenciement du salarié pour utilisation frauduleuse d’un badge de télépéage procédait d’une cause réelle et sérieuse. La Haute cour valide la décision des juges de la Cour d’appel.

françois.taquet.avocat, conseil en droit social