Législatives: pour Macron, la déroute évitée, la suite à inventer

Avec sa coalition arrivée en deuxième position devant le Rassemblement national, Emmanuel Macron a évité la déroute annoncée après la dissolution de l'Assemblée, mais la suite reste à inventer, avec une gauche qui revendique Matignon, une droite...

Le président Emmanuel Macron quitte le bureau de vote du Touquet après avoir voté au 1er tour des législatives, le 30 juin 2024 dans le Pas-de-Calais © Ludovic MARIN
Le président Emmanuel Macron quitte le bureau de vote du Touquet après avoir voté au 1er tour des législatives, le 30 juin 2024 dans le Pas-de-Calais © Ludovic MARIN

Avec sa coalition arrivée en deuxième position devant le Rassemblement national, Emmanuel Macron a évité la déroute annoncée après la dissolution de l'Assemblée, mais la suite reste à inventer, avec une gauche qui revendique Matignon, une droite qui refuse l'alliance et des troupes profondément divisées.

Selon les instituts de sondage, la coalition "Ensemble pour la République" composée du parti présidentiel Renaissance, du MoDem, d'Horizons, du Parti radical et de l'UDI recueille de 152 à 169 députés. Les partis d'Emmanuel Macron, François Bayrou --35 députés élus dimanche à 23h00-- et Édouard Philippe --26 députés-- conservent leurs groupes à l'Assemblée. 

Surtout, surprise majeure: les macronistes terminent devant le RN, victime de l'efficacité retrouvée du "front républicain".

La vague de désistements engagée avec la gauche --82 candidats de la majorité se sont retirés quand ils étaient en position défavorable avec un risque local de victoire du RN-- a permis au camp présidentiel de largement limiter la casse. Dans l'entre-deux-tours, les sondages leur accordaient en effet moins de 100 députés, contre 250 dans l'Assemblée sortante, et 350 lors de l'accession d'Emmanuel Macron au pouvoir en 2017.

Pour le chef de l’État, qui subit le désamour de ses propres troupes depuis sa dissolution solitaire du 9 juin, ces législatives n'en constituent pas moins un tournant dans sa présidence, jugée "verticale" par ses opposants comme par ses partisans.

-- "Composer" --

Lui qui expliquait, peu avant sa réélection en 2022, que la France n'avait "pas un régime parlementaire" va devoir composer avec des adversaires, sans lesquels aucune majorité, même relative, n'est possible.

Un soulagement certain parcourait le camp présidentiel dimanche soir. "Le bloc central est bien vivant", souligne l'entourage du chef de l’État, incitant cependant à la "prudence".

Quelques jours après la dissolution, décidée au soir de la lourde défaite enregistrée aux élections européennes, l'entourage du président expliquait d'abord que celui-ci avait "confiance" : "Il n'y va pas pour une petite majorité".

Mais contrairement aux plans élyséens, la gauche ne s'est pas divisée. Et le discours élyséen a donc évolué au fur et à mesure de la campagne éclair, vantant trois jours avant le second tour "l'esprit de coalition".

Emmanuel Macron "l’a toujours poussé, dès février 2017 dans un meeting. Il le redit en juin 2022, il le fait régulièrement pendant le mandat" mais "jamais les forces politiques n'ont voulu y venir", expliquait encore ce même entourage présidentiel.

Quelle suite à ce scrutin qui ne dégage aucune majorité absolue au Palais Bourbon ? "La question est qui pour gouverner désormais et atteindre la majorité", fait-on valoir à l’Élysée.

--Attal tourné vers l'avenir--

Les macronistes vont-ils se tourner vers la gauche, qui a d'ores et déjà revendiqué la tête du gouvernement et qu'ils n'ont cessé d'attaquer pendant les campagnes européenne et du premier tour des législatives ?

Le Nouveau Front populaire "est loin de la majorité absolue", a fait valoir François Bayrou.

Le camp présidentiel présentera des "conditions préalables à toute discussion" en vue d'une majorité, a prévenu dimanche le patron de Renaissance Stéphane Séjourné, citant la laïcité, la construction européenne et le soutien à l'Ukraine, et concluant que "Jean-Luc Mélenchon et un certain nombre de ses alliés ne peuvent gouverner la France".

Édouard Philippe a lui aussi appelé les forces politiques à "favoriser la création d'un accord" sans le Rassemblement national ni la France insoumise.

L'appoint des Républicains (LR) --55 à 75 sièges-- semble insuffisant pour atteindre la majorité absolue, d'autant que Laurent Wauquiez, de retour à l'Assemblée, a fermé la porte dès dimanche soir: "pour nous, il n’y aura ni coalition ni compromission".

En interne également, le camp Macron peut s'attendre à de grands chambardements. Alors que la cote d'Emmanuel Macron a baissé, celle de Gabriel Attal n'a cessé d'augmenter. 

"Cette dissolution, je ne l'ai pas choisie, mais j'ai refusé de la subir", a souligné dimanche soir M. Attal, qui remettra lundi sa démission au président, tout en se tenant prêt à rester en poste en vue des JO.

De nombreuses sources prêtent déjà au chef du gouvernement de prendre la tête du groupe Renaissance à l'Assemblée. Une concurrence s'annonce également avec Gérald Darmanin. Réélu dans le Nord, le ministre de l'Intérieur a évoqué dès dimanche soir une "alliance politique" avec la droite. Sur fond de possible rapprochement avec Horizons.

Les personnalités macronistes ont connu dimanche des fortunes diverses: les ministres Stanislas Guérini et Sarah El Haïry ont été battus à Paris et en Loire-Atlantique, comme les ex-ministres Olivier Véran et Nadia Haï en Isère et dans les Yvelines.

En revanche, la présidente sortante de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet a été réélue dans les Yvelines, comme Elisabeth Borne dans le Calvados. 

L'ex-ministre Nadia Haï a été battue dans les Yvelines par Aurélien Rousseau, ex-directeur de cabinet d'Elisabeth Borne qui se présentait sous les couleurs de la gauche.

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