Patrimoine naturel

Le parc de la Bouvaque, poumon vert d’Abbeville

Avec ses 60 hectares aux portes du centre-ville, le parc de la Bouvaque séduit le grand public à des kilomètres à la ronde. En toute discrétion, il fait l’objet d’une gestion particulière permettant de conserver son authenticité.

Mathias Broutin, Monique Boulart et Noé Ferrari.
Mathias Broutin, Monique Boulart et Noé Ferrari.

« Nous étions continuellement dans les marais, dans la nature. C’était un émerveillement du matin au soir », à eux seuls, ces quelques mots du peintre Alfred Mannessier résument parfaitement ce que l’on peut ressentir en se promenant sur les sentiers du parc de la Bouvaque à Abbeville. Ici, l’ombre de l’artiste est matérialisée à plusieurs endroits. Lorsque l’on accède au parc par l’avenue de la République, un portait de lui, réalisé sur un transformation, accueille les visiteurs comme le ferait un visage familier.

Traversé par deux cours d’eau

Aux sources bleues, un panneau (faisant partie du parcours Manessier) met en concordance les magnifiques vitraux que le peintre a réalisés dans l’église Saint-Sépulcre, qui se trouve à quelques mètres de là, et la couleur intense de l’eau. « Nous sommes au fond de la vallée du Scardon, informent Mathias Broutin, responsable du Développent durable à la ville, et Noé Ferrari, qui office ici en tant que guide nature et agent d’entretien, avec deux autres personnes. La couleur est due à la roche mère, du calcaire. C’est la décomposition de la lumière sur le calcaire qui crée cet effet. Ces sources bleues sont un des points forts du parc. »

Aux sources d’Alfred Mannessier.

Se développant sur 60 hectares, le parc de la Bouvaque est traversé par deux cours d’eau : le Scardon, et son bras la Sautine, et le Novion. Les plans d’eau sont héritiers de l’histoire industrielle de la ville. Ils abritaient des bassins de décantations utilisés par l’ancienne sucrerie de la ville, vraisemblablement jusque dans les années 80.

De nos jours, le parc - ouvert de 8 heures à 20 heures - appartient à la ville : « C’est notre poumon vert, confie Monique Boulart, adjointe au Fleurissement, au cadre de vie et à la propreté. C’est un lieu de détente pour tous, les familles, les sportifs… tout le monde vient ici. Tous apprécient les petits chemins aménagés, la nature sauvage et préservée. Les chiens sont acceptés en laisse, on peut pique-niquer ici mais on n’a pas le droit de cueillir des fleurs. C’est une chance de posséder un parc comme celui là à deux pas de la ville. »

Au total, le parc de la Bouvaque abriterait 15 hectares de plans d’eau. Ce qui est fait un lieu de villégiature idéal pour les cygnes, foulques macroules, chevaliers guignettes, mouettes rieuses, canards, pies épeichettes, chouettes hulottes… Habitués à la présence des humains, certains restent sur place à l'approche des visiteurs. À l’image d’une foulque qui continue de couver, indifférente, ou de cygnes qui se toilettent les plumes. D’autres au contraire, trop sensibles, se réfugient dans des zones laissées sauvages pour vivre à l’abri des regards.

La foulque couve sous le regard des visiteurs.

Mais le parc est constitué en grande majorité d’espaces verts. C’est donc logiquement que son nom est une contraction des mots bœuf et vache en picard, car les lieux étaient historiquement des prairies pâturées. Il en subsiste encore, certaines poussent librement, les graminées y sont nombreuses, le but étant de laisser la nature s’exprimer, même sur des espaces boisés de deux hectares.

Le parc est un lieu de villégiature idéal pour les sygnes.

D’autres ont été clôturées et abritent notamment des vaches Highland, à l’aise dans ces milieux, des ânes ou des moutons. Un éco-pâturagea été mis en place en 2021 avec l’Asinerie du Marquenterre afin de prendre au soin de ce milieu privilégié : « Le but est d’adapter le nombre d’animaux par rapport à la taille des enclos, poursuit Mathias Broutin. Nous accordons beaucoup d’importance à la gestion écologique, à laisser des arbres morts pour certaines espèces s’ils ne sont pas dangereux, à utiliser le moins possible de matériel thermique. Nous voulons garder l’authenticité, l’attractivité des lieux pour ceux qui le visitent. »

Dans ce sens, un important travail est réalisé avec le Conservatoire des sites naturels de Hauts-de-France pour établir un plan de gestion favorable. Et cela fonctionne. On trouve au parc de la Bouvaque une flore exceptionnelle comme avec la fritillaire pintade, un genre de coquelicot menacé à l’échelle de la région, la benoîte des ruisseaux, la salicaire commune.

Au fil de la balade, les invisibles fauvettes à tête noire ou rossignols philomèles chantent leur bonheur de vivre ici. Quand on baisse la tête, on peut admirer des libellules, des téléphones fauves, des lapins, des criquets ensanglantés (en voie de disparition). Tritons, crapauds, grenouilles vertes… sont déjà très à l’aise dans les cinq mares creusées artificiellement en partenariat avec le Parc naturel régional baie de Somme-Picardie Maritime. Très prisé des Abbevillois et de nombreux visiteurs alentours, le parc est accessible par cinq entrées, bancs, plate-forme d’observation et passerelles permettent de prendre son temps dans ce lieu où il semble suspendu.

De l’éco-pâturage a été mis en place en lien avec l'Asinerie du Marquenterre.