Le frais sous conditions
Bertrand et Sandrine Lefebvre sont à la barre du Côte d’Argent depuis 24 ans. Arrimé à la plage de Calais, face au ballet incessant des ferries, en proie aux caprices météorologiques et aussi conjoncturels, ce restaurant n’affiche pas une ride. Son secret de jouvence ? «Des bons produits, frais, locaux, annonce Bertrand Lefebvre, et une clientèle diversifiée». Fini le temps où la clientèle anglaise assurait 40% de son chiffre d’affaires… La crise de 2008 a porté un coup dur à l’entreprise gastronomique. Il a fallu développer une stratégie mieux ciblée, qui touche un public plus large. Il a donc aménagé deux salles au-dessus de son restaurant, et réussi à fidéliser une clientèle d’affaires autour d’une vingtaine de couverts maximum ainsi qu’une clientèle plus familiale avec une cinquantaine de couverts. Les Belges, les Anglais, les «repas cadeaux», la classe “affaires” forment aujourd’hui l’essentiel de sa clientèle. Pour satisfaire ces diversités culturelles, rien de tel que l’authenticité. Du frais sous conditions. Il achète ses homards, crabes, soles, turbots, et bars à des grossistes de Boulogne-sur-Mer et Calais, ses poissons fumés à un producteur boulonnais. Pour ses légumes, il compte sur le professionnalisme d’un primeur calaisien qui s’approvisionne en grande partie chez les producteurs locaux. «Nous sommes environ cinq restaurateurs de Calais à faire notre marché chaque matin», explique le chef cuisinier, qui gère sa cuisine au rythme des saisons. Et pour satisfaire les palais britanniques qui franchissent le Détroit, il sait d’emblée que ses escargots les feront revenir. Produits par un éleveur du Boulonnais, les gros gris, à point en octobre, sont disponibles toute l’année grâce aux terrines d’escargots au genièvre de Houlle ou au roquefort en croquille. La viande fait office d’exception dans ce panel local. C’est la viande de bœuf Irish Angus qui s’affiche sur la carte : «Elle est d’une qualité constante, ce qui n’est pas toujours le cas dans la région.» Il est midi, les premiers clients vont arriver. Le chef d’orchestre donne le la en cuisine où cinq personnes s’affairent depuis plusieurs heures pendant que cinq autres, en salle, mettent la touche finale aux tables. «Les gens méconnaissent Calais, poursuit Bertrand Lefebvre, sa plage magnifique, le ballet des ferries, sa qualité de vie, sa gastronomie…»