Le «naming» gagne le sport français
«Qatar Prix de l’Arc de Triomphe», «Orange vélodrome»… Rebaptiser une compétition ou un stade du nom de son sponsor, la pratique, appelée «naming», se diffuse en France.
Basket, tennis, foot… dans de plus en plus de sports, la pratique du naming, consistant à rebaptiser compétitions et enceintes sportives du nom d’une entreprise ou d’une institution, se répand en France. Le 12 octobre 2018, à Paris, Sporsora, association qui réunit quelque 200 acteurs du secteur du sport, organisait la deuxième édition de son Observatoire du naming. Plusieurs témoignages ont illustré les enjeux et la manière dont se déroule cette pratique par laquelle des entreprises trouvent une forme de visibilité nouvelle, et les organisations sportives, des moyens financiers. Par exemple, en mars 2017, en plein championnat de basket, le nom de celui-ci, Pro A, a été changé en Jeep Élite. Chaque fois qu’il est prononcé dans les médias, ou affiché, cela revient à rendre la marque visible… Derrière ce changement, un accord noué entre le groupe Fiat Chrysler Automobiles et la LNB, Ligue nationale de basket. Pour le groupe automobile, il s’agissait de rendre la marque Jeep, jugée trop confidentielle, plus apparente. «Il nous fallait sortir des schémas traditionnels. Nous avons pensé au sport pour booster notre notoriété assez rapidement et pour développer des opportunités business», explique Stéphane Labous, directeur marketing chez Fiat Chrysler Automobiles. Les spectateurs de basket ont été considérés comme une cible prometteuse. De son côté, la LNB était à la recherche d’un «namer», explique Isabelle Collette, sa directrice générale adjointe. L’opération permet en effet de trouver des ressources financières nouvelles. Concrètement, Jeep a communiqué via la presse, la télévision et les réseaux sociaux, sur ce nouveau «naming». Et l’opération ne s’est pas arrêtée là. L’accord, en effet, prévoyait aussi des opérations avec des places de match mises à disposition pour les salariés de la marque et des VIP.
Le rôle clé des médias
Mais un tel dispositif ne peut fonctionner que si les médias, qu’ils soient partenaires de l’opération ou pas, décident d’adopter le nouveau nom donné à la compétition. «Point important, les partenaires médias ont joué le jeu dès le départ. Nous avons aussi lancé la Jeep Élite auprès des autres médias (…). Beaucoup de médias ont repris. Pas forcément au début, mais aujourd’hui, c’est l’immense majorité», témoigne Isabelle Collette. Chaîne propriétaire des droits de diffusion du championnat, RMC a tout fait pour que l’opération fonctionne. «Il y a des consignes pour que les journalistes reprennent (le nouveau nom). Pour nous, depuis quelques années, le naming est devenu «friendly». Les journalistes étaient très réticents au début, mais ils l’acceptent de mieux en mieux», explique François Pesanti, alors directeur général de RMC Sport. Pour lui, le naming a de l’avenir. «Le naming est un axe de développement évident du business pour le sport. C’est aussi un outil d’activation très important pour le monde économique qui a besoin de rentrer dans le sport. Il est au début de son histoire et se développe différemment en fonction des cultures et des pays. C’est déjà culturel dans le basket, le handball et le cyclisme et cela va se développer encore», précise François Pesanti, pour qui «il s’agit d’une lame de fond». Il faut regarder vers l’Allemagne, pour voir à quoi ressemble ce futur. Outre-Rhin, témoignait Moritz Schneider, directeur des nouveaux business et de l’événementiel chez Commerzbank-Arena, le naming a démarré dans les années 1990. Depuis, le stade de Düsseldorf a changé déjà trois fois de nom. Et les «nameurs» déploient des stratégies de plus en plus sophistiquées. Par exemple, ils se servent des stades pour y organiser leurs propres événements, comme des concerts, ou proposent à la population de choisir le nom du lieu.