Dossier
Le défi des émissions de gaz à effet de serre
Face au défi climatique et ses conséquences, de nombreuses mesures visent à atténuer les émissions avec l’objectif de plafonner le réchauffement en dessous de 2 degrés, selon les accords (déjà dépassés) de Paris. La filière de la construction se trouve face à de nombreux changements. L’immobilier en fait partie avec un calendrier et des objectifs précis.

Depuis 2010, plusieurs gouvernements se sont saisis de la problématique qui vise à réduire les émissions de l’immobilier tertiaire. Et pour cause, selon le ministère de la Transition écologique, la chaîne de valeur du bâtiment totalise à elle seule près de 23 % de l’empreinte carbone totale de la France et 43 % de sa consommation énergétique globale. La diminution des émissions de ce secteur est donc un enjeu majeur pour atteindre la neutralité carbone. C’est finalement en 2019 que le décret tertiaire a été voté avec la volonté de transformer la totalité du parc à l’horizon 2050. Le dispositif Éco Énergie Tertiaire (DEET) également appelé «décret tertiaire» impose ainsi une réduction des consommations énergétiques progressive : moins 40 % d’ici 2030, moins 50 % d’ici 2040 par rapport à une année de référence qui ne peut être antérieure à l’année 2010… et surtout l’ambition d’une baisse de 60 % d’énergie finale d’ici un quart de siècle. L’autre option est d’atteindre un niveau de consommation énergétique fixé en valeur absolue pour chaque type d’activité. Le décret s’adresse aux propriétaires et locataires de bâtiments tertiaires dont la surface d’exploitation est supérieure ou égale à 1 000 m2. Toutes les branches du secteur tertiaire sont concernées.
Anticiper les objectifs règlementaires
Pour atteindre cet objectif ambitieux, l’amélioration de la performance énergétique est une condition indispensable. L’installation d’équipements performants et de dispositifs de contrôle est une autre piste à l’heure où l’évolution des comportements des occupants devra également être engagée.
Si la première échéance à 2030 paraît lointaine, force est de constater qu’une réflexion devra être engagée en amont puisque des sanctions sont d’ores et déjà prévues à cette date échéance : mise en demeure, travaux obligatoires sous six mois puis amendes administratives. Chaque propriétaire ou preneur de bail d’un bâtiment concerné par le dispositif est dans l’obligation de déclarer annuellement ses données de l’année antérieure depuis 2022 directement sur le site OPERA (Observatoire de la performance énergétique, de la rénovation et des actions du tertiaire), en se rattachant à l’activité qu’il exerce. Cette plateforme de recueil et de suivi des consommations du secteur constitue un outil d’accompagnement des acteurs dans la transition énergétique. «Depuis l’année dernière, nous avons avant tout des demandes d’information et de décryptage», confie Benoît Comfaits, responsable de BCO Conseil, spécialisé dans la transition énergétique et la communication environnementale qui a accompagné 170 conseillers chargés d’affaire de la Caisse d’Épargne Grand Est Europe. Du côté du Crédit Agricole de Lorraine, les équipes ont également été sensibilisées. Et pour cause, face à des projets complexes et coûteux, la question du financement et d’une acculturation des financeurs sont deux prérequis. Les financeurs privés en ont parfaitement conscience et n’ont pas perdu de temps en prenant les devants.
Des travaux de rénovation ou de construction à venir
Cette nouvelle réglementation va inévitablement s’accompagner d’une vague de travaux de rénovation ou de construction. C’est d’ailleurs le cas à Bar-le-Duc où le site des Roises qui accueille actuellement, dans ce bâtiment vieillissant, le Crédit Agricole de Lorraine, la chambre d’agriculture de la Meuse, la Safer et la chambre de métiers mais également la CCI Meuse Haute-Marne. «Nous nous sommes rendu compte que la déconstruction et la reconstruction coûteraient moins chères qu’une simple rénovation, après étude. Nous marchons sur la tête», estime Richard Papazoglou, le président de la CCI Meuse-Haute-Marne.
Le Crédit Agricole s’est retiré du projet en préférant intégrer prochainement des bureaux en centre-ville de Bar-le-Duc, les autres protagonistes vont donc devoir retravailler leur copie et redimensionner le projet en 2025. C’est d’ailleurs le conseil N°1 de Benoît Comfaits : «Ne pas perdre de temps et profiter de l’année 2025 pour élaborer une stratégie, un plan en lien à la sobriété écologique et l’organisation du travail.» Il restera après moins de cinq ans pour se mettre aux normes. Si certains propriétaires optent par une nouvelle construction, une autre obligation réglementaire devra être prise ne compte avec le zéro artificialisation nette qui vise à ne pas créer de nouvelles friches, dans le cadre de la loi Climat et résilience adoptée en août 2021. L’autre préoccupation des porteurs de projets sera évidemment la question du financement de la remise aux normes ou des nouvelles constructions. Et une fois n’est pas coutume, le législateur a prévu un coup de pouce organisationnel avec l’obligation transition. À partir de 2025 et jusqu’au 31 décembre 2019, le dispositif sera accessible sous conditions aux entreprises justifiant d’un projet de décarbonisation de leur activité. Mis en place par la loi de finances 2024, cet accompagnement à long terme garanti par l’État avec une durée de huit ans et un différé d’amortissement de quatre ans, devrait être un outil d’accélération de leur décarbonisation. L’enjeu est d’ores et déjà de lever le frein financier pour que les objectifs du décret tertiaire soient atteints, contrairement au principe d’accessibilité généralisée inscrit dans la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits, et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées qui ne l’a jamais été.
Fin de la TVA à 5,5 % au 1er janvier 2025
À compter du 1er janvier 2025, fin de TVA à 5,5 % pour les chaudières fioul et gaz, même les modèles THPE pour très haute performance énergétique. Le taux a été réévalué à 10 % pour tout achat et installation. L’arrêté a été publié au journal officiel du 24 décembre 2024. Le projet de loi de finances (PLF) 2025 prévoyait de faire passer la TVA des chaudières gaz à 20 %, mais la mesure n’a pas été adoptée en raison de la censure du gouvernement Barnier.