Réforme de la justice
Le plan d’actions du garde des Sceaux pour les tribunaux
Le garde des Sceaux a récemment dévoilé les grandes lignes des différentes mesures et réformes issues des États généraux de la justice que la Chancellerie entend mettre en œuvre. Éclairage sur celles qui concernent l’organisation des tribunaux et les personnels judiciaires.
«Les 60 mesures que nous présentons sont cohérentes» et certaines sont assorties d’objectifs à atteindre «d’ici la fin quinquennat», a déclaré le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, lors de la présentation à la presse du plan d’action issu des États généraux de la Justice, le 5 janvier dernier.
Davantage de moyens humains et financiers pour la justice
«Je présenterai au printemps une loi d’orientation et de programmation de la justice qui fixera une trajectoire pluriannuelle ambitieuse des moyens alloués», a poursuivi le garde des Sceaux. Des moyens qui doivent notamment permettre de revaloriser les agents du ministère, poursuivre et finaliser le plan 15 000 places de prison, numériser la justice, moderniser et agrandir les palais de justice, et «surtout», recruter massivement pour renforcer les effectifs. La loi de programmation va ainsi entériner le recrutement de 10 000 emplois supplémentaires d’ici 2027, dont 1 500 magistrats et 1 500 greffiers. Le ministère a prévu un nouveau plan de transformation numérique «avec un horizon clair fixé pour 2027». Objectifs prioritaires : renforcer et sécuriser les réseaux, améliorer les logiciels métiers et recruter des techniciens informatiques dans toutes les juridictions.
Pour améliorer la qualité de vie au travail, «j’ai décidé de mettre en place rapidement un outil d’évaluation de la charge de travail» au sein des tribunaux pour évaluer «plus finement les besoins en effectifs», qui seront comblés par des recrutements de magistrats et «d’assistants du magistrat». En parallèle, le ministre souhaite qu’un accord-cadre sur la qualité de vie au travail soit négocié entres les directions du ministère et les syndicats. Quant à la revalorisation des métiers de la justice, elle passera notamment par une augmentation des rémunérations des magistrats de 1 000 euros par mois (déjà annoncée lors de la présentation du budget de la justice pour 2023) et de celles des greffiers et des surveillants pénitentiaires (qui seront annoncées à l’issue de la concertation avec les organisations syndicales).
Réorganisation des juridictions et réforme de la gouvernance de la magistrature
Un autre grand axe des réformes concerne l’organisation du ministère et des juridictions. Il vise notamment à confier davantage de pouvoirs de gestion (en matière budgétaire, immobilière, de RH) aux chefs de juridiction. Cette réorganisation administrative, qui devrait «être conduite courant 2023», se fera «sans toucher à la carte judiciaire», a précisé le ministre.
Dans «les mois à venir», les juridictions vont aussi devoir travailler à la constitution «d’une véritable équipe autour du magistrat» grâce au recours à des agents contractuels – ces «sucres rapides qui ont prouvé leur efficacité» et «ont été pérennisés», a-t-il rappelé. Étudiants en fin de cursus, enseignants en droit, greffiers et attachés d’administration en reconversion, assistants spécialisés… Des formations «adaptées à ces agents, contractuels ou statutaires, seront dispensées».
Cette réorganisation s’accompagnera d’une réforme de la gouvernance de la magistrature, via un projet de loi organique qui sera prochainement soumis aux magistrats. Objectifs : simplifier les voies d’accès à la magistrature pour les professionnels du droit, faciliter les recrutements de magistrats à titre temporaire, élargir le corps des enseignants de l’École nationale de la magistrature à des professionnels du management ou de la médiation, par exemple, séparer le grade de l’emploi afin que les magistrats ne soient pas obligés d’aller exercer en cour d’appel pour obtenir leur avancement, lancer une réflexion sur la responsabilité des magistrats et sur le mode de scrutin des élections au Conseil supérieur de la magistrature…
Une application mobile pour «dialoguer avec le monde judiciaire»
Enfin, le garde des Sceaux souhaite également développer une application smartphone permettant de «dialoguer avec le monde judiciaire». Simulateurs de pension alimentaire ou d’aide juridictionnelle, informations pratiques sur les tribunaux et les Point Justice, moteur de recherche pour trouver un avocat ou un notaire… L’application va s’enrichir de nouvelles fonctionnalités au fil du temps. En 2024, elle devrait, par exemple, permettre de faire une demande d’aide juridictionnelle ou d’indemnisation au tribunal correctionnel, de prendre rendez-vous avec un conseiller d’insertion et de probation, ou encore d’envoyer des rappels d’audience par SMS.